Fin février, un couple d’Américains de Long Island s’est plaint d’avoir reçu des déchets provenant des toilettes d’un avion qui les a survolés. Le monsieur a d’abord cru que ce liquide noir tirant sur le vert était de l’huile, mais un agent de police présent au moment de l’incident était d’un autre avis: «Je crois qu’il y a eu un souci (…) des excréments venant des toilettes [de l’avion] s’étaient répandus». Les avions déversent-ils leurs déjections en vol?
Pas délibérément. Les avions de ligne peuvent être équipés de deux types de WC: un «système de gestion de déchets en circuit fermé», qui fonctionne à peu près comme les toilettes classiques de votre domicile, auquel cas les eaux usées chassées sont acheminées vers une cuve ou un réservoir se trouvant à bord de l’appareil; ou un système plus moderne d’aspiration des déchets; là, les eaux usées sont aspirées vers la cuve.
Dans les airs, c’est la différence entre la pression de l’air extérieur et de l’air interne à la cabine qui entraîne une grosse aspiration à chaque fois qu’un passager tire la chasse d’eau. (Le vrombissement que l’on entend peut laisser penser que nos excréments sont expulsés dans l’atmosphère, mais il n’en est rien.) Dans des circonstances normales, le personnel au sol vidange les eaux usées à l’atterrissage de l’avion. Quand bien même le pilote ou le personnel de bord voudrait vidanger la cuve des eaux usées pendant le vol, ce ne serait pas possible car la vanne est située à l’extérieur de l’appareil. Seul le personnel au sol peut l’ouvrir.
Les fuites redoutées de «glace bleue»
En cas de dysfonctionnement, des fuites sont toujours possibles. C’est le cas lorsque l’étanchéité de la cuve des eaux d’égout ou d’une canalisation d’évacuation n’est plus assurée. Cela provoque généralement ce que les experts aéronautiques appellent «blue ice» (la «glace bleue»): une substance qui se forme lorsque le liquide de traitement des déchets des WC d’un avion est soumis aux températures glaciales de l’altitude. En général, cette «glace bleue» s’agrège et reste sur l’extérieur de l’avion, mais il arrive qu’elle se brise avant l’atterrissage.
Lorsque cette substance devient moins compacte, bien souvent elle fond et s’évapore avant que l’appareil ne touche le sol. Mais pas toujours… Selon le témoignage d’un couple d’Anglais habitant Leicester, monsieur et madame étaient «en train d’apprécier un brin de beau temps» dans leur jardin, lorsque de la «glace bleue» a atterri sur le toit de leur maison et s’est brisée avant de finir sur leur tête. Le mari a raconté que la substance en question, à mesure qu’elle fondait, «dégageait de très désagréables relents d’urine». (Le liquide gras noir-vert projeté sur le couple de Long Island ne correspond pas aux descriptions courantes de la glace bleue.)
Dans les airs, on ne badine pas avec les «fuites» de déchets. On le sait, la «glace bleue» endommage les avions. Il est même arrivé qu’elle arrache un réacteur. L’autorité de réglementation de l’aviation civile des Etats-Unis (la FAA) indique que certaines projections bleues venant du ciel peuvent être de simples fèces d’oiseaux migrateurs qui ont mangé des fruits bleus.
Comment font les astronautes dans l'espace?
Depuis que les compagnies aériennes existent, le fait d’uriner en vol attise toutes les curiosités. Après avoir effectué son fameux vol transatlantique pour Paris, Charles Lindbergh a reçu tout un public ainsi que le roi George V. Selon certains récits de cette rencontre, le roi se serait penché près de l’aviateur pour lui demander: «Il y a une question qui me turlupine: comment avez-vous fait pour faire pipi?». Lindbergh expliqua qu’il y avait un entonnoir accroché à son siège en osier, qui envoyait son urine dans un réceptacle en aluminium. Quant au réceptacle, raconta-t-il: «Je l’ai jeté par-dessus bord lorsque je survolais la France.»
D’autres moyens de transport jettent délibérément des déchets lorsqu’ils sont en transit. Les bateaux de croisière, de véritables mini-villes flottant sur l’océan, déversent régulièrement en mer des milliers de litres d’eaux usées par jour.
Jusque dans les années 90, les eaux usées des trains américains finissaient sur les voies. On se contentait de demander aux voyageurs de ne pas utiliser les WC lorsque le train était en gare. Ce système est encore très répandu. Désormais, les trains américains disposent de réservoirs à bord pour le stockage des déchets. Dans la Station spatiale internationale, les déchets solides des astronautes sont mis en sac pratiquement sous vide et renvoyés sur Terre dans un vaisseau sans pilote, lequel se désintègre lorsqu’il rentre dans l’atmosphère.
Forrest Wickman
Traduit par Micha Cziffra