Boire & manger

La déferlante des whiskies rares venus du Japon

Temps de lecture : 4 min

Du jamais-vu. Une multitude de flacons de whisky nippon se bousculent en cet automne. Les geeks du malt manga se frottent les mains en salivant.

© GUILLAUME LEBLANC/ LMDW/ Whisky Livre 2014, au Nikka Taketsuru Bar.
© GUILLAUME LEBLANC/ LMDW/ Whisky Livre 2014, au Nikka Taketsuru Bar.

Amateurs de whisky japonais, ne vous laissez pas leurrer par l’été indien: pour vous, Noël se pointe en avance. Santa Claus a semble-t-il trouvé un raccourci pour tracer depuis le pôle Nord jusqu’en France –à moins qu’il n’ait dopé ses rennes à l’EPO. Toujours est-il qu’une profusion rarement vue d’embouteillages nippons nous arrive en ce moment, aimantés par une demande qui ne faiblit pas d’un iota depuis une dizaine d’années.

Près de 800.000 bouteilles de whisky japonais ont trouvé preneurs en France en 2013. Une goutte de pluie dans les trombes de scotch (8 millions de bouteilles consommées en single malts et… 119 millions de blends) qui arrosent l’Hexagone. Néanmoins, la qualité et l’originalité des flacons nippons séduisent plus que jamais, et la goutte d’eau commence gentiment à chanter en rivière.

Protéger une image de luxe

A vrai dire, il ne tiendrait qu’aux distilleries japonaises de faire de cette rivière un fleuve. Mais les marques, surtout les deux leaders Suntory et Nikka, ont déjà fort à faire pour rassasier un marché intérieur très gourmand, et se montrent soucieuses de protéger leur image à l’étranger, souvent plus haut de gamme que dans l’Archipel où elles écoulent quantité de blends bon marché. Ce sont donc leurs bouteilles premium que les Français connaissent.

Honneur à la maison Nikka, qui fête ses 80 ans avec une envolée de flacons, présentés au dernier Whisky Live (mais il fallait jouer des coudes pour approcher le stand pris d’assaut) et mis en vente fin septembre. Aux quatre single casks déjà signalés ici s’ajoutent un Taketsuru 21 ans non filtré à froid (300 bouteilles seulement) et un autre Madeira Finish (2 fûts embouteillés) –rien à moins de 250 €, inutile de le préciser (si?).

Prix vertigineux

En marge du Whisky Live, le chief blender de Nikka, Tadashi Sakuma, dévoilait sa pépite: The Nikka Blend 40 ans, un assemblage de 20 fûts seulement, dont un du plus vieux Yoichi (1945) réveillé dans les chais, et deux ou trois fûts de Miyagikyo 1969. Un jus complexe qui ôte lentement son kimono, couche après couche, pour ne se révéler qu’aux plus patients, aux plus attentifs des amoureux. Neuf cents carafes (200 pour l’Europe) arriveront en boutique en décembre, au prix de (commencez à vous tapoter les joues pour ne pas tomber dans les pommes)… 3.600 €. Son jeune frère de 12 ans nous est promis pour 2015, tel un joli lot de consolation.

Chez le grand rival Suntory, très occupé à prendre d’assaut le marché américain depuis le rachat de Jim Beam, rien à déclarer de nouveau, on reste sur les malts sans compte d’âge sortis au printemps, les Yamazaki et Hakushu Distiller’s Reserve. Et la Cask Collection ne proposera pas d’éditions limitées cette année. Cela nous laissera le temps de goûter les tentations qui se profilent ailleurs.

Il y a moins d’un an, deux fondus de whisky nippon, Frédéric de Francqueville et Nicolas Rua, lançaient avec culot deux sites internet dédiés à leur passion: la boutique en ligne Uisuki et le blog Whisky-japonais.net. Avec une devise de mousquetaire en arrière-plan: si tu ne viens pas à Lagardère, Lagardère ira à toi! S’avisant que, sur 6 distilleries japonaises en activité, 3 restaient inconnues en France, les deux compères sont allés chercher à la source une petite quantité de bouteilles réservées au marché japonais, opération qu’ils entendent renouveler régulièrement.

L’onglet «Direct de Tokyo» s’est inauguré avec deux single malts de Mars Whisky, produits par la distillerie Shinshu qui, après dix-neuf ans d’interruption, a recommencé en 2011 à distiller du whisky dans ses alambics pot still. Je vous les pose là pour la forme, car le Komagatake 10 ans et le Komagatake «The Revival» 2011 (58%), sorti le 6 août au Japon pour marquer la renaissance de la distillerie, se sont envolés à peine mis en vente.

Le second devrait néanmoins être réassorti dans les semaines qui viennent. Et un Komagatake 10 ans affiné douze mois en fûts de vin rouge de Yamanashi, édition ultra-limitée présentée en coffret, surgira prochainement.

Gageons que les prochains flacons de Mars Whisky nous parviendront en plus grand nombre: Shinshu a commencé à embouteiller en 70cl (la norme pour pénétrer le marché européen), et non plus en 75 cl. Un signe qui ne trompe pas.

Ce week-end, le site devrait proposer des whiskies de Suntory introuvables sous nos latitudes: le Yamazaki édition limitée 2014 et le Chita single grain, un whisky de maïs essentiellement, âgé d’une dizaine d’années et produit par l’immense distillerie de Chita qui remplit les blends de Suntory.

Dans les semaines qui suivent, deux whiskies de Kirin arriveront: le Fuji-Sanroku 18 ans, le seul single malt produit par la distillerie de Fuji-Gotemba, assise au pied du mont Fuji, et le Tarujyuku 50, un blend qui fait tout à moitié: 50% en volume d’alcool, en proportion de malt et en pourcentage de grain. Commencez à cliquer: à 39,90 € le flacon de 60 cl (il a fallu une dérogation des douanes pour importer ce format), si vous parvenez à le glisser dans le panier pensez à jouer au Loto dans la foulée.

Chacun son morceau de Japon

Au Japon, la mort est un concept qui n’a rien de vraiment définitif, et les distilleries défuntes continuent à hanter les fantasmes des collectionneurs de malts rares. Quatre fûts de Karuizawa (1978 cask 8383 Bourbon Barrel 63%, 1979 cask 8187 Bourbon Barrel 58,8%, 1980 cask 6476 Bourbon Barrel 63% et 1981 cask 136 Sherry Cask 55,3%) vont se disperser façon puzzle moyennant 5 à 8 billets de 100€. A ce prix, les bouteilles qui parviennent en France se vendent en une heure. Plantez vos tentes face à La Maison du whisky –choisissez celle du carrefour Odéon: il y a un petit terre-plein, cela gênera moins les passants.

Hanyu doit bientôt abattre sur le tapis son très attendu Joker Colour Label (57,7%) ainsi qu’un single cask millésime 2000.

Enfin, pour revenir chez les vivants, on guettera le Chichibu 2009 cask 641 (fûts de bourbon de premier remplissage, 61,7%), une exclu France pour La Maison du whisky. Une édition 2010 bourbon barrel l’accompagnera.

Chacun devrait donc pouvoir croquer son petit morceau de Japon… y compris d’ailleurs les Ecossais, qui cherchent à leur tour l’inspiration dans le Pacifique. Après Chivas qui a lancé au Japon une série limitée affinée en fûts de mizunara (ne cherchez pas, vous avez plus de chances d’attraper une licorne au lasso), voilà que Bowmore (qui appartient à Suntory) fait vieillir sur Islay quelques fûts de ce chêne nippon qui diffuse d’étonnantes notes d’encens un peu cireuses. On en reparle dans quelques années?

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