Il y a quelque chose de surprenant dans la permanence du succès de James Bond. Les décennies s’écoulent ― déjà cinq, comme le temps passe ― et cette barbouze chic en smoking du meilleur faiseur continue de faire rêver les foules avec la même intensité. Jeunes et vieux, ringards et branchés, électeurs du Front de gauche, partisans du FN et à peu près tout ce qui se range au milieu, ils iront tous faire la queue à l’UGC pour soutenir le bellâtre dans sa lutte contre le vilain du jour…
Mais comment un assassin professionnel macho au service d’une monarchie impérialiste décadente et aussi bardé de logos commerciaux qu’un coureur du Tour de France se débrouille-t-il pour être une idole aussi consensuelle? Personne ne le sait. Les disputes entre fans, lorsqu’elles explosent, tournent plutôt autour du choix de son incarnation préférée de l’agent 007.
― Sean Connery, c’est le meilleur!
― N’importe quoi, c’est Pierce Brosnan!
― Ce poids plume ? Pourquoi pas George Lazenby?
― George qui?
OSS 117 traverse aussi les époques mais c’est parce qu’il s’est mis à faire rigoler et, lorsqu’il sort une photo de son lider maximo de son portefeuille, c’est celle d’un obscur président de la IVe République et personne n’est censé laisser couler une larme patriotique sur sa joue de cinéphile. Bah, il y a des mystères qu’il est vain d’expliquer et les voies de James Bond sont probablement trop impénétrables pour qu’il soit même utile d’essayer. D’ailleurs, dans ce numéro de Slate.fr, on ne l’explique, on le décrypte. On en fait l’exégèse et la critique raisonnée. Mais dans la bonne humeur tout de même parce qu’après tout, notre espion national à nous, il ressemble plus à Jean Dujardin qu’à Daniel Craig.
Hugues Serraf
(La discussion se poursuit sur vos tablettes!)