Voici la dépêche AFP dimanche 18 mars, 18h18:
«Résistance, résistance!» criait la foule, «Vite, la VIe République!», «Battre la droite et changer la gauche», «Mélenchon, enfant des lumières, le peuple est avec toi», pouvait-on lire sur des pancartes dans le cortège, composé de jeunes mais surtout d'une majorité de plus de 45 ans, dont certains arboraient des bonnets phrygiens.
Acclamé à son arrivée sur la mini-scène toute blanche et rouge devant l'opéra, le candidat du Front de Gauche à l'Elysée, actuellement crédité de la meilleure dynamique de campagne (TNS-Sofres), a déploré, dans un court discours de près de 25 minutes, une «France défigurée par les inégalités». «Génie de la Bastille qui culmine sur cette place, nous voici de retour, le peuple des révolutions et des rébellions en France. Nous sommes le drapeau rouge!», a-t-il lancé, de sa voix grave de tribun, sous un ciel maussade… »
Désolé de décevoir tant de belles joies et tant d’enthousiastes élans républicains: Jean-Luc Mélenchon est un rigolo. Un rigolo de prétoire, un rigolo de JT, un rigolo malin, un rigolo drôle. Mais un candidat dont le programme est un tissu de conneries. On peut admettre le but: faire rendre gorge à la finance, renverser le nouvel Ancien Régime, celui des marchés financiers, OK, c’est populaire, c’est tendance.
Ça correspond même partiellement à une véritable nécessité. Mais le candidat de la Bastille propose-t-il une seule mesure véritablement applicable? Une mesurette qui changerait un tant soit peu la vie pauvrette des millions de citoyens asservis? Que dalle.
Jean-Luc Mélenchon, c’est Hugo Chavez, le président du Venezuela, sans le pétrole. La seule référence correcte qui me vient à l’esprit c’est Alphonse Allais: Jean-Luc Mélenchon nous promet l’eau chaude pour tous mais sans les récipients. Jean-Luc Mélenchon veut par exemple et tout simplement abolir la précarité. C’est Alphonse allais qui annonçait l’extinction du paupérisme à partir de 5 heures du soir.
Les Français adorent commémorer la Révolution de 1789. Abattons la Bastille, renversons l’ancien Régime ! Cette fois-ci les tyrans sont les marchés financiers : coupons leur la tête ! Les citoyens d’abord ! L’humain toujours d’abord ! Jean Luc Mélenchon, l’homme du discours incantatoire rencontre un succès facile.
Mais lisez, dans le détail, son programme. C’est bien simple: on est chez les comiques. En dehors de toutes réalités, dans la déclamation. Rien n’est sérieux. Sauf le rêve. Le smic à 1.700 euros, la retraite à 60 ans à taux plein, des bourses pour tous les jeunes, le remboursement de la santé à 100%, le blocage des loyers et 800.000 embauches dans la fonction publique. Le rêve!
On finance comment? Fieffé réactionnaire qui pose la question! On prendra aux banques, et si elles ne veulent pas on les mettra sous contrôle social, les Soviets en 2012.
Jean-Luc Mélenchon veut créer des millions d’emplois, il en détruirait des millions. Si son programme était appliqué, les couches populaires en souffriraient les premières bien plus que les banquiers qui auraient le temps de déguerpir.
Alors je sais bien, il ne s’agit pas d’un programme de gouvernement. Il s’agit de se faire plaisir et de raconter des sornettes révolutionnaires. Mais, pour le coup, je trouve que Mélenchon ne va pas assez loin: c’est un révolutionnaire en peau de lapin. Qu’il lise jusqu’au bout Alphonse Allais, il verra «qu’il faut demander plus à l’impôt et moins au contribuable».
Et, encore plus fort, il faut «ne plus travailler le lendemain des jours de repos pour, enfin, vaincre définitivement la fatigue du peuple.»
Sacré Alphonse ! Sacré Jean-Luc!
Eric Le Boucher
Mes réponses à vos commentaires
Je récuse totalement cette idée de mépris. Je la trouve fort de café. D’abord parce que citer Alphonse Allais est essayer, pardon, de faire rire gentiment. Mélenchon me fait rire de son côté archéo, roublard, grosses ficelles, ne se refusant aucune facilité. Il me place sur le terrain de la rigolade, j’y reste.
Mais surtout, et si on veut en venir au fond, parce que qui méprise qui à la fin? Qui prétend représenter les masses et les conduire vers une amélioration de leur sort? Je ne suis que journaliste, qui lit, qui écoute, et qui juge que le programme de JLM est en effet un tissus d’âneries. Je persiste et signe.
Il n’a rien d’applicable qui aille dans le sens du but affiché d’améliorer le sort des masses. C’est l’inverse qui est vrai! Jean-Luc Mélenchon est un homme qui croit (qui affiche de croire) qu’il est possible de vivre 30 ans en arrière et qu’il suffit que «la politique le décide». Et qu’il y a un trésor caché. Qu’il faut, au bout du compte, refermer les frontières et produire français.
Alors que la situation est réellement dramatique, une récession en Europe, 25 millions de chômeurs, une menace de déclin qui se durcit tous les jours, des technologies qui changent tout et non! Un homme politique nous dit qu’il suffit d’en revenir « à la politique », à des idées d’avant-avant-hier qui ne correspondent à rien de la complexe réalité, de l’ambiguïté des situations.
Nous sommes tous producteurs et consommateurs, c’est une contradiction. Nous devons pousser la demande donc les salaires mais, dans une économie ouverte, le coût pèse sur l’emploi. Supprimer les allègements de charge sur la bas salaires, serait, en l’espèce, criminel pour l’emploi. Nous devons maintenir les services publics mais ils leur faut s’améliorer grandement et faire des efforts de productivité.
La vie économique et sociale est comme la vie tout court, ni blanche ni noire, elle est grise. La vérité est dans les détails. Et le simplisme est du populisme. Les hommes et femmes politiques des autres pays admettent qu’il leur faut un peu d’humilité. En France, on a encore le culot, la folie, de croire qu’il sont des héros quand ils se paient de mots.
L’affaire du coût des mesures de Mélenchon est symbolique. Dans quel pays endetté est-il encore possible de promettre des mesures dispendieuses, comme ça, par pleine brassées, par wagons? Où? En France, en France seulement.
Parce qu’on y pardonne encore aux politiciens de raconter des âneries, de promettre n’importe quoi, de ne se refuser aucune facilité de préau, d’effet de manche admiré par «oh! qu’il en a du charisme!». Et puis on sait qu’arrivé au pouvoir, «on était Georges Marchais, on deviendra Robert Hue» (lequel Robert Hue, est très honorable, lui). Bref on fera tout autre chose que ce qu’on a dit. Sur la place de la Bastille, on ment au peuple. Et bien non! Le vrai mépris est de se taire. Les menteurs doivent être dénoncés comme des menteurs. A en perdre l’humour.
En France, à gauche, il est interdit de s'en prendre à l'extrême gauche. Vieille histoire de pureté révolutionnaire. Et bien non, le moment est trop grave pour qu'on n'apporte pas des réponses sérieuses, concrètes, applicables, aux maux des masses. Je ne ris plus.
ELB