Les grandes compétitions sportives internationales ont été créées dans le but de favoriser la paix dans le monde et de rapprocher les peuples. Mais l'idée selon laquelle le sport, et la Coupe du monde de foot en particulier, réduit les risques de conflits entre les nations se vérifie-t-elle dans les faits?
Andrew Bertoli, un doctorant en sciences politiques de l'université de Californie à Berkeley spécialisé dans l'étude du nationalisme et de la guerre, a voulu vérifier l'hypothèse avec la Coupe du monde.
Pour cela, il s'est intéressé à toutes les campagnes de qualification au Mondial depuis 1958. Il a ensuite sélectionné 142 pays qu'il a divisés en deux groupes: ceux qui se sont qualifiés de justesse pour la phase finale et ceux qui ont échoué de justesse.
Bertoli a ensuite quantifié le niveau d'agression de chaque pays en utilisant l'indicateur standard du nombre de conflits armés inter-états («Militarized interstate conflict» en anglais) que chaque pays a initiés.
Ces conflits comprennent les cas où un pays a menacé explicitement, fait la démonstration ou utilisé la force contre un autre pays. L'universitaire écrit dans un article publié sur le site du Washington Post:
«Les résultats montrent qu'aller à la Coupe du monde augmente substantiellement le niveau d'agression. Les pays qui se qualifient de justesse connaissent un pic important d'agression pendant l'année de la Coupe du monde. La différence dans les niveaux d'agression entre les deux groupes est statistiquement significatif et a très peu de chances d'être dû au hasard.»

Andrew Bertoli, The World Cup and interstate conflict: evidence from a natural experiment
Pour les férus de science politique quantitative, le détail des calculs est par ici. Soulignons que Bertoli a trouvé le même phénomène pour les Championnats d'Europe et la Coupe d'Afrique des nations.
Bien sûr, il existe des contre-exemples, des cas où le football a rapproché les peuples. La qualification de la Côte d'Ivoire pour la Coupe du monde 2010 a entraîné une trêve dans la guerre civile du pays, avec Didier Drogba comme figure unificatrice.
Mais les cas qui confirment la règle comme la fameuse «guerre du football» entre le Salvador et le Honduras en 1969 ou la crise diplomatique née des matchs de qualification entre l'Algérie et l'Egypte en 2009 sont plus nombreux.
Samedi 7 juin, l'équipe de foot d'Argentine a déployé une banderole «Les Malouines sont argentines», juste avant le match préparatoire qui l'opposait à la Slovénie.