Habitez-vous dans le département le plus sportif de France? Pour le savoir, il fallait jusqu’à maintenant se fier aux affirmations du Comité départemental Entraînement physique dans le monde moderne sport des Ardennes ou du Secrétaire général du Comité départemental olympique et sportif des Hautes-Alpes, qui avaient tous les deux autoproclamé ces départements champions de la pratique sportive en France.
Grâce aux données publiées par le ministère des Sports sur les licenciés des fédérations sportives françaises en 2011, que nous avons mises en forme sur la carte ci-dessous, vous pouvez désormais savoir où se situe réellement votre département par rapport à ses voisins et au reste de la France en termes de pratique sportive licenciée de ses habitants.
La carte ci-dessus montre en effet le nombre de licences sportives de toutes les fédérations (hors fédérations multisports comme l’Union nationale du sport scolaire) pour 1.000 habitants dans chaque département de France en 2011, année pour laquelle le ministère a rendu ses chiffres publics.
Tous les sportifs ne sont pas licenciés
Elle n’a qu’une valeur indicative et ne doit pas être lue comme la carte des départements les plus sportifs, pour la simple raison que beaucoup de gens en France font du sport sans être licenciés, qu’il s’agisse de ceux qui vont courir tous les week-ends au parc, qui font des matchs de football à cinq entre amis dans des centres spécialisés ou du vélo sur la route sans faire de compétitions.
«On estime à seulement un tiers le nombre de pratiquants sportifs ayant une licence dans une fédération en France, explique ainsi Loïc Ravenel, collaborateur scientifique au Centre international d’étude du sport (CIES) de Neuchâtel et co-auteur de Géographie des sports en France. Il s’agit donc d’une carte du sport institutionnel.»
La distinction est d’autant plus importante que tous les sports ne sont pas égaux dans leur proportion de pratiquants licenciés: on estime que 85% des Français qui pratiquent du judo sont licenciés, contre 50% des footballeurs, 5% des cyclistes et à peine 1% des randonneurs. Autre problème: additionner les licenciés de chaque sport ne prend pas en compte les nombreux sportifs qui sont licenciés dans plusieurs fédérations.
Malgré ces problèmes, compter le nombre de licenciés reste l’un des seuls moyens pour tenter d’évaluer le niveau de la pratique sportive, et carte donne quelques informations intéressantes, explique Loïc Ravenel:
«On retrouve une France coupée en deux, avec une partie septentrionale où la pratique sportive est inférieure, sauf dans l’ouest de la région parisienne et l’Alsace. Le sud-ouest et la zone alpine ont toujours été des endroits de forte pratique sportive.»
Cinq ensembles géographiques se démarquent effectivement clairement comme les zones où il y a le plus de licenciés sportifs de France: le Sud-Ouest, les Pays de la Loire, l’Alsace, les Alpes et le sud-ouest de la région parisienne (Yvelines et Essonne). On retrouve de l’autre côté de l’échelle du sport le nord du pays, avec un petit désert sportif allant du Nord-Pas-de-Calais à l’Aube.
Les données brutes ci-dessous, où nous avons sélectionné les 10 départements comptant le plus de licenciés et les 10 départements le plus à la traîne, confirment ces impressions:
- 1. Savoie – 184 licenciés pour 1.000 habitants
- 2. Landes – 175 licenciés pour 1.000 habitants
- 3. Mayenne – 165 licenciés pour 1.000 habitants
- 4. Pyrénées-Atlantiques – 164 licenciés pour 1.000 habitants
- 5. Haute-Savoie – 162 licenciés pour 1.000 habitants
- 6. Yvelines – 158 licenciés pour 1.000 habitants
- 7. Hautes-Alpes – 157 licenciés pour 1.000 habitants
- 8. Bas-Rhin – 155 licenciés pour 1.000 habitants
- 9. Hautes-Pyrénées – 153 licenciés pour 1.000 habitants
- 10. Gers – 153 licenciés pour 1.000 habitants
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- 88. Marne – 107 licenciés pour 1.000 habitants
- 89. Pas-de-Calais – 107 licenciés pour 1.000 habitants
- 90. Aisne – 105 licenciés pour 1.000 habitants
- 91. Orne – 104 licenciés pour 1.000 habitants
- 92. Meuse – 103 licenciés pour 1.000 habitants
- 93. Aube – 103 licenciés pour 1.000 habitants
- 94. Creuse – 101 licenciés pour 1.000 habitants
- 95. Saint-Pierre-et-Miquelon – 91 licenciés pour 1.000 habitants
- 96. Paris – 77 licenciés pour 1.000 habitants
- 97. Seine-Saint-Denis – 73 licenciés pour 1.000 habitants
Les trois départements alpins présents dans le top 10 peuvent compter sur l’apport important des skieurs, qui représentent dans certaines communes la moitié de la population. Les départements du Sud-Ouest abritent quant à eux un joyeux mélange de rugbymen, de basketteurs, de footballeurs, de joueurs de pelote basque et autres surfeurs, tandis que les Yvelines sont un repère de tennismen, de golfeurs et, comme toute la France, bien sûr de footballeurs.
De l’autre côté du classement, on retrouve des départements aux profils très divers, avec des zones urbaines très denses comme Paris et la Seine-Saint-Denis et des départements très peu peuplés comme la Creuse.
Pour la Seine-Saint-Denis, le classement vient confirmer le constat dressé l’année dernière par l’Institut régional de développement du sport (IRDS). Après un travail de trois ans, l’organisme avait conclu que «malgré la présence de grands champions, de clubs de haut niveau et d’équipements sportifs remarquables», les habitants du département étaient «moins nombreux à pratiquer que les autres Franciliens».
Avec des semaines de travail plus longues et des déplacements quotidiens plus importants qu’en province, la contrainte de temps est particulièrement présente pour les Franciliens. A cela s’ajoute la pauvreté du département, qui fait que 30% des sportifs y pratiquent de manière autonome sans licence et sans club, et le sous-équipement.
La Seine-Saint-Denis compte 62 types d’infrastructures différentes, contre 86 dans les Yvelines, le département francilien le plus riche, qui pointe à l’autre bout de notre classement.
Carte: Mathieur Garnier (@Matamix)
Texte: Grégoire Fleurot