Sports

Petit manuel à destination des clubs de foot professionnels pour réussir leur mercato d'hiver

Temps de lecture : 6 min

Trucs et astuces pour ne pas dépenser son argent n'importe comment...

Marco Verratti , Florian Thauvin, Dimitri Payet et Rod Fanni, pendant le match PSG-OM du 9 novembre 2014 au Parc des Princes. REUTERS/Charles Platiau
Marco Verratti , Florian Thauvin, Dimitri Payet et Rod Fanni, pendant le match PSG-OM du 9 novembre 2014 au Parc des Princes. REUTERS/Charles Platiau

Dans le monde du football, le mercato d'hiver (du 1er au 31 janvier) peut être comparé aux soldes du mois de janvier. C'est une période d'appoint où, dans l'idéal, on va s'offrir le cadeau qu'on n'a pas eu la chance de trouver sous le sapin à Noël.

Mais en matière de ballon rond, le marché de Noël a lieu l'été. C'est sous la chaleur estivale que les entraîneurs des clubs professionnels envoient leur liste au Santa Claus local –leur président– et remodèlent leur équipe tout en faisant rêver les supporters autant que possible.

Le mercato d'hiver arrive lui à la mi-saison, après cinq mois de compétition. Un laps de temps dans lequel des équipes ont déjà vu leurs rêves de grandeur partir en lambeaux, quand d'autres revoient leurs ambitions à la hausse. Ajoutez une poignée de sel, et tous les ingrédients sont réunis pour faire du mercato d'hiver une foire d'empoigne, avec à ma gauche un entraîneur qui veut recruter pour pallier les défauts de son effectif bâti à l'été, et à ma droite un président qui compte offrir un renfort bonus à son coach.

Mais entre pression du résultat à court terme –inhérente au football– et argent à gogo, le mercato d'hiver est souvent le théâtre d'investissements foireux de la part des clubs professionnels. Voici quelques règles à suivre pour s'en sortir au mieux. Et ne pas recruter l'Anglais Andy Carroll lors du dernier jour du mercato d'hiver en 2011 pour 42 millions d'euros, comme l'avait fait Liverpool.

1.Ne pas tout bouleverser

La première règle pour bonifier son équipe lors du mercato d'hiver est de ne pas tout chambouler. Un collectif a besoin de temps pour prendre forme dans un effectif, et même en cas de première partie de saison médiocre, il faut retoucher aux marges un onze-type.

Dans ce sens, le pire exemple d'une gestion de mercato, est peut-être celui de Bernard Tapie avec l'OM lors de la saison 2001-2002. De retour aux manettes du club l'été précédent, «Nanard» casse la dynamique de l'équipe qui commençait seulement à prendre forme à la fin de l'automne après un été très mouvementé (22 arrivées!). L'ancien patron d'Adidas recrute en effet pas moins de neuf joueurs lors de ce mois de janvier 2002, et en vend 11 autres pour un total de 19 mouvements lors de ce mercato d'hiver. L'OM bouclera la saison à une médiocre 9e place de Division 1 (le championnat devient Ligue 1 la saison suivante).

2.Préparer la saison suivante

Recruter un joueur lors de la période des fêtes, c'est d'abord faire un pari pour l'avenir. Un jeune espoir ne donnera souvent pas la pleine mesure de son talent en quelques semaines dans un environnement tout nouveau pour lui.

C'est encore plus vrai pour les joueurs étrangers qui débarquent en France pour la première fois. On pense aux Sud-Américains, toujours nombreux à faire leurs valises pour l'Hexagone en janvier et qui ne parlent pas la langue, ne connaissent pas les rigueurs de l'hiver européen ni la dimension physique et tactique de la Ligue 1.

L'un des meilleurs exemples récents est Lucas Moura, le prodige brésilien du PSG. Arrivé dans la capitale lors de l'hiver 2013 pour 40 millions d'euros en provenance du club de São Paulo et présenté dès lors comme un futur crack mondial, le jeune milieu offensif alors âgé de 21 ans mettra plusieurs mois, voire une saison complète à justifier le prix de son transfert. Après avoir été longtemps critiqué par les médias et les observateurs, il est le meilleur joueur du PSG cette saison.

Plus généralement, il est rare qu'un joueur étranger ou qu'un jeune espoir réussisse en quelques mois. Les achats d'hiver, c'est aussi anticiper l'été suivant.

3.Faire des paris peu coûteux

On l'oublierait presque, mais le principe des soldes est d'abord de faire de bonnes affaires pour pas cher. Evidemment, il y a toujours le risque d'être déçu par la qualité de ce nouveau pull acheté pour pas grand-chose entre deux cartons. Mais, même en cas de déception, le portefeuille ne fait pas trop grise mine.

C'est la même chose en football où le mois de janvier est aussi l'occasion de tenter des coups pour relancer pour «peanuts» des joueurs à potentiel, qui n'ont pas de temps de jeu dans leur club ou reviennent tout juste d'une longue blessure. Pour les petits budgets, le must reste de se faire prêter un joueur avec option d'achat. Si la recrue est une bonne pioche, le club l'achète en fin de saison, et dans le cas inverse le joueur retourne dans son club d'origine.

