France

Ce que l'on sait du programme de Nicolas Sarkozy

Temps de lecture : 8 min

Après deux mois de discours, déplacements et interviews où il a égrené les idées au compte-gouttes, le président-candidat publie son programme jeudi. Le point sur les mesures déjà connues en douze thèmes.

Nicolas Sarkozy dans l'émission «Parole de candidat» le 12 mars 2012. REUTERS/Philippe Wojazer.
Nicolas Sarkozy dans l'émission «Parole de candidat» le 12 mars 2012. REUTERS/Philippe Wojazer.

Promis, juré, il sera «global et cohérent»: à moins de trois semaines du premier tour, Nicolas Sarkozy doit dévoiler son projet complet, jeudi 5 avril à 15 heures, lors d'une conférence de presse à Paris. L'ensemble devrait se présenter, selon Le Parisien, sous la forme d'une lettre de seize pages aux Français, accompagnée d'un fascicule résumant les propositions et leur chiffrage.

De nouvelles idées pourraient être lancées, mais l'exercice sera aussi l'occasion de rassembler l'ensemble des propositions effectuées depuis deux mois par le président-candidat au gré des émissions de télé ou de radio, des interviews dans la presse écrite, des déplacements sur le terrain, des meetings... Tour d'horizon de ce qu'on sait de son programme en douze thèmes.

fiscalité

Un effort supplémentaire de 8 milliards

Dans un entretien à trois quotidiens lorrains le 2 avril, le président-candidat a annoncé qu’un effort supplémentaire de 8 milliards d’euros de recettes serait demandé aux Français sur le prochain quinquennat.

Selon la ministre du Budget Valérie Pécresse, 4,5 milliards proviendraient d'un nouveau rabotage des niches fiscales, et les 3,5 milliards restants de deux nouveaux impôts: un impôt minimum sur le chiffre d’affaires des grandes entreprises du CAC 40 qui, souvent très internationalisés, ne paient parfois pas d'impôt sur les sociétés dans l'Hexagone, et un impôt sur les exilés fiscaux, qui paieraient la différence entre l’impôt sur le capital payé à l’étranger et celui qu’ils paieraient en France.

Par ailleurs, les «géants du Net» comme Google pourraient également être imposés, soit via une taxe sur la publicité en ligne, soit via une renégociation des conventions fiscales permettant de les assujettir à l’impôt sur les sociétés.

A noter enfin que la TVA sociale (hausse de 1,6 point du taux normal de TVA à compter du 1er octobre contre baisse des cotisations), insérée dans la dernière loi de finances rectificative, constitue une sorte de promesse de campagne puisque François Hollande a promis son abrogation en cas de victoire.

emploi

Le ballon d'essai du référendum

C’était un des premiers ballons d'essai lancés dans la campagne, avant même la déclaration de candidature: le 11 février, dans le Figaro Magazine, Nicolas Sarkozy annonçait qu’il souhaitait consulter par référendum les Français sur l’idée de lier indemnisation des chômeurs et obligation de formation à des métiers en tension puis d'acceptation d'une offre d'emploi. Il a depuis légèrement tempéré cette idée, évoquant une simple consultation sur «le droit à la formation» des demandeurs d'emploi.

Il souhaite également faire évaluer tous les dix-huit mois les efforts d’insertion (recherche d’emploi, formation) des bénéficiaires du RSA et généraliser les contrats de travail d’intérêt collectif de sept heures par semaine payés au smic qui leur sont imposés, à titre expérimental, dans douze départements de droite. Une mesure dont il évalue le coût à 500 millions d’euros par an.

En parallèle, il a annoncé la suppression de la prime pour l’emploi créée par le gouvernement Jospin en 2001, qui bénéficie actuellement à 6 millions de personnes: les fonds qui lui sont consacrés, ainsi que ceux issus de l'alignement de la fiscalité des dividendes sur celle du travail, alimenteraient des allègements de charges salariales sur les bas salaires (1.200 à 1.450 euros net par mois).

entreprises

De nouveaux allègements ciblés

Nicolas Sarkozy propose plusieurs allègements de charges patronales. En seraient dispensés à 100% les artisans tant qu’ils ne réalisent pas de chiffre d’affaires (comme les auto-entrepreneurs actuellement) et les employeurs qui embaucheraient des chômeurs de plus de 55 ans en CDI ou CDD de plus de six mois. Une mesure qui était inscrite dans la réforme des retraites de 2010 et dont les décrets d’application n’ont jamais été publiés. Prévue pour être provisoire, elle deviendrait permanente, pour un coût évalué par son équipe à 400 millions d’euros par an à terme.

