C’est peut-être malheureux, même si ça se discute, mais il n’y a pas de sens de l’histoire –juste l’idée répandue que l’histoire devrait avoir un sens et qu’il serait préférable de voir les événements s’enchaîner naturellement pour nous faire avancer dans la «bonne direction».
Tenez, il y a encore quelques années, les perspectives conjointes de la fin du pétrole et de la menace climatique étaient les preuves absolues de ce que l’humanité énergivore serait forcée de passer à autre chose et que Gaïa ne s’en porterait que mieux.
Mais l’irruption des hydrocarbures «non-conventionnels» –des immenses réserves de sables bitumineux canadiens aux gigantesques ressources en pétrole de schiste américaines, pour ne rien dire des découvertes de nouveaux gisements «classiques» et de l’amélioration des techniques d’extraction– redonnent de la vigueur aux contempteurs du «peak oil», cette théorie du passage d’un point de rupture dans les approvisionnements. «On nous promet le “Peak oil” depuis 150 ans, il ne s’est jamais produit!», ricanait d’ailleurs dès 2009 Christoph Rühl, chef économiste chez BP...
L'absence de sens de l'histoire est manifestement en train de lui donner raison, à l’heure où les commentateurs plaisantent d’une possible intégration à l’Opep des Etats-Unis, à deux doigts de devenir les premiers producteurs au monde d’or noir. Une bonne nouvelle pour les chimistes et les automobilistes, assurément, mais la question du bouleversement climatique n’ayant pas encore été revisitée par l’histoire, il est encore difficile de dire s’il s’agit aussi d’une bonne nouvelle pour Gaïa.
Bah, d’ici à ce qu’on démontre que le réchauffement par l’homme aussi, c’était de la blague, il n’y a qu’un pas. Un pas que d’aucuns franchissent allègrement, OK, mais est-ce que ça a du sens, cette histoire?
Hugues Serraf