Monde / Société

Un an et demi après la libération d'Auschwitz, d'anciens prisonniers y sont retournés pour en faire un musée

Temps de lecture : 2 min

Entrée d'Auschwitz / Logaritmo via Wikimedia Commons
Entrée d'Auschwitz / Logaritmo via Wikimedia Commons

Le 27 janvier 1945, les troupes de l'Armée rouge libérèrent les prisonniers du camp de concentration d'Auschwitz-Birkenau. 70 ans après la fin de la Seconde mondiale, l'ancien camp devenu un mémorial et un musée attire plus d'un million et demi de visiteurs par an.

Le musée, qui documente la vie quotidienne au camp de concentration et donne ainsi à voir l'étendue de la barbarie des nazis, a pourtant failli ne jamais voir le jour, rappelle l'hebdomadaire Der Spiegel. Un an et demi seulement après leur libération, une vingtaine d'anciens internés du camp sont retournés à Auschwitz pour tenter de sauver ce qui pouvait l'être et de rassembler tous les documents, lieux et objets qui attestaient de l'entreprise d'extermination menée par les nazis dans le but de créer un musée.

Leur tâche n'était pas aisé, car l'ancien camp était devenu la cible des «hyènes de cimetière», du nom qu'on donnait alors aux voleurs qui pillaient les sépultures. Comme s'en souvient l'ancien détenu et cofondateur du musée Stanislaw Hantz:

«Le combat avec les hyènes de cimetière était une chose atroce. Ils creusaient au milieu des restes humains à la recherche d'objets de valeur.»

Mais les restes du camp étaient surtout menacés par les autorités, qui, en raison de la pénurie de matières premières, faisaient par exemple démonter les baraquements pour en récupérer le bois et ont commencé à vendre les effets personnels des détenus assassinés dès 1946. La première exposition a malgré tout eu lieu l'année suivante. On pouvait notamment y voir deux tonnes de cheveux ayant appartenu aux 30.000 détenus morts à Auschwitz et d'anciens bidons de zyklon B, l'insecticide mortel qui était pulvérisé dans les chambres à gaz.

Ce retour volontaire au camp a été difficile au départ pour les anciens détenus, mais s'est avéré bénéfique, comme l'explique l'ancien prisonnier Tadeusz Szymanski:

«Les premiers temps n'ont pas été faciles, mais bons. Bons pour ma psyché. Ici à Auschwitz je ne faisais plus de cauchemars sur Auschwitz.»

Pour se distraire, les anciens internés du camp allaient nager ou danser ensemble, quand ils n'organisaient pas des événements sportifs dans les décombres du camp:

«Vu de l'extérieur, ces événements ont dû paraître déconcertants: d'anciens prisonniers du KZ qui faisaient la course entre le crématorium du "camp ordinaire" [1] et la villa du commandant du KZ Rudolf Höß.»

Leur courage et leur travail ont permis de documenter avec précision la vie au camp de concentration, dont seules les images tournées par les Alliés à la libération du camp ont d'abord témoigné. Lors de la 65ème édition de la Berlinale, en février 2015, des images encore jamais rendues publiques, tournées par les soldats britanniques, seront montrées dans le cadre du festival. À voir également sur Arte le 29 janvier. Le documentaire britannique Night Will Fall reconstitue la trame de ce film jamais achevé, avec des images découvertes par Sidney Bernstein et montées par un groupe de monteurs aguerris supervisés par Alfred Hitchcock en personne, comme l'explique Arte:

«Après la défaite du nazisme, le projet, pourtant presque achevé, va être abandonné: les Britanniques, qui redoutent l’afflux de réfugiés juifs en Palestine, mais aussi au Royaume-Uni, craignent que l’opinion ne se mobilise en leur faveur.»

1 — Signification du terme de «Stammlager», plus connu sous son abréviation de «Stalag».

Mise à jour: Night Will Fall n'a pas été réalisé par Alfred Hitchcock, ce dernier a supervisé l'équipe de monteurs.

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