Une enquête du consortium international de journalistes d’investigation (ICIJ) explique en détail comment les Seychelles sont devenues le paradis de l’argent sale: créer tout le système fiscal avec un criminel rompu à la fraude fiscale, garantir l’immunité aux criminels qui investissent dans l’archipel, et ne tolérer pour seule opposition que des personnes impliquées dans l’industrie offshore.
Malgré les efforts des puissances occidentales pour mettre fin aux paradis fiscaux, les Seychelles demeurent un point central de l'industrie offshore plus que jamais attractif pour les mafias russes européennes. C’est en résistant aux pressions de l’OCDE que les Seychelles sont devenues un «nouveau paradis», selon Euan Grant, un ancien fonctionnaire britannique. Au même titre que Singapour, les Emirats arabes unis ou l’île Maurice.
Avant d’être un paradis fiscal, les Seychelles ont d’abord connu une période coloniale. Elles appartenaient à la France. Mais à la suite des guerres napoléoniennes, elles passent aux Anglais. Ce n’est en 1976 que l’archipel obtient son indépendance. En 1977, le Premier ministre socialiste France-Albert René prend le pouvoir par la force. Les hommes forts du nouveau pouvoir sont James Michel, actuel président et à l’époque ministre des Finances, et un Italien, Giovanni Mario Ricci, personnage central de l'industrie offshore.
C’est avec ce dernier que France-Albert René crée le premier paradis fiscal socialiste de la terre en 1978 après avoir monté une co-entreprise entre le gouvernement et Giovanni Mario Ricci. Cette entreprise avait le pouvoir exclusif d’accepter des sociétés offshores au sein de l’île. Trois ans après, l’Italien prend le contrôle intégral de la société.
D’après l’enquête de l’ICIJ , le père de cette industrie, Giovanni Mario Ricci, aurait été reconnu coupable de fraude en Italie. Selon un ambassadeur, il serait même un ancien de la mafia italienne. Et il n’hésite pas à jouer des tours pour brouiller les informations: il a ainsi créé une société intitulée International Monetary Funding afin de se faire passer pour l’International Monetary Fund, le vrai FMI.
Plus grave encore, l’île a même mis en place une loi qui aurait favorisé l’afflux de criminels en garantissant l’immunité contre toute poursuite judiciaire ou extradition en échange de 10 millions de dollars investis dans l’économie locale. Des politiques américains ont comparé cette loi à une banderole où il est écrit «criminels soyez les bienvenus».
Et si vous pensiez que l’opposition serait prompte à mettre fin au trou noir de la finance mondiale, détrompez-vous. Paul Chow, prétendant au poste de président en 2016, dirige lui-même une entreprise dont l’activité principale est de créer des sociétés offshores. Même s’il s'inquiète de la corruption croissante sur l'île, il est un farouche défenseur de l'industrie offshore et hostile à toute réglementation. Selon lui, les Seychelles ont eu raison de résister à l’OCDE dont il ne faut pas avoir peur: «Elle n’a aucun pouvoir, c’est juste un think tank.»