Avec la fin de la deuxième journée de la phase de groupes, dimanche 22 juin, l'heure du premier bilan d'étape de cette Coupe du monde 2014 est arrivée. En dix jours, 32 matchs ont été joués, soit la moitié des rencontres de la compétition, et toutes les équipes en ont disputé deux, ce qui permet d'avoir quelques indications sur les forces en présence et les grandes tendances du tournoi.
1.Le point sur les qualifiés/éliminés
Il reste 10 places pour 21 équipes
Six équipes sont dores et déjà qualifiées pour les huitièmes de finale (les Pays-Bas, le Chili, la Colombie, le Costa Rica, l'Argentine et la Belgique) et cinq déjà éliminées (le Cameroun, l'Australie, l'Espagne, l'Angleterre et la Bosnie-Herzégovine).
Les situations dans les groupes sont très diverses. Le groupe B (Pays-Bas, Espagne, Chili, Australie) est le seul où l'on connait déjà le sort de toutes les équipes, même si le dernier match entre le Chili et les Pays-Bas aura son importance puisqu'il déterminera qui sera premier et deuxième du groupe, et donc la partie du tableau dans laquelle chaque équipe se retrouvera à partir des huitièmes de finale. Les groupe E (celui de la France) et G sont au contraire les seuls où toutes les équipes peuvent mathématiquement encore se qualifier ou être éliminées.
21 équipes peuvent encore espérer décrocher une des dix places qualificatives restantes. Certaines sont quasiment assurées de continuer l'aventure mais doivent attendre le troisième match pour valider définitivement leur ticket, comme la France: les Bleus sont la seule équipe à 6 points pas encore officiellement qualifiée, mais la société de prédiction Predictwise la donne qualifiée à 99% en raison de son excellente différence de buts (+6).
D'autres sont au coude à coude et vont s'affronter dans des matchs qui ressemblent à des seizièmes de finale. C'est le cas du Mexique et de la Croatie dans le groupe B ou de l'Italie et de l'Uruguay dans le groupe D.
2.L'inconnue du tirage au sortEt si l'adversaire des Bleus dépendait du hasard?
La règle est parfois méconnue mais, en cas d'égalité sur quatre plans entre deux équipes (points, différence de buts, buts marqués et confrontation directe), la Fifa devra recourir au tirage au sort pour les départager. Une procédure qui n'a servi qu'une fois, en 1990, pour séparer deux équipes déjà qualifiées, l'Irlande et les Pays-Bas.
La poule où ce scénario loufoque est le plus susceptible de se produire est la F, qui désignera l'adversaire de la France en huitièmes. Il «suffirait» que l'Iran batte la Bosnie-Herzégovine d'un but d'écart et que le Nigéria s'incline sur le même score face à l'Argentine pour que ces deux équipes soient départagées par le hasard.
Les autres scénarios sont en revanche beaucoup plus improbables. Dans le groupe A, il faudrait que la Croatie batte le Mexique 3-2 et le Cameroun le Brésil 2-0 pour que Mexique et Brésil soient à égalité. Dans le groupe C, que le Japon batte la Colombie 2-1 et la Grèce la Côte d'Ivoire 3-0. Dans le groupe G, que le Portugal batte le Ghana 2-0 et l'Allemagne les États-Unis 3-0, ou que le Ghana batte le Portugal 3-0 et les États-Unis l'Allemagne 2-0. Dans le groupe H, que la Russie batte l'Algérie 4-3 et la Corée du Sud la Belgique 2-0.
3.La bataille des continentsQuitte ou triple pour l'Europe
Les équipes européennes n'ont jamais été très à l'aise quand la compétition s'est tenue sur le continent sud-américain (elles n'y ont jamais remporté le trophée), et cette tendance semble se confirmer voire s'amplifier cette année. Au contraire, les pays du continent américain au sens large ont pour le moment impressionné.
Sur les six équipes déjà qualifiées, quatre sont des pays d'Amérique (centrale ou du Sud), tandis que sur les cinq déjà éliminées, trois sont des équipes européennes. L'exemple le plus frappant de cette différence de forme a sans doute été la victoire 2-0 du Chili sur l'Espagne, championne du monde et double championne d'Europe en titre.