A l'hiver 2013, Bastia engage gratuitement le gardien international français Mickaël Landreau, qui a résilié son contrat avec Lille en décembre. Le troisième gardien des Bleus lors de la Coupe du monde 2014 sera décisif dès son premier match avec les Corses lors d'un déplacement à Reims où il sort le grand jeu avec de nombreuses parades. C'est aussi sous les couleurs bastiaises que Landreau battra le record de matchs joués en Ligue 1 par un footballeur avec 603 rencontres disputées. Le parfait exemple du pari gagnant sur le plan sportif et médiatique.

En ce mois de janvier 2015, c'est Nice qui a tenté le pari gagnant-gagnant –sur le papier– le plus risqué, mais aussi le plus bankable en cas de succès.

En recrutant gratuitement Hatem Ben Arfa, 27 ans, l'un des joueurs français parmi les plus talentueux, mais dont la carrière ressemble pour le moment à un long gâchis en raison de son comportement. Depuis son départ de Lyon en 2008, cette tête brûlée de la fameuse «génération 87» n'a jamais confirmé son talent à Marseille, Newcastle et Hull City, en dehors de quelques coups d'éclats comme ce but incroyable inscrit sous les couleurs de Newcastle.


Le club de Nice l'a recruté sans indemnités de transfert puisque le joueur a résilié son contrat avec Newcastle, qui l'avait déjà prêté à Hull City ces derniers mois.

Sur ce pari sportif, le club de la Côte-d'Azur a tout à gagner et a priori pas grand-chose à perdre –à moins que le joueur ne pourrisse l'ambiance du vestiaire.

Seulement, ce joli coup pourrait bien ne pas se faire: son contrat pourrait ne pas être homologué si l'on considère que le joueur a porté les couleurs de NewCastle et de Hull City cette année, son transfert à Nice portant le nombre de clubs à 3, ce qui est interdit par le réglement de la Fifa.

4.Ne pas acheter dans l'urgence

Dans son édition du 2 janvier, le quotidien L’Equipe révélait qu'en janvier 2014, près de 20% des transferts du mercato d'hiver des clubs français avaient eu lieu le 31 janvier. En 2013, ce ratio s'élevait à 30%, contre 25% en 2012. C'est un fait, les clubs professionnels font souvent leurs achats d'hiver à la dernière minute. Et sous la contrainte de l'horloge, les prix grimpent en flèche et les choix sportifs en matière de transfert virent parfois à l'irrationnel.

L'an dernier, sur le marché des attaquants dans les dernières heures du mercato, Monaco avait, au rayon des paris risqués, tiré une bonne pioche avec le vétéran bulgare Dimitar Berbatov, quand le FC Nantes s'était manqué avec le transfert d'Itay Shechter, un avant-centre israélien.

5.Ne pas renforcer la concurrence

Le mercato d'hiver est souvent cruel pour les clubs modestes qui ont réalisé un début de saison au-delà de leur espérances. Un grand club qui veut se renforcer n'hésitera pas en effet à piller un club qui le concurrence au classement à la mi-saison, mais qui ne possède pas la même force financière.

Ce mois de janvier, Arsenal fait ainsi le forcing pour débaucher le Français Morgan Schneiderlin de Southampton, une équipe qui précède les Gunners en Premier League mais qui n'a pas les mêmes moyens financiers. La règle implicite veut pourtant qu'un club, même au budget limité, ne vende pas ses meilleurs joueurs directement à la concurrence en vue de la deuxième partie de saison. Mais comme pour toute règle, il y a des exceptions.

6.Bien gérer la CAN

Tous les deux ans, la Coupe d'Afrique des nations vient s'intercaler au mois de janvier au milieu des calendrier surchargés des clubs européens. Conséquence, de nombreuses équipes voient leurs internationaux africains s'envoler avec leur sélection pour plusieurs semaines. Un vrai handicap pour certaines équipes.

Cette saison, l'OM, à la lutte pour le titre avec le PSG, voit ainsi deux de ses meilleurs joueurs, André Ayew (Ghana) et Nicolas Nkoulou (Cameroun) rejoindre la grand-messe du football africain.

En France, où la proportion de joueurs africains est particulièrement forte, les clubs doivent donc anticiper les années impairs (où se tiennent désormais la CAN) en ne s'exposant pas à un départ trop important de joueurs. Difficile en tout cas de recruter pour remplacer les joueurs partis, le coût d'un transfert ou d'un prêt est souvent trop important pour combler une absence de quelques semaines. Marcel Bielsa, le coach de l'OM, a ainsi déclaré fin décembre que Marseille n'avait pas besoin de remplaçants cet hiver pour pallier les départs d'Ayew et Nkoulou.

7.Le bonus jackpot

En matière de business, certains clubs sont des spécialistes des marges mirifiques faites grâce au mercato d'hiver.

On pense à Lille, qui avait acheté Florian Thauvin à Bastia pour 3,5 millions d'euros en janvier 2013, avant de le revendre 12 millions d'euros à l'OM dès l'été suivant. Le club nordiste pourrait remettre le couvert cette saison. En août dernier, il a cédé son attaquant belge Divock Origi à Liverpool pour 19 millions d'euros, tout en ayant le droit de conserver le joueur en prêt pour une saison supplémentaire. Liverpool, en difficulté en Premier League, est prêt payer 6 millions d'euros supplémentaires dès ce mois de janvier 2015 pour mettre fin au prêt d'Origi à Lille, mais l'affaire n'est pas sûre d'aboutir.

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