La jungle du Vietnam, les montagnes de Tora Bora en Afghanistan, le désert koweitien de la première guerre du Golfe… A chaque guerre est associé un type de terrain, qui détermine non seulement la manière dont sont menées les opérations par les différents protagonistes, mais aussi l’imaginaire collectif qui se créé autour de chaque conflit.
Quel terrain restera associé à l’opération française Serval en cours au Mali? Comme l’ont souligné plusieurs médias, le public français reçoit peu d’images de la guerre elle-même. Surtout, le territoire du Mali est divisé en plusieurs zones géographiques où le climat et la végétation sont bien distincts: le sud vert, le Sahel et le désert Sahara.
Avec un mélange de photos de presse, car il en existe quand même quelques unes, et d’images satellites récupérées grâce à Google Earth et Google Maps, il est pourtant possible de se faire une idée de ce à quoi les différentes phases de la guerre ressemblent.
Le Mali vert
Le sud du Mali, où vit 90% de la population, est appelé le Mali vert, et l’image satellite ci-dessous montre que cette zone porte bien son nom.
Image satellite du Mali, The Map Library via Wikimedia Commons.
Quand les islamistes, présents au nord du pays, ont pénétré dans cette zone, poumon économique du pays, qui abrite la capitale Bamako, la France a décidé d’intervenir afin d’éviter que le pays entier ne tombe entre leurs mains. La photo de une ou celle ci-dessous d’un hélicoptère de l’armée française à Markala, au nord-est de Bamako, où la France a installé un état-major, montrent bien la savane arborée présente dans cette partie du pays.
A Markala le 22 janvier 2013, Joe Penney/REUTERS
Mais peu de combats ont eu lieu dans cette zone. En quelques jours, les soldats français ont pris les villes stratégiques de Diabali, Konna ou encore Sévaré justement pour mettre hors de danger le sud du pays.
Le Sahel
Ce nom, où l'insécurité s'est installée au cours des dernières années, désigne la zone qui marque la transition entre la savane au sud et le désert du Sahara au nord, décrite comme «de vastes étendues sableuses parsemées de reliefs gréseux peu vigoureux, mais découpés et troués par l’érosion» par Patrice Gourdin, professeur de relations internationales et de géopolitique auprès des élèves-officiers de l’Ecole de l’Air.
Afficher Tombouctou, Gao, Kidal sur une carte plus grande
Les villes de Tombouctou, Gao ou encore Kidal, qui se trouvent toutes dans cette zone, ont également été reprises par l'armée français assez rapidement, et c’est dans cette zone que s'est pour le moment arrêtée la contre-attaque française. Voilà par exemple à quoi ressemble le paysage près de Bourem, bastion des djihadistes situé à 80 kilomètres de Gao que les militaires français, maliens et nigériens ont repris sans résistance le 16 février:
Près de la ville de Bourem, au nord de Gao, Yves Herman/REUTERS
Comme l’ont souligné tous les spécialistes, les espaces dans cette région sont ouverts et vastes, ce qui facilite le repérage par l’armée française de combattants islamistes. Eric Denecé, directeur du Centre français de recherche sur le renseignement (CF2R), écrivait ainsi récemment dans une tribune sur Slate.fr:
«Une grande partie des opérations ont –et vont avoir lieu– dans des zones vides de population, ce qui signifie que les djihadistes seront plus facilement identifiables et que nous avons moins à craindre d’effets collatéraux aux conséquences désastreuses.»
Mais la situation dans les villes est bien différente et la guerre semble être entrée dans une nouvelle phase, celle de la guérilla urbaine. Voilà à quoi ressemblent les combats qu’ont livrés les soldats maliens aux insurgés dans les rues de Gao dimanche 10 février, où des attentats suicides et des attaques répétées de djihadistes ont eu lieu ces derniers jours.
Des soldats Maliens lors d'affrontements avec des islamistes à Gao le 10 février 2013, REUTERS
Et voici les rues de Gao vues du ciel sur Google Earth:
Le Sahara et l'Adrar des Ifoghas
La partie nord du pays, dont l’aridité est visible par la couleur jaune sur l’image satellite de début d’article, est traversée par le Sahara. Patrice Gourdin donne la description suivante de ce désert mythique:
«Contrairement à un lieu commun répandu, les dunes n’occupent que 20% du territoire du Sahara. La majeure partie de ce désert se compose de plateaux profondément entaillés et percés de multiples grottes».
C’est dans cette partie du Mali, et plus particulièrement autour de l’Adrar des Ifoghas, un massif montagneux du nord-est du pays, que se situe le sanctuaire des islamistes, et où certains d’entre eux se seraient repliés depuis l’arrivée des troupes françaises. Les fameuses grottes de cette région ont entraîné de nombreuses comparaisons avec l’Afghanistan, notamment de la part de la secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton. Elles font également craindre à certains un risque d’enlisement du conflit.
Peu d'images de cette zone sont disponibles. Celles par satellites disponibles grâce à Google ne permettent pas vraiment de comprendre le relief ni, bien sûr, de voir les grottes en question.
Sur cette photo donne néanmoins une idée du type de paysage dans lequel une partie des 1.500 à 2.500 islamistes du pays se serait retranchée.
Une guelta dans près d'Oubankort, dans l'Adrar des Ifoghas/Taguelmoust, Creative Commons licence Attribution-Share Alike 3.0 Unported
Grégoire Fleurot