«L'espoir est en marche» –«Η ελπίδα έρχεται» en grec dans le texte– était le slogan de campagne de Syriza, le parti de gauche radicale, qui a largement remporté, ce dimanche 25 janvier, des élections législatives cruciales, avec 36% des voix et 149 sièges sur 300, selon des résultats quasi-définitifs.
Ce slogan s'inspire de celui d'une élection qui a changé la face d'un pays: «La alegria ya viene», choisi par les opposants à Pinochet pour faire campagne lors du référendum qui marqua la fin de la dictature au Chili, en 1988.
Les Chiliens devaient voter sur le maintien de Pinochet au pouvoir, un référendum vu comme une formalité par le gouvernement. Jusqu'à ce qu'un publicitaire mène campagne pour le «non», comme le raconte si bien le film No, de Pablo Larrain, auquel nous avions consacré un article en mars 2013:
Il convainc peu à peu les résistants à la dictature, prêts à faire campagne sur le thème«Pinochet, c’est le Mal», que parler des morts et des souffrances, ce n’est pas super vendeur. Et à coups d’arcs en ciel et de gens qui dansent, spots aux airs de pubs pour Fanta ou Ricoré, il lance une campagne sur l’espoir, l’avenir, le futur.
D'où le slogan très positif: «Hey, le bonheur est en marche».
Tasos Koronakis, qui a accordé une interview sur la communication politique de son parti au journal grec Efsyn, a reconnu cette influence, qui s'inscrit dans une stratégie précise: ne pas viser seulement les voix des électeurs de gauche, mais celles de tous les électeurs. «Nouvelle Démocratie [le parti de droite du Premier ministre sortant Antonis Samaras, ndlr] dit constamment que des choses terribles vont se produire si Syriza gagne», a-t-il ajouté pour justifier l'idée d'un slogan joyeux et apaisé. Il a dit vouloir, comme les Chiliens à l'époque, ne pas se concentrer sur les épreuves traversées mais sur «la joie qui règnera si nous gagnons ensemble».
Pour le Washington Post, en choisissant «l'espoir arrive», Syriza a ciblé «tous ceux qui en ont assez du système bipartite et qui veulent le changement». On est loin des élections au Parlement européen, où Syriza avait opté pour le beaucoup plus partisan «Pour la première fois, la gauche».
A Efsyn, qui l'interroge sur l'absence du mot «gauche» dans le slogan de Syriza, Tasos Koronakis confirme:
«Notre devise en 2012, c'était "Eux ou nous", et c'était extrêmement radical. Aujourd'hui être radical, c'est revendiquer la démocratie. Ce n'est pas le nombre de fois où on dit le mot "gauche" qui montre que l'on est de gauche, mais ce qu'on fait. La campagne de Gabriel Sakellaridis n'utilisait pas non plus le mot "gauche". Y a-t-il quiconque qui doute du fait qu'un homme de gauche a tenté de remporter la mairie d'Athènes?»