Mardi 20 mars, lors d’un match victorieux contre la Floride, Brittney Griner, joueuse de l’équipe de Baylor, est devenue la deuxième femme à faire un dunk pendant un tournoi de la NCAA [le championnat de basket universitaire américain). Les dunks sont courants dans les matchs masculins. Pourquoi sont-ils si rares dans le basket féminin?
C’est une histoire de détente. La joueuse de WNBA [la ligue de basket féminine américaine] moyenne, qui plafonne à 1m83, mesure environ 18cm de moins que son collègue masculin (les données pour toutes les joueuses universitaires ne sont pas disponibles). Mais la taille n’est qu’une partie du problème—de nombreux joueurs ne dépassant pas 1m83 savent dunker. La différence entre les sexes en termes de détente verticale est également conséquente.
La joueuse de basket universitaire moyenne saute approximativement à 48cm, comparé à plus de 71cm pour les hommes. Comme il faut que les doigts soient à 15cm au-dessus de l'anneau du panier pour espérer dunker, une joueuse à la détente moyenne doit mesurer autour de 2m et atteindre 2m47 debout les bras en l’air—soit à peu près les mensurations de Michael Jordan (Air Jordan aurait eu une détente verticale de 1m22). Peu de joueuses sont aussi grandes que ça, et aucune de ces géantes n’est une sauteuse exceptionnelle.
Interdiction du coach
Pourtant, la rareté des smashs pendant les matchs féminins donne une impression un peu faussée de leur capacité à dunker. Les smashs sont en réalité plus courants à l’entraînement, mais de nombreux entraîneurs les déconseillent quand il y a des enjeux à cause du risque de blessure ou de passer à côté d’un panier facile. Feu l’entraîneur d’Oklahoma State Kurt Budke, par exemple, avait interdit à l’ailier Toni Young de dunker après qu’elle s’était fait une triple fracture du bras en smashant à l’entraînement en 2011.
Le fossé entre les sexes en termes de détente verticale est large à tous les niveaux de compétition. Selon une étude de 2004 portant sur des étudiants en médecine et leurs conjoints, un homme moyen entre 20 et 30 ans peut sauter plus haut que 95% des femmes de son groupe d’âge. Et les hommes semblent bénéficier d’un avantage particulier en saut par rapport aux autres disciplines athlétiques.
Selon une étude de records mondiaux en athlétisme datant de 2004, les hommes ont un avantage de 15 à 16% (PDF) en saut en hauteur, saut en longueur et triple saut. Le fossé des genres se réduit pour la course à seulement 10 à 13% (le saut à la perche affiche la plus grande différence avec 23%, mais c’est sans doute parce que les femmes ne participent à cette épreuve au niveau olympique que depuis 2000). La différence entre hommes et femmes est relativement stable depuis 1983.
Moins de fibre musculaire rapide
Si les chercheurs explorent encore les raisons pour lesquelles les hommes peuvent en moyenne sauter tellement plus haut que les femmes, il est clair que tout commence à la puberté. Les garçons subissent une accélération de la croissance de leur masse musculaire lors du déferlement hormonal, et leur détente verticale en est augmentée d’autant. Les filles, en revanche, perdent de leur capacité à s'envoler pendant la puberté.
En outre, certaines études suggèrent que les hommes ont davantage de fibre musculaire à contraction rapide que de fibre musculaire à contraction lente, ce qui fournit un avantage non négligeable pour le saut, bien que ces résultats soient contestés. La physiologie masculine semble également plus efficace pour recruter tous les muscles nécessaires pour qu’ils travaillent ensemble afin d’accomplir une tâche. Cela signifie qu’à structure musculaire égale, un homme peut généralement sauter plus haut qu’une femme.
Pourtant, tout espoir n’est pas perdu pour les fillettes qui rêvent d’atteindre le haut du panier. De tous temps, pédiatres et entraîneurs ont mis en garde contre un entraînement athlétique trop intensif chez les jeunes enfants. Ils craignaient que l’haltérophilie ne tasse les cartilages de croissance ou ne provoque des déchirements musculaires. Mais les chercheurs pensent de plus en plus que ces inquiétudes sont exagérées et que les filles peuvent réduire de façon significative le fossé qui s’ouvre à la puberté entre elles et les garçons en termes de détente verticale par un entraînement en résistance modéré avant et pendant la période des changements hormonaux.
Brian Palmer
Traduit par Bérengère Viennot
L’Explication remercie David Patterson d’ATSU-Kirksville College of Osteopathic Medicine et Carmen Quatman de l’Ohio State University. Merci également à notre lecteur Josh Hummert d’avoir posé la question.