De nombreux Canadiens ne le savent pas, mais dans le code criminel du Canada, la «diffamation blasphématoire» est une infraction passible d'un maximum de deux ans de prison. Le blasphème est donc techniquement illégal au Canada.
Ces derniers mois, les chefs de deux organisations de défense de la laïcité –Humanist Canada et le Center for Inquiry– ont rencontré des officiels du gouvernement pour demander l'abrogation de cette loi. Ils ont expliqué au journal National Post que, depuis l'attentat contre Charlie Hebdo, ils sont encore plus déterminés à défendre le droit au blasphème.
«Ces meurtres nous attristent profondément et nous convainquent encore davantage qu'il faut éliminer les vestiges de ces attitudes anciennes», a expliqué Eric Adriaans, le directeur du Center for Inquiry. Selon lui, l'interdiction du blasphème est en contradiction avec les idéaux de liberté d'expression que le gouvernement canadien défend à l'international.
Depuis 1935, personne n'a été condamné pour blasphème dans le pays, même si des organisations catholiques ont tenté plusieurs procès. En 1979, un prêtre anglican a voulu poursuivre en justice la chaîne de cinémas qui diffusait le film des Monty Python La vie de Brian, une comédie sur la vie de Jésus. Mais sa plainte n'a pas abouti.
Le National Post rappelle que l'année dernière en France, une organisation musulmane avait assigné Charlie Hebdo devant le tribunal correctionnel de Strasbourg, en essayant d'utiliser le fait que le délit de blasphème existe dans le droit local alsacien. Le procès avait échoué car le régime du concordat d'Alsace, datant de 1801, reconnaît le christianisme et le judaïsme, mais pas l'islam.
En Grèce, en 2014, un blogueur avait écopé de dix mois de prison avec sursis pour une page Facebook se moquant d'un moine. L'Angleterre a aboli sa loi anti-blasphème en 2008, et il y a actuellement un débat sur le sujet en Irlande, où le ministre de la Justice vient d'annoncer qu'un référendum devrait être organisé d'ici la fin de l'année. Actuellement, une personne qui publie ou tient des propos blasphématoires est passible d'une amende de 25.000 euros maximum, et jusqu'en 1987, La vie de Brian était interdit en Irlande.