Le 5 novembre, tout ce que la twittosphère parisienne compte de féministes puritaines et de gauche converse, pour employer l’excellente expression du non moins parisien Technikart, a découvert horrifiée l’équivalent pour Internet de l’Enfer du Vatican.
Pour celles et ceux qui ne sont pas sur twitter ou journalistes ont raté l’info, cela s’appelle le «Dictionnaire des écoliers», publié sur le site du Centre national de documentation pédagogique (CNDP). Il a été rédigé, sous supervision des insituteurs, «par des enfants des écoles maternelles et élémentaires au cours de l'année scolaire 2010 – 2011», nous apprend Le Plus.
Lancé par la «Direction générale de l'enseignement scolaire, dans le cadre du plan national de prévention de l'illettrisme» poursuit FTVi, le dictionnaire a été élaboré en 2010. Il contient 17.000 définitions. Or dans ces définitions «s'esquissent les contours de la domination masculine qui cercle l'univers mental des enfants», s’indigne un contributeur du Plus. L'affaire semble grave. On ne sait plus qui est responsable: les enfants, observateurs mais conservateurs, les «maîtres» qui n'ont pas rectifié les attaques sexistes de nos chères têtes blondes venues d'un autre siècle, l'Education nationale qui a laissé publier un tel brûlot.
Les enfants, ces sales réacs sexistes
Pour montrer l’étendue des dégâts, prenons l’exemple de la femme, cet individu qui «porte des bijoux, une robe» selon le dictionnaire des écoliers. Révoltant. Pourquoi les femmes devraient-elles porter des bijoux? Et pas les hommes? Il n'est venu à aucun pourfendeur du dico des écoliers l'idée que c'était peut-ête l'observation de leur quotidien qui a poussé les enfants à écrire ces définitions. Mais il y a pire...
L’homme y est présenté comme quelqu’un «qui a de la barbe». Une insulte à peine masquée en direction des jeunes prépubères et de tous les imberbes qui se battent jour après jour contre le stéréotype dominant et exclusif d’un homme avec des poils (sauf dans certains boys bands des années 1990 et les pubs de Jean-Paul Gautier, mais ça nous emmenerait trop loin). Dans Le Monde, d’ailleurs, on s'est révolté: «Désormais, nous autres adultes, saurons qu'un homme imberbe n'est pas un homme».
Un Tumblr référence même les définitions jugées les plus effrayantes. Mais rassurons-nous: Internet a été plus fort que le sexisme décomplexé des chargés de mission de l'Education nationale. Le dictionnaire n’est déjà plus disponible en ligne! Il faut dire que la ministre des Droits de femmes, Najat Vallaud-Belkacem, ancienne Madame questions de société au PS, a annoncé il y a peu sa volonté de lutter contre les clichés et les stéréotypes sexistes à l’école, et ce dès la maternelle, dans le cadre du futur programme dit «ABCD de l’égalité». La ministre s'étant offert les services dans son cabinet de Caroline de Haas, militante néoféministe pro-clito, on peut être certain que les choses vont aller vite et bien.
Le ministère de l'Education Nationalerépare le sexisme du précédent. Le changement, c'est maintenant ! #dictionnairedesécoliers
— Caroline De Haas (@carolinedehaas) Novembre 5, 2012
Réécriture du dictionnaire des écolier-e-s en mode gender-friendly
Une bonne nouvelle n'arrivant jamais seule, nous avons imaginé l'email envoyé par la conseillère aux chargé-e-s de mission concernés:
Objet: réécriture du dictionnaire des écolier-e-s certifié conforme
Mme,
Suite à l'inacceptable contenu rétrograde du Dictionnaire des Ecoliers, publié sur votre site et sur les définitions duquel mes services m'ont alertée, je vous prie de bien vouloir réécrire les définitions suivantes dans votre prochaine version, qui sera je l'espère plus conforme à ce que la ministre attend d'une politique éducative anti-sexiste luttant efficacement contre les stéréotypes de genre dans la petite enfance, et ce d'autant plus fermement que l'Education nationale s'est associée au ministère des droits des femmes pour mettre en place un vaste programme transversal de sensibilisation à ces problématiques.