Le projet du candidat UMP cible également les PME, promettant que Oséo avancera désormais le crédit d'impôt recherche avec des prêt à taux zéro et que sera supprimé le «privilège du Trésor public», qui fait que lorsque une PME a des dettes, le Trésor public passe avant les autres créanciers.

A l’issue d’un quinquennat marqué par les polémiques sur les rémunérations patronales (la dernière en date concernant Maurice Lévy, de Publicis), Nicolas Sarkozy propose par ailleurs que les rémunérations des plus hauts dirigeants soient désormais votées par les assemblées générales et plus par les conseils d’administration, et que soient interdits retraites chapeau et «parachutes dorés».

énergie

La contre-attaque sur le nucléaire

C’est l’un des principaux angles de contre-attaque de l’UMP face au PS: alors que François Hollande a annoncé la fermeture d’ici cinq ans d’un site nucléaire, celui de Fessenheim (Haut-Rhin), et que l’accord PS/EELV prévoit la fermeture progressive de 24 réacteurs d’ici 2025, Nicolas Sarkozy se fait un ardent promoteur de cette forme d’énergie.

En déplacement à la centrale de Saint-Laurent-des-Eaux (Loir-et-Cher) le 26 mars, il a ainsi appelé les salariés du secteur à se mobiliser pour le «consensus» nucléaire, «brisé dans des conditions scandaleuses [...] par un accord électoral entre des gens sectaires qui profitent de l'accident de Fukushima [...] pour jouer sur les peurs et pour casser le nucléaire français». «J'en fais le serment, nous défendrons l'industrie nucléaire française», lançait-il déjà à Villepinte le 11 mars.

santé

Prudence sur les sujets sensibles

Carte vitale biométrique pour lutter contre la fraude, expérimentation éventuelle sur un petit nombre de pathologies chroniques du financement à la pathologie, installation de maisons de médecins de ville devant les urgences pour les désengorger… Telles sont quelques-unes des propositions avancées sur le candidat sur ce thème, sur lequel il se montre par ailleurs prudent.

En témoignent deux grands sujets de société, la fin de vie et la dépendance. Sur le premier, «un sujet trop douloureux», que la loi «peut encadrer mais [...] ne peut pas trancher», il se déclare opposé à ce que le droit aille plus loin que la loi Leonetti de 2005. Sur le second, il envisage de «poser les bases» d’une réforme en 2013 si le déficit est repassé sous 3% du PIB.

famille

Le refus de la «mode du moment»

Peu de propositions en matière de famille et de moeurs, mais plutôt des refus. Le chef de l’Etat se dit contre le fait de «sacrifier à la mode du moment» concernant ces sujets: pas de mariage homosexuel (mais une cérémonie en mairie qui serait désormais de droit pour le Pacs), pas de statut du beau-parent («Je n’ai pas trouvé la solution»), pas de pilule gratuite et anonyme pour les mineures (mesure pourtant proposée par la députée UMP Bérengère Poletti)...

Au rayon propositions, le candidat de l’UMP suggère la création d’une agence de recouvrement des pensions alimentaires «pour soulager les mères» de familles monoparentales «qui n'arrivent pas à s'en sortir». Il a aussi ébauché l'idée d'un allongement du congé parental, qui pourrait désormais être pris non plus pendant les 3 premières années mais jusqu’aux 18 ans de l'enfant.

immigration

Un durcissement des conditions d'accueil

«Il y a trop d'étrangers sur notre territoire», a déclaré Nicolas Sarkozy, le 6 mars, lors de l'émission Des paroles et des actes, avant d’affirmer un objectif chiffré: diviser par deux le nombre d’étrangers accueillis chaque année, autour de 100.000 contre 180.000 actuellement. Il souhaite ainsi mettre des conditions au regroupement familial («Un travail, un logement décent, l'engagement à apprendre le français») et à l'attribution de minima sociaux aux étrangers (dix ans de présence et cinq ans d'activité pour le RSA et le minimum vieillesse).