Un scénario catastrophe verrait l'Europe n'envoyer que quatre équipes en huitièmes de finale (selon toute probabilité, les Pays-Bas, la France, l'Allemagne et la Belgique), ce qui serait du jamais vu –elles n'étaient déjà que cinq en 2010. Mais la Croatie et l'Italie ont leur destin entre leurs pieds et, avec d'autres équipes en ballottage plus ou moins (dé)favorable avant la dernière journée, l'Europe pourrait aussi envoyer en huitièmes la Grèce, la Suisse, le Portugal et la Russie, soit dix équipes au total.
Du côté des équipes africaines, tout ou presque reste encore à jouer. Si le Cameroun est éliminé, la Côte d'Ivoire, le Nigéria, l'Algérie et le Ghana sont encore en course mais devront obtenir un résultat au dernier match, seule la dernière nommée n'ayant pas son destin entre les pieds. Record en vue, puisque, de 1986 à 2010, l'Afrique n'a systématiquement envoyé qu'un représentant en huitièmes.
Entre la puissance américaine, l'Europe entre deux eaux et les espoirs africains, la grande disparue pourrait au final être la zone Asie-Océanie, avec l'Australie déjà éliminée et l'Iran, la Corée du Sud et le Japon qui ne peuvent pas compter sur leur seule performance.
4.L'Espagne, pire champion sortant?Elle ferait pire que la France en 2002 si elle perd contre l'Australie
En perdant ses deux premiers matchs, l'Espagne version 2014 est déjà rentrée dans l'histoire comme le quatrième champion du monde à se faire éliminer dès le premier tour après le Brésil en 1966, la France en 2002 et l'Italie en 2010, et le premier éliminé après seulement deux matches.
Elle peut encore battre un autre triste record: celui du pire champion sortant de l'histoire, détenu jusqu'à maintenant par la France. En 2002, les hommes de Roger Lemerre s'étaient fait éliminer avec deux défaites contre le Sénégal et le Danemark et un match nul contre l'Uruguay, le tout sans marquer le moindre but. L'Espagne peut faire pire si elle perd son match face à l'Australie, une équipe elle aussi déjà éliminée mais qui a montré qu'elle n'était pas un adversaire facile.
5.L'excellente moyenne de buts se maintiendra-t-elle?2,94 buts par match pour le moment
Depuis 1994, la moyenne de buts en Coupe du monde n'avait cessé de baisser, faisant craindre un nouveau tournoi peu prolifique au Brésil. C'était sans compter sur la grande forme des attaquants vedettes du tournoi comme Karim Benzema, Thomas Müller, Robin van Persie ou Arjen Robben (et la petite forme de certaines défenses), et plus généralement la mentalité offensive affichée par de nombreuses équipes.
Résultat, à mi-parcours en termes de matchs, la moyenne est aujourd'hui de 2,94 buts soit pour le moment la meilleure depuis 1970. Se maintiendra-t-elle à ce niveau jusqu'à la fin? Difficile de le savoir. Après avoir été pendant plusieurs jours supérieure à 3, elle s'est rapprochée progressivement d'une moyenne plus habituelle.
On peut déjà en revanche être quasiment certain que la moyenne finale sera quoiqu'il arrive plus élevée que celles des dernières éditions (2,3 en 2006 et 2,27 en 2010).
6.À quoi va ressembler le tableau final?Finales rêvées, finales impossibles
Avec la finalisation des classements des groupes va aussi se dessiner le tableau de la compétition, puisque la Coupe du monde n'utilise pas de tirage au sort mais un tableau prédéfini.
Au vu des classements et des dynamiques au soir de la deuxième journée, on pourrait s'acheminer à première vue vers une moitié «haute» du tableau très dense: s'y battraient pour une place en finale le pays organisateur, deux outsiders sud-américains qui ont impressionné, le Chili et la Colombie, ainsi que l'Allemagne, l'Italie et la France, huit Coupes du monde à elles trois. L'autre moitié, à première vue nettement moins relevée, accueillerait notamment les Pays-Bas, l'Argentine ou encore la Belgique.
Au soir du 26 juin, les amateurs de football sauront ainsi si certaines finales s'avéreraient impossibles (France-Brésil, Brésil-Allemagne, France-Allemagne, etc) et pourraient commencer à rêver d'un Brésil-Pays-Bas ou d'un France-Argentine le 13 juillet...