Caroline de Haas
Conseillère en charge des politiques féministes
Ministère des droits des femmes
Suivez-moi sur twitter: @carolinedehaas
Pièce Jointe
Définition scandaleuse proposée par des enfants de primaire et courageusement dénoncée par les journalistes
«Femme
Définition
C'est une maman, une mamie ou une jeune fille.
Elle peut porter des bijoux, des jupes et des robes. Elle a de la poitrine.
Phrases d'exemple
Cette femme va souvent acheter son pain dans la boulangerie de ce village.
Miss France est la plus belle femme de France.»
Bonne définition conforme aux principes de non-discrimination de genre et de lutte contre les stéréotypes de la phallocratie dominante
«Femme
Individu genré abusivement associé au sexe féminin. Fiction sexiste et essentialiste issue d’un biologisme binaire le plus sectaire dans le but d’assigner à ces individus les rôles subalternes de la société et de renforcer les structures de domination du patriarcat hétérosexiste.
L’individu genré ci-défini par le poids du sexisme ne porte ni bijou, ni jupe ni robe. Il-Elle n’a pas de poitrine.
Phrases d'exemple
Cette individu genré achète son pain dans la boulangerie du village en alternance avec l’autre individu genré marié ou concubin selon un calendrier antisexiste du comité d’égal accès à la boulangerie.
Miss France est une potiche rétrograde au service de la domination patriarcale et de la propagande marchande néolibérale.»
Définition scandaleuse proposée par des enfants de primaire et courageusement dénoncée par les journalistes
«Homme
C'est un humain qui a de la barbe.»
Bonne définition conforme aux principes de non-discrimination de genre et de lutte contre les stéréotypes hétérosexistes dominants
«Homme
Individu genré abusivement associé au sexe masculin, dont la pilosité —quand elle existe, car les individus imberbes sont aussi nos amis—est encouragée par la société patriarcale dans la ferme intention de dominer l’individu genré qui n’a pas de poitrine, afin de l’asservir durant une dizaine de siècles à venir en l’envoyant de force à la boulangerie du village.»
Définition scandaleuse proposée par des enfants de primaire et courageusement dénoncée par les journalistes
«Père
C'est le mari de la maman, sans lui la maman ne pourrait pas avoir d'enfants. C'est le chef de famille parce qu'il protège ses enfants et sa femme. On dit aussi papa»
Bonne définition conforme aux principes de non-discrimination de genre et de lutte contre les stéréotypes hétérosexistes dominants
«Parent
C’est le conjoint de l'individu avec qui il partage le projet parental. Ca présence est facultative dans l'accès à la parentalité, sinon sous forme de gamètes mâles congelées.
Au sein de l'unité familiale les décisions sont prises selon un processus de discussion paritaire entre les parties prenantes du projet parental. Les tâches de l'unité familiale sont réparties à égalité selon un calendrier (etc.)
Exemple:
Gérer son argent en bon parent à la pilosité faible ou inexistante.»
Définition scandaleuse proposée par des enfants de primaire et courageusement dénoncée par les journalistes
«Mariage
C'est l'union de deux personnes qui s'aiment et qui veulent fonder une famille. Il existe le mariage civil et le mariage religieux.»
Bonne définition conforme aux principes de non-discrimination de genre et de lutte contre les stéréotypes hétérosexistes dominants
«Mariage pour tous
C’est l’union de deux personnes qui partagent un projet de parentalité aux modalités d'accès multiples»
Définition scandaleuse proposée par des enfants de primaire et courageusement dénoncée par les journalistes
«Obèse
C'est une personne malade, qui est tellement grosse qu'elle peut à peine marcher.
Mon papa est obèse, il mange trop gras et ne fait pas de sport
J'ai croisé un obèse dans les couloirs de l'hôpital, il venait se faire aider»
Bonne définition conforme aux principes de non-discrimination de genre et de lutte contre les stéréotypes hétérosexistes dominants
«Personne à embonpoint excédentaire
C'est une personne dont l'IMC est supérieur à 40.»