La Pologne compte plusieurs cimetières où des «vampires» sont enterrés. Parmi eux, celui de Drawsko, au nord-ouest du pays, remonte au XVIIe ou au XVIIIe siècle. En analysant des fragments d’os issus de ce cimetière, des chercheurs pensent avoir retrouvé la véritable identité de ces supposés vampires: il s’agirait de locaux victimes du choléra, selon une étude publiée sur PlosOne, que relaye Livescience.
Les sépultures des soi-disant vampires sont reconnaissables car elles se présentent différemment de celles des autres êtres humains. Pour empêcher les morts de revenir à la vie, des rites funéraires particuliers étaient appliqués: on les enterrait avec des faucilles ou des rochers placés sur le cou. L’idée était que, s’ils tentaient de sortir de leur tombeau, ils auraient des difficultés à se lever, seraient décapités par la faucille, ou que les rochers les empêcheraient d’ouvrir la mâchoire pour manger.
Selon Lesley Gregoricka, bioarchéologiste et co-auteur de l’étude:
«Dans la tradition ancienne, un individu courait le risque de devenir un vampire après la mort si il ou elle n’était pas baptisé(e), décédait d’une mort violente, était le premier tué dans une épidémie, ou était un étranger d’une autre localité.»
Les scientifiques ont donc analysé des molaires de cadavres issus de 60 tombes sur les 333 de Drawsko, et en particulier de six d’entre eux, des femmes et des hommes, identifiés comme «vampiriques». Les chercheurs ont mesuré le taux de strontium présent dans l’émail dentaire, qui varie en fonction de l’environnement dans lequel évoluent les individus, et est unique pour une localisation géographique donnée. En fonction de cela, ils ont déduit que ces «vampires» étaient des locaux, ce qui viendrait donc infirmer l’hypothèse selon laquelle ils auraient pu être des immigrés.
Par ailleurs, l'examen des squelettes n'a pas permis de trouver de traces d’une mort violente ou de graves traumatismes, rapporte LiveScience. Ces autochtones pourraient donc avoir été des patients zéros du choléra.
En effet, au cours du XVIIe siècle, l’infection s’est propagée à travers l’Europe de l’Est et entraîné des morts rapides: les personnes en bonne santé touchées par la bactérie pouvaient décéder en 12 à 24 heures. Et le manque de connaissances médicales des populations ne leur permettait pas d’expliquer le phénomène, selon Lesley Gregoicka:
«Les gens de la période post-médiévale ne comprenaient pas comment la maladie s’est répandue, et plutôt qu’une explication scientifique à ces épidémies, le choléra et les décès qui en ont résulté ont été expliqués par le surnaturel –dans ce cas précis, les vampires.»
L’idée de vampires se nourrissant de sang est d’ailleurs née pendant les invasions et épidémies, lorsque les cadavres en décomposition gisaient longtemps à l’air libre, explique LiveScience:
«Le corps a tendance à gonfler après le décès, à cause des gaz produits par les bactéries. Cette pression dans le bas du corps, conduit à son tour le sang des poumons jusqu’à l’oesophage et ensuite à travers la bouche, ce qui a pu amener les villageois à croire que le cadavre d’une personne qui était maigre et chétive pendant sa vie avait grossi parce qu’il était repu de sang.»
Un archéologue de l’Université de Rzeszów en Pologne fait d’ailleurs remarquer à Newsweek qu’il faut demeurer prudent sur l’utilisation du terme «vampire»: les rites funéraires inhabituels pourraient aussi avoir été pratiqués pour d’autres raisons, par exemple sur des personnes accusés de magie ou de crimes odieux.