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Tourisme: une nuit dans les arbres

Temps de lecture : 5 min

Dormir dans les arbres est devenu à la mode. Ou comment séjourner dans des cabanes que l’on n’a pas construites.

Photo du site des cabanes des Combrailles
Photo du site des cabanes des Combrailles

Le glamping, vous connaissez? Ce néologisme est la contraction de deux mots a priori contradictoires -glamour et camping- et est devenu tendance ces dernières années dans le monde de l’hôtellerie de plein air. Avec plus de 11.000 terrains, parmi lesquels 8.600 aires aménagées et classées, le camping français offre une capacité d’accueil de près de trois millions de lits et s’est adapté à une clientèle plus exigeante, plus glamour donc, à la recherche de sensations nouvelles au cœur même de la nature, mais dans un certain confort ou au moins logée dans un endroit original.

De là est donc né le concept du glamping qui vous propose, entre autres, de dormir dans des yourtes, des roulottes, sous des tipis ou réfugiés dans diverses cabanes aménagées au milieu de la forêt. Dans ces offres, un produit d’appel fait fureur: l’hébergement dans les arbres. Au récent Mondial du tourisme, dans l’espace «insolite» du parc des expositions de la porte de Versailles, tous les professionnels présents, ou presque, proposaient et valorisaient ce type de couchage entre ciel et terre dont le succès est croissant.

Pour rêver, par exemple, d’une nuit en week-end dans un arbre du domaine de Canon, à Mézidon-Canon dans le Calvados, il est plus prudent de s’y prendre plusieurs mois à l’avance car les quatre cabanes perchées sont très prisées des amateurs de tourisme vert. Le domaine dispose notamment de la cabane la plus élevée de France. Appelée le nid d’aigle, elle est située à 22m du sol et nichée dans un platane d’Orient vieux de 250 ans. Tout cela pour 190 euros la nuit pour deux personnes avec verres d’accueil et petits déjeuners «livrés» dans l’arbre par le biais d’une corde (pains au chocolat, croissants, jus de pomme maison...).

500 cabanes en France

En Auvergne, près de Clermont-Ferrand, Les Cabanes des Combrailles, un village écolo, propose, lui, des fustes (des chalets rustiques en tronc d’arbre brut isolés avec de la laine de mouton) dont certaines sont aussi lovées au milieu des branches. Comme à Mézidon-Canon, pas d’électricité. Le confort se compose de toilettes sèches, poêle à bois et lampes à huile. L'eau est chauffée par un chauffe-eau solaire. 350 à 600 euros pour deux à six personnes selon la saison.

Au Parc animalier de Sainte-Croix, à Rhodes, en Moselle, frissons garantis avec 1.500 animaux en semi-liberté sur 120 hectares parmi lesquels des loups que l’on peut «côtoyer» l’espace d’une nuit en se réfugiant dans les bras de Morphée et dans des cabanes à 8m du sol.

Aux Cabânes du Varon, dans le Var, l’un des sites de cabanes en l’air les plus fréquentés de France, vous pouvez descendre de vos chênes et aller caresser des ânes nains, petites créatures prêtes à vous témoigner de leur affection.

Les exemples abondent. Il y aurait ainsi quelque 500 cabanes dans les arbres répertoriées en France selon Arnaud de la Chesnais, pionnier de ce type de tourisme vert en France et à la tête d’un site, La cabane en l’air, qui liste un répertoire de cabanes suspendues à travers la France. «En 2006, elles étaient une dizaine», précise Denise Cabelli, auteur du guide «1001 nuits dans les arbres».

Pour deux ou familiales

Arnaud de la Chesnais a inauguré sa première cabane touristique en 2003 au domaine familial des Ormes, en Ille-et-Vilaine, et il en recense désormais 200 sur tout le territoire par le biais du réseau La cabane en l’air.

«J’ai eu l’idée de construire cette cabane pour la nuit de noces de ma sœur, raconte-t-il. A partir de là, des amis m’ont demandé de pouvoir l’habiter à leur tour le temps d’une Saint-Valentin ou d’un anniversaire. Aux Ormes, un très vaste domaine touristique qui accueillait jusque-là beaucoup de vacanciers dans des hébergements classiques, nous avons fini par peupler nos arbres de cabanes et depuis, le succès ne s’est jamais démenti.» Des cabanes de tailles variables, des plus petites pour deux personnes aux «familiales» pouvant accueillir jusqu’à neuf individus pour une nuit.