éducation

Etre plus présent pour gagner plus

Contrairement à François Hollande, qui souhaite davantage de professeurs, le candidat de l’UMP ne compte pas renforcer leurs effectifs —même s’il veut mettre fin au non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux pour les instituteurs, mesure qu’il avait incluse dans son discours de Montpellier sur l'éducation fin février mais qu’il a curieusement oubliée d’annoncer ce soir-là.

Sa principale idée consiste à proposer aux professeurs du second degré de pouvoir travailler 26 heures par semaine, contre 18 heures actuellement, pour 500 euros supplémentaires par mois. Il souhaite aussi généraliser la liberté de recrutement et d’indemnisation des établissements, déjà testée dans les collèges défavorisés, et rendre plus «exigeant» le bac (moins d'options, moins d'épreuves facultatives, des notes éliminatoires, davantage de contrôle continu).

justice

Un durcissement généralisé des peines

En dehors des mesures antiterroristes annoncées après la mort de Mohamed Merah, Nicolas Sarkozy a notamment résumé ses propositions sur la justice lors d’un meeting à Bordeaux le 3 mars puis devant le controversé Institut pour la Justice, le 31 mars. Elles vont toutes dans le sens d’un renforcement des peines: possibilité de la réclusion à perpétuité pour les crimes sexuels répétés (contre vingt ans aujourd’hui), extension des peines-planchers à la réitération, renforcement de la rétention de sûreté (les cours d’assises auraient à motiver leur décision d’y recourir ou non), durcissement des conditions de la libération conditionnelle (un condamné devrait attendre les deux-tiers de sa peine —ce n’est actuellement le cas que pour les récidivistes— et non plus la moitié)…

Par ailleurs, le candidat veut étendre les jurys populaires, testés depuis janvier dans la région de Dijon et Toulouse pour la correctionnelle, à la mise en détention provisoire et l'application des peines, et autoriser un appel des victimes pour les procès d’assises, ainsi que, également, pour la détention provisoire et l'exécution des peines.

institutions

Oui à la proportionnelle, non au vote des étrangers

Comme d’autres candidats, Nicolas Sarkozy s’est prononcé en faveur d’une dose de proportionnelle (10% à 15% des sièges) et une baisse du même ordre de grandeur du nombre de députés. En revanche, contrairement à François Hollande, il est contre le droit de vote aux étrangers, dont il a affirmé, le 3 mars à Bordeaux, qu’il portait «atteinte à la République» et mettait «les maires sous la menace du chantage communautaire».

europe

Le double ultimatum

En janvier, Nicolas Sarkozy faisait campagne avec Angela Merkel sur l'intégration européenne; deux mois plus tard, le ton changeait. A Villepinte, le 11 mars, le candidat a lancé un double ultimatum à l'Union européenne.

Le premier porte sur les accords de Schengen: faute de «gouvernement politique» permettant de piloter les accords d'ici un an, la France y suspendrait sa participation. Le second sur la préférence européenne sur les marchés publics: faute de l'instauration d'un «Buy American Act» à l'européenne d'ici un an, réservant les fonds publics aux entreprises produisant en Europe, et d'un quota de marchés publics réservés aux PME européennes, la France déciderait unilatéralement de leur mise en place.

international

Le clivage afghan

La principale différence entre le programme de Nicolas Sarkozy et celui de François Hollande porte sur l’Afghanistan: alors que le président a décidé, en janvier, d’avancer à fin 2013 la fin du retrait des troupes françaises, son adversaire socialiste entend le boucler un an plus tôt. Ce qui a donné lieu à une violente attaque du président candidat le 22 mars à Strasbourg, quelques heures après la mort de Mohamed Merah:

«En Afghanistan, où tant de soldats français sont tombés pour défendre la liberté du monde contre le fanatisme et le terrorisme, abandonner nos alliés du jour au lendemain, ce serait les trahir, trahir la mémoire de nos soldats.»

Lors de l’émission Des paroles et des actes du 6 mars, le candidat a par ailleurs promis de se rendre en Israël et dans les territoires palestiniens quelques jours après sa victoire et de promouvoir une initiative européenne pour faire de 2012 «l'année de la paix» au Proche-orient.

Jean-Marie Pottier

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