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République tchèque, Italie, Allemagne: trois élections qui feront l'Europe de 2013

Temps de lecture : 4 min

L'Union européenne peut a priori tabler sur l'élection du social-démocrate Milos Zeman en République tchèque et sur la reconduction d'Angela Merkel en Allemagne. Le scrutin s'annonce plus incertain en Italie.

Angela Merkel et Mario Monti, le 29 août 2012 à Berlin. REUTERS/Bundesregierung/Steffen Kugler/Pool.
Angela Merkel et Mario Monti, le 29 août 2012 à Berlin. REUTERS/Bundesregierung/Steffen Kugler/Pool.

L’Union européenne vit au rythme des élections dans ses Etats membres. Trois, d’inégale importance, attireront notamment l'attention en 2013: en République tchèque, en Italie et en Allemagne.

Les Tchèques ouvriront la série, le 13 janvier, avec une élection présidentielle. C’est la première fois que le chef de l’Etat sera élu au suffrage universel direct. Le dramaturge Vaclav Havel, qui a présidé à la séparation des Tchèques et des Slovaques en 1993, et son successeur, Vaclav Klaus, avaient été désignés par le Parlement.

Neuf candidats sont en lice, dont le prince Karl von Schwarzenberg, vieil aristocrate, ami de Vaclav Havel, adversaire du régime communiste, actuel ministre des Affaires étrangères et militant européen de la première heure. Mais celui qui a le plus de chances est Milos Zeman, un social-démocrate qui a été chef du gouvernement de 1998 à 2002.

Il se présente lui-même comme un populiste mais, dans un pays où la politique et les affaires entretiennent des relations coupables, il a une réputation de simplicité et d’honnêteté. Il est un partisan de l’intégration européenne, «à condition, ajoute-t-il, que Bruxelles s’abstienne de pondre des directives sur la taille des toilettes». Avec lui au château, les Européens n’entendront plus un président tchèque comparer la Commission européenne au bureau politique de Moscou quand l’Union soviétique régnait encore sur les «pays frères», comme aimait à le faire Vaclav Klaus.

Un destin politique pour le professeur Monti?

En Italie aussi, l’Europe sera en question lors des élections législatives de fin février. Mais la situation est plus confuse.

Pour tenter de la comprendre, il faut revenir un an en arrière. Le pays était au bord de la banqueroute, entraîné par Silvio Berlusconi dans une chute à la fois personnelle et politique.

Le salut est venu de Mario Monti. Cet économiste, ancien commissaire européen, centriste, catholique, est devenu président du Conseil avec le soutien de la quasi-totalité des partis politiques pour un bail provisoire, jusqu’au scrutin alors prévu pour avril 2013.

Son rôle était d’épargner à l’Italie le sort de la Grèce, soit d’entamer le minimum de réformes nécessaires pour faire baisser les taux d’intérêt que le pays doit acquitter pour financer sa dette. La gauche en a profité pour se remettre en ordre de bataille en organisant des primaires remportées par le chef du Parti démocrate, Pier Luigi Bersani, dans l’espoir d’un succès aux élections générales.

C’était sans compter sans Silvio Berlusconi. Cerné par la justice, le Cavaliere a annoncé son retour en politique et retiré le soutien de son parti à Mario Monti. Celui-ci a démissionné, provoquant des élections anticipées dès le mois de février.

L’Italie va-t-elle retourner à ses jeux traditionnels? Pas sûr. Car le professeur Monti, auquel personne ne prêtait d’ambitions politiques, s’est découvert un destin. Il se verrait bien revenir au Palazzo Chigi (la présidence du Conseil) après les élections.

Il n’a même pas besoin d’être candidat: il suffit qu’un ou plusieurs partis se mettent d’accord pour faire appel à lui. Les petites formations centristes héritières de la démocratie chrétienne, en mal de notoriété, sont prêts à le soutenir. Il lui resterait alors à obtenir au moins la neutralité bienveillante de la droite et de la gauche, qui est loin de lui être acquise.

Les partenaires européens de l’Italie parient sur Mario Monti. Sa rigueur le fait passer pour «le plus allemand des Italiens», ses attaches milanaises pour un représentant de l’Europe du sud. Mais les électeurs de la péninsule ne votent pas nécessairement selon les vœux d’Angela Merkel ou François Hollande.

Quelle coalition pour Angela Merkel?

La chancelière allemande affronte elle aussi des élections en septembre 2013. Si les sondages d’aujourd’hui reflètent les votes de demain, elle n’a rien à craindre. Sa popularité est au zénith, avec un taux de satisfaction de 80%.

Les Allemands portent à son crédit la bonne santé de l’économie et sa manière de gérer la crise européenne en donnant l’impression que sa priorité est de protéger le contribuable contre les excès laxistes des pays du Sud. Son parti, la démocratie chrétienne (CDU-CSU), en profite. Avec 41% des intentions de vote, il est au plus haut depuis 2009.

Pas assez cependant pour gouverner seule: Angela Merkel devra former une coalition. Mais elle aura l’embarras du choix.

Les libéraux, qui sont actuellement ses alliés, ne franchiront peut-être pas la barre des 5% de voix nécessaires pour entrer au Parlement. Si c’est le cas, Angela Merkel aura encore deux options. Soit une grande coalition avec les sociaux-démocrates (SPD), comme de 2005 à 2009, soit une formule inédite d’alliance avec les Verts.

Ceux-ci se sont embourgeoisés depuis les années 1980, quand leur chef de file, Joschka Fischer, prêtait serment comme ministre du Land de Hesse en baskets et blouson. La décision d’Angela Merkel d’abandonner l’énergie nucléaire à la suite de la catastrophe de Fukushima a levé l’obstacle principal à une coopération entre les écologistes et la CDU-CSU.

Pendant la campagne, la chancelière dira qu’elle souhaite continuer avec les libéraux tandis que le SPD et les Verts affirmeront vouloir gouverner ensemble. Ni d’un côté ni de l’autre, les sondages ne confortent cette hypothèse.

A droite, les libéraux s’enfoncent dans la crise. A gauche, le SPD est crédité d’un tiers des intentions de vote et son candidat à la chancellerie, Peer Steinbrück, ancien ministre des Finances de la grande coalition, a raté son entrée en scène. Avec les Verts qui tournent autour de 13% à 14% des intentions de vote, c’est trop peu pour former une majorité, d'autant que les deux partis ont rejeté toute possibilité d’alliance avec la gauche radicale Die Linke.

Angela Merkel a donc tous les atouts en main et pourra d’autant plus facilement imposer ses vues qu’elle aura le choix de ses alliés. Autrement dit, François Hollande ne devrait pas trop compter sur une arrivée au pouvoir à Berlin de ses «camarades» pour espérer un infléchissement de la politique européenne de l’Allemagne.

Daniel Vernet

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