Trailer est-il?, c'est LA chronique quotidienne pour amateurs de bandes-annonces diverses et (a)variées: séries B plus ou moins prometteuses, raretés improbables, porno rigolo, docus décalés, etc.
Tandis que se généralisent les sorties mondiales simultanées de blockbusters pour concentrer les profits sur une courte période et déjouer le piratage, on pensait naïvement que les plus modestes productions éviteraient aussi l'enfer des sorties décalées en optant pour la VOD.
Certes, un film gagne à être découvert en salle, mais si aucun distributeur n'entend faire son métier et donner sa chance à un film, pourquoi se priver d'une sortie légale qui pourrait trouver son public malgré tout?
Si l'on ressort ce couplet fredonné ad nauseam depuis des années, c'est que le trailer du jour nous fournit un exemple tout trouvé: le film en question, L'Envahisseur, est un film belge signé Nicolas Provost sorti en Belgique le 23 novembre 2011 et toujours inédit dans l'Hexagone.
Aucune sortie française ne semble à l'ordre du jour pour cette histoire d'un immigré clandestin échoué sur une plage d'Europe qui part tenter sa chance à Bruxelles. On parle pourtant d'une production d'un pays frontalier en langue française que certains festivaliers ont déjà eu la chance d'apercevoir début 2012 au festival Premiers Plans d'Angers –et avant ça, en 2011, à la Mostra de Venise, au festival de Toronto, etc.
Le film s'est même attiré des critiques enthousiastes, du Hollywood Reporter en passant par Twitchfilm. Il est aujourd'hui disponible en DVD –autrement dit potentiellement téléchargeable illégalement par un internaute impatient qui n'aurait pas 15 euros à dépenser pour un long métrage sans star ni paillette.
Ce problème de non distribution est archi fréquent et ne touche pas que le cinéma indépendant, puisque même certains films américains ouvertement «populaires» (comédie, horreur) n'arrivent pas à traverser l'Atlantique.
Pourquoi alors se focaliser sur cet Envahisseur stylé dont j'ignorais encore l'existence il y a encore 24 heures avant de tomber par hasard sur sa bande-annonce? Peut-être parce que son trailer est justement l'un des plus beau plan séquence vu depuis un bail, et qu'à l'ère des bandes-annonces surcutées montées par des margoulins épileptiques, dévoiler un univers chiadé en prenant son temps fait du bien.
Bien entendu, le fait que la scène se déroule sur une plage naturiste avec son lot de boobs à l'air et de phallus flasques ensablés n'y est sans doute pas pour rien non plus.
Alexandre Hervaud