D’après une étude menée par deux chercheurs, Matthias Doepke (Northwestern University, Etats-Unis) et Fabrizio Zilibotti (University of Zurich, Suisse), rapportée par le Washington Post, il existerait une corrélation entre l’attitude parentale vis-à-vis de leurs enfants et la société dans laquelle ceux-ci vivent, notamment sur le plan des valeurs qu'ils vont mettre en avant. Plus vous vivez dans une société inégalitaire, plus vos parents ont de chance d’être stricts. L’inverse est aussi vrai. Sauf en France.
Les chercheurs expliquent:
«[Les parents] peuvent avoir un impact sur les choix de leurs enfants de deux manières différentes: soit en influençant leurs préférences, soit en leur imposant des restrictions directes sur l’ensemble de leurs choix.»
Depuis cette distinction, l’étude sélectionne des valeurs parentales significatives, comme la place de l’imagination et de l’indépendance dans l’éducation ou la valorisation du travail. Ces dernières sont alors confrontées au taux d’inégalités dans une société, calculé grâce au coefficient de Gini.
Mise en relation du Coefficient Gini et des valeurs parentales, Etude PARENTING WITH STYLE
Les résultats montrent que plus une société est inégalitaire, comme les Etats-Unis par exemple, plus les parents ont une propension à valoriser le travail et à limiter le développement de l’imagination dans l’éducation qu’ils procurent à leurs enfants.
L’inverse est tout aussi vrai, notamment dans une société comme la Suède qui, avec un coefficient de Gini particulièrement faible (signe d’une société égalitaire), valorise beaucoup plus l’indépendance d’esprit que la valeur travail.
La France (comme l’Espagne) semble néanmoins faire exception à cette théorie. Le taux d’inégalités est relativement faible, mais l’éducation qui y est donnée par les parents apparaît comme plus stricte que celle donnée dans nombre des pays comparés. Les parents français valorisent autant le travail que les parents américains et mettent pratiquement aussi peu en avant l’imagination que les parents turcs (la Turquie étant le pays le plus inégalitaire présenté dans l’étude).
Le Washington Post conclut en expliquant que ces traits de caractère sont guidés par les risques et les possibilités d’évolution auxquels seront confrontés les enfants dans leur vie future. Dans les sociétés inégalitaires, les possibilités d’évolution sociale, comme celles de déclassement, sont si fortes que les parents cherchent à maximiser leurs chances de réussite.
La France demeure un mystère. Pour expliquer le décalage mis en relief par leur étude, les chercheurs lancent une autre piste:
«L’apprentissage dans les écoles française est vertical et l’accès à l’élite nationale par le biais des grandes écoles est extrêmement restrictif. C’est pour cela que les parents valorisent le travail au détriment de l’indépendance et de l’imagination, et ce même si les inégalités y sont faibles.»