Cette passion et cette réussite se sont donc diffusées à travers toute la France, si bien qu’il est devenu difficile de trouver des cabanes libres quand celles-ci sont proches des centres urbains. Le concept est d’autant plus plébiscité qu’il n’y a jamais eu jusque-là, et heureusement, le moindre accident majeur à déplorer.

«Au début des premières cabanes aux Ormes, j’ai brûlé quelques cierges autour du domaine, sourit Arnaud de la Chesnais. Mais si l’on excepte une jeune femme arrivée de nuit et prise de vertige et de panique le matin après avoir pris conscience de l’endroit où elle se trouvait, il n’y a eu que de petits incidents. Parfois, il arrive que ce cadeau ne convienne pas à cause de l’appréhension liée à la hauteur. La semaine dernière, deux personnes ont ainsi vite décampé sans nous prévenir.» En cas d’orage ou de vent fort, tout le monde est également invité à rejoindre le plancher des vaches.

Une grosse frayeur

Propriétaire du domaine de Canon, dans le Calvados, Hervé de Mézerac, producteur de cidre normand qui s’est lancé dans cette nouvelle forme de tourisme rural en 2008, a eu, lui, très peur il y a peu. Alors qu’il est en principe interdit de loger dans une cabine suspendue après six mois de grossesse, une jeune femme a «oublié» de l’informer de son état. Hélas pour elle, elle a perdu ses eaux perchée à 12m lors d’un accouchement prématuré. «Il a fallu appeler les pompiers pour venir la tirer de là, s’amuse Hervé de Mézerac avec le recul. Et elle a fini transportée à l’hôpital de Rouen en hélicoptère.»

Ces cabanes, que l’on rejoint notamment par des systèmes de passerelles, obéissent à des normes de sécurité relativement strictes, même si celles-ci évoluent en fonction des départements. Le coût moyen de construction tourne autour de 30.000 euros, mais peut atteindre 50.000 euros pour des «familiales». La surface la plus habituelle se situe aux environs de 20-25 mètres carrés. L’assemblage d’une cabane prend généralement trois semaines et avec trois ouvriers. C’est toujours une construction particulière qui dépend de l’arbre d’accueil, absolument respecté d’un point de vue écologique.

La rusticité reste la signature des cabanes en l’air (pas d’électricité, eau très limitée…), mais Arnaud de la Chesnais anticipe une légère montée en gamme à l’instar des cabanes du château de Merville, près de Toulouse, qui propose des prestations de plus en plus raffinées. «Attention, il y a parfois certains excès au niveau des prix, prévient Denise Cabelli. L’objet de ces cabanes reste d’être spartiates. Le confort est limité, c’est ce que les gens recherchent, mais ils ne doivent pas être abusés.» Au-delà des hébergements à destination des touristes, le marché des cabines pour particuliers est, lui, en plein boom. Une façon d’accueillir ses amis avec originalité.

Nostalgie de l'enfance

Selon une enquête de l’institut TNS Sofres pour Look Voyages publiée lors du dernier Mondial du tourisme, la priorité des vacanciers est d'«être étonnés» (pour 61% d'entre eux) et de «construire des liens» (60%) avec une prime donnée à l’authenticité. «Les cabanes répondent parfaitement à ce double objectif, souligne Hervé de Mézerac. Les gens ne restent généralement qu’une nuit, mais ils reviennent parce qu’ils ont été séduits. Il n’y a qu’à lire les livres d’or pour s’en apercevoir.»

Arnaud de la Chesnais confirme:

«Quand j’ai démarré, j’avais en tête de faire retrouver aux gens les émotions de leur enfance. Petit, tout le monde a fait des cabanes et les couples apprécient de vivre ce moment hors du temps, dans une bulle. C’est une nostalgie par rapport à un temps souvent heureux. Je suis fréquemment surpris des messages intimes laissés: comme si les personnes avaient été replongées dans leurs racines au cœur des branches.»

Les deux récents coups de cœur de Denise Cabelli sont «Les nids des Vosges» et «Cap cabane» dans la forêt des Landes. «Très bon rapport qualité-prix, souligne-t-elle. Et vraiment perdus au milieu de la nature. Idéal pour jouer les Robinsons.»

Yannick Cochennec

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