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Vous êtes un homme (ou une femme) politique de gauche (ou de droite) et vous cherchez à vous attirer la sympathie des jeunes dans la perspective d’une élection présidentielle? Prenez la défense du patron d’une station de radio en conflit avec ses actionnaires pour d’obscures raisons financières auxquelles vous n’entravez que pouic…
Les jeunes ne sont ni très malins ni très informés et, une fois persuadés que leur radio de rap et de R&B préférée est menacée d’une transformation en robinet à musette et que vous êtes le dernier rempart entre Yvette Horner et leur iPod, ils viendront vous manger dans la main.
Vous êtes un homme (ou une femme) politique de gauche (ou de droite) et vous aimeriez bien vous attirer les bonnes grâces des vieux à l’approche du scrutin suprême? Scandalisez-vous publiquement du durcissement de la législation à l’égard des chauffards en expliquant à quel point interdire les «avertisseurs de radars» est en réalité une mesure dangereuse pour la sécurité routière!
Les vieux ne sont ni très futés ni très au fait des questions d’accidentologie des transports mais, si vous parvenez à les convaincre qu’il est légitime de ne pas se prendre une prune pour un excès de vitesse, ils sauront s’en souvenir le jour venu.
Il est vrai que les questions de vitesse ou d’alcool au volant, en France, c’est un peu comme le harcèlement sexuel et le «troussage de domestique» : une question culturelle que l’on n’aime guère voir polluée par des considérations puritaines et anglo-saxonnes. Enfin, pour le coup, on ne peut pas suggérer qu’il «n’y a pas mort d’homme» parce que 3.995 tués en 2010, ça fait du monde, mais tout de même…
Démagogie pour démagogie
Jacques Chirac, qui restera dans l’histoire comme le président le plus ineffectif de toutes les Républiques depuis Platon, s’était pourtant bravement attaqué au problème en mettant le paquet sur la réduction d’une mortalité routière historiquement plus élevée chez nous qu’ailleurs (le record date de 1972, avec plus de 16.000 victimes).
Et la décision de son successeur de supprimer les panneaux avertissant de la présence des radars ―autant que l’interdiction des gadgets électroniques permettant de les repérer― est d’ailleurs tout aussi gonflée à quelques mois la remise de son titre en jeu. OK, elle est totalement inutile puisqu’une bête appli pour iPhone remplacera avantageusement le «Coyote» qui trônait jusqu’à présent au-dessus de la boîte à gants, mais elle reste gonflée tout de même…
Ce qui n’empêche pas, pour autant, une tripotée de députés UMP de clamer que «le tout répressif ne marche plus» et que c’est justement en n’agaçant pas les automobilistes qui roulent trop vite qu’on les aidera à prendre conscience du risque qu’ils représentent pour leurs semblables. Voire de mentir carrément en prétendant que le lien vitesse excessive-accidents n’est pas une réalité objective, même si cet argument commence à sentir sérieusement le réchauffé.
Jacques Myard, un parlementaire que l’on connaissait plutôt comme spécialiste des dangers de l’homosexualité («Le PACS? Et pour les zoophiles, on fait quoi?») et expert en peine de mort comme arme de dissuasion antiterroriste, demande d’ailleurs la création d’une commission d’enquête sur le sujet. Pour lui, les vraies causes de la recrudescence de la mortalité routière ces derniers mois sont plutôt à chercher du côté des «jeunes, de l’alcool et de la drogue». «Il faut cesser d’emmerder les Français!» avait-il d’ailleurs déjà tonné sur le même thème à l’Assemblée il y a quelques mois.
Voyons voir, un jeune alcoolisé et drogué, ça doit ressembler à un auditeur de Skyrock, ça… Hum, tout bien considéré, la démagogie jeuniste, elle fait moins peur que le populisme pour électeurs d’âge mur. Et elle roule moins vite.
Hugues Serraf