France

DSK-Aubry, le pacte qui pourrait changer la République

Temps de lecture : 2 min

L'accord entre les deux socialistes peut paraître anodin. Mais, si l'un d'entre eux venait à être élu Président(e), s'en serait fini de la «rencontre entre un homme et le peuple».

DSK et Martine Aubry en 2006. REUTERS/Jean-Pierre Rafto
DSK et Martine Aubry en 2006. REUTERS/Jean-Pierre Rafto

Un pacte entre deux personnalités politiques décideraient qui des deux concourrait à la primaire, et sans doute à la présidentielle et donc, peut-être serait président de la cinquième puissance de la planète… Le fameux pacte entre Dominique Strauss-Kahn et Martine Aubry est un acte inédit dans l’histoire des candidatures à l’Elysée.

C'est même un acte lourd de conséquences! On regarde cet étrange deal avec, soit de l’admiration, soit de l’incrédulité, soit beaucoup de curiosité.

Ce n’est pas qu’une question de tambouille politique. Jusqu’ici, et selon le mythe gaullien, l’élection du président de la République, néo-monarque temporaire, procédait, selon la formule consacrée, de «la rencontre entre un homme et le peuple».

Il fallait que le candidat, puis le Président, soit habité par cette idée d’«incarner la nation». L’élection présidentielle avait quelque chose du sacre de Reims.

Le chef d’un Etat puissant, relativement centralisé, et d’une république qui unit des populations diverses pour un destin commun ne peut être qu’un personnage particulier choisi davantage pour ce qu’il est que pour son programme, missionné, né pour porter la couronne.

C’est d’ailleurs également pour ne pas savoir «incarner» cette fonction olympienne que Nicolas Sarkozy connaît aujourd’hui un tel désamour.

Or, cette forme de présidence ne peut pas résulter d’un pacte!

On ne décide pas, entre soi, sur CV et sur sondages, qui est le mieux placé pour succéder à Saint-Louis ou de Gaulle... Sauf que là, c’est vrai, il s’agit de succéder à Nicolas Sarkozy –ça casse un peu le mythe.

Mais tous les présidents ont été élus (Nicolas Sarkozy compris) avec cette idée de prédestination. «Parce que c’était lui, parce que c’était la France» pourrait-on dire...

L’idée de destin, le lien charnel avec le terroir, l’ambition chevillée au corps, c’est plutôt Ségolène Royal ou dans une moindre mesure François Hollande qui la manifestent aujourd’hui au PS. Même Arnaud Montebourg en a joué dans la forme de son annonce de candidature.

On a le sentiment, à la façon dont chacun parle de son cheminement, que leur vie ne pourrait pas être accomplie sans avoir au moins tenté d’être celui ou celle qui rencontrera le peuple français.

Cette vision un brin romantique de la politique, ce sens du tragique de l’histoire, comme dirait Henri Guaino, ne peut pas résulter d’un pacte, d’une évaluation, d’un sous-pesage, de la comparaison entre avantages et inconvénients de l’un ou de l’autre suivant la conjoncture des mois de mai ou juin 2011.

Si DSK est élu président dans ces conditions, il ne pourra pas être le chef de l’Etat, à l’ancienne, néo-monarque. Il n’aura pas été choisi pour ce qu’il est, son histoire personnelle mais pour ses compétences, jugées les plus utiles au pays dans un moment précis.

Pour se rassurer, les partisans de Nicolas Sarkozy disent d’ailleurs que c’est pour ça que, malgré les sondages, Dominique Strauss-Kahn ne sera pas un bon candidat…

Finalement, le pacte, décision a priori anodine entre deux personnes, peut être un acte fondateur: soit en favorisant la «démonarchisation» de la fonction de président, entraînant, enfin la modernisation nécessaire et tant souhaitée de la gouvernance, soit en provoquant une perte d’autorité du chef de l’Etat s'il s’avère qu’après tout, la France a besoin d’un monarque, fusse-t-il républicain…

Mais on n’en est pas là. Encore faut-il encore que le pacte tienne! Et pour l’instant, ça a l’air de tenir.

Thomas Legrand

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