Monde

Pourquoi la France aime tant le mariage de Kate et William

Temps de lecture : 3 min

La monarchie revient à la mode, comme un symbole de continuité rassurante.

Le futur mariage princier du 29 avril provoque un intérêt étonnant de la part des Français. Pour des républicains guéris du royalisme, nos compatriotes semblent frénétiques à l’idée que Catherine Elizabeth «Kate» Middleton épouse en grande pompe le Prince William de Galles le 29 avril prochain.

Trois chaînes de télévision nationales, TF1, France 2 et M6 diffuseront la cérémonie nuptiale en direct, permettant aux Français de s’ajouter aux deux milliards de spectateurs de l’heureux événement. On imagine sans peine que le mariage de «Kate et William» aura ses détracteurs, mais il est plus utile de comprendre la nature de l’événement, et ce qu’il signifie pour nos sociétés dites modernes.

On a déjà beaucoup discuté des avantages de l’union d’un membre de la famille royale avec une roturière, et de l’heureux symbole social de ce mariage. Au-delà de la couleur de la robe de Kate ou du choix de costume de William, la cérémonie a sa place dans le fonctionnement de l’Angleterre d’aujourd’hui.

Plus rentable que les Jeux olympiques mais moins que la Coupe du monde de football, l’opération «mariage princier» rapportera toutefois de l’argent, redorera l’image de la famille royale d’Angleterre et surtout permettra d’attirer l’attention de la planète sur l’ex-plus grand empire de la planète.

Croire en l'amour

La famille royale d’Angleterre continue de représenter un symbole fort, celui de la tradition d’un pays conquérant, ayant régné sur les 2/5e de la planète du temps de l’empire et se contentant aujourd’hui du Commonwealth. Même si le Royaume n’a d’uni que le nom, que la Bretagne n’est plus si grande, célébrer les noces d’un membre de la famille royale avec une jeune femme issue du peuple contribue à rappeler que l’Angleterre est avant tout un symbole, comme a pu efficacement le marteler la propagande de Humphrey Jennings durant la Seconde Guerre mondiale.

Un mariage princier, après le précédent unissant Diana Spencer à Charles de Galles, permet d’effacer plusieurs divorces au sein de la famille régnante, mais également de contrôler la teneur des informations en provenance de la Grande-Bretagne. A l’heure où le gouvernement Cameron prend des mesures impopulaires, où l’Irlande du Nord reprend la lutte armée contre l’envahisseur et alors que l’armée britannique en est réduite à s’associer avec le vieil ennemi français, un heureux événement commémoré par des milliers de services à thé du meilleur goût permet de voir le bon côté des choses et de croire à nouveau à l’amour, à la famille et à toutes ces valeurs que campe les Windsor.

Le succès phénoménal du film Le discours d’un roi montre que la royauté revient à la mode comme une sorte de garantie contre la rudesse des temps modernes. Un symbole fort qui se transmet le pouvoir génération après génération apparaît maintenant comme une institution à laquelle on peut se raccrocher après avoir épuisé les idéologies du XXe siècle. Même si le raisonnement paraît superficiel, nombreux sont ceux qui se font secrètement la réflexion, y compris dans la France républicaine.

Les Français sont-ils jaloux ou secrètement enamourés de la monarchie britannique? Il semble que comme toutes les autres nations, la France a besoin de mythes, résultats de la façon dont on retient l’Histoire et des traditions qui en découlent. La Ve République présente des aspects nettement monarchiques, en particulier avec la position dominante du Président, capable de contrôler le gouvernement comme l’Assemblée nationale, le Sénat étant de plus en plus décrédibilisé malgré ses capacités de contre-pouvoir. Si la posture monarchique a été assumée sans complexe par Charles de Gaulle, Georges Pompidou, Valéry Giscard d’Estaing et François Mitterrand, Jacques Chirac a entamé une rupture achevée par Nicolas Sarkozy.

Le président actuel n’est pas un héros, mais une célébrité. Selon la définition de Joseph Campbell, le héros est celui qui comprend qu’il doit donner sa vie pour les autres, alors que la célébrité, profondément égoïste, ne vit que par l’adoration des autres. La puissante et irrationnelle sarkophobie est provoquée en grande partie par le fait que le président de la République française veut donner une vision moderne de sa fonction, dépourvu des atours et de la pompe traditionnelle, mais remplacée par le bling scintillant qui lui est reproché dans un pays qui se sent en crise.

Nulle surprise alors de constater que les Français continuent de considérer le président américain comme un modèle. Barack Obama a réussi de par sa seule personne à redonner aux Français le goût de l’Amérique. En habitant avec calme la Maison blanche, il fait à nouveau rêver à l’American Way of Life. Mais les Français acceptent le président américain parce qu’il incarne la présidence américaine. Son attitude «cool» et ses hobbies, comme le basket, seraient déplacés à l’Elysée. Au final, ce que les Français veulent, c’est un président, un vrai, qui agirait avec grandeur et dignité. En d’autres termes, un roi.

Etienne Augé

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