France

La France dit oui à la naissance d'enfants orphelins

Temps de lecture : 2 min

Le Comité national d’éthique a tranché: des embryons congelés pourront voir le jour en l’absence de ceux qui auraient été leurs pères.

REUTERS/Tim Wimborne
REUTERS/Tim Wimborne

La messe est dite. Mercredi 9 mars les «sages» du Comité consultatif national d’éthique (CCNE) ont de facto mis un terme à une problématique née –il y a une vingtaine d’années déjà– avec la pratique de la congélation des embryons humains pour des couples souffrant de stérilité mais souhaitant coûte que coûte procréer. A court ou moyen terme cette procréation devrait pouvoir être possible en l’absence de celui qui aurait dû être le père. Pourquoi? Comment?

On estime aujourd’hui en France à environ 200.000 le nombre des embryons conçus par fécondation in vitro conservés par congélation. Ces conceptions et ces congélations ont pour objectif d’augmenter les chances de procréation des couples (stériles ou hypofertiles) engagés dans des protocoles d’assistance médicale à la procréation.

Mais pour d’évidentes données statistiques, tous ces embryons humains congelés ne s’inscriront à court ou moyen terme dans un futur projet procréatif. Leur avenir? Soit leur destruction (par arrêt de la congélation). Soit leur don à des couples également soucieux de procréer. Soit –dans des conditions très restrictives– leur don «à la science».

Dans ce contexte général, une question agite depuis plusieurs années le petit milieu des intellectuels férus de bioéthique. Avec une question on ne peut plus concrète: quel peut être le devenir des embryons ainsi conçus et conservés dès lors que les hommes qui –via leur sperme– ont été à l’origine de leur création ne sont plus de ce monde? Peut-on délibérément organiser et programmer la naissance d’enfants orphelins de leur père? La réponse officielle vient de nous parvenir depuis le siège parisien du CCNE [PDF].

Une majorité des membres qui composent cette institution viennent ainsi de se prononcer en faveur de l'autorisation des transferts post mortem d'embryons conçus in vitro et ce dans le cadre d’une assistance médicale à la procréation.

Le CCNE ne donne certes pas un feu vert total et libertaire. Des conditions devraient selon lui être respectées: l'homme (mort) aura dû donner son consentement (de son vivant) au transfert (après son décès) d'un embryon (dé)congelé dans l'utérus de celle qui fut sa «conjointe»; des délais minimum et maximum devront être respectés pour le transfert; des dispositions législatives devront en outre être modifiées de manière à ce que les dispositions relatives à la filiation paternelle soit assurées.

La messe, donc, est dite. Pour autant elle est bornée: le feu vert du CCNE ne va pas jusqu’à autoriser la libre utilisation par la femme du sperme congelé de son mari/compagnon défunt. Une majorité des sages du CCNE estime en effet que cette utilisation doit demeurer interdite, du fait «du caractère plus difficilement vérifiable de la volonté de l'homme». Comprenne qui pourra.

Ajoutons que deux membres du CCNE se sont prononcés pour le maintien de l'interdiction du transfert d'embryon post-mortem, tandis que d’autres ont considéré que les demandes d'insémination post-mortem ne devraient pas être systématiquement rejetées.

En clair lorsque l'homme décède, c'est à la femme –et à elle seule– que reviendra la décision sur le devenir des embryons congelés à la demande du couple. La question inverse ne semble pas d’actualité. Jusqu’à quand?

La messe est donc bien dite puisque dans le cadre de l'examen du projet de loi de révision de la loi de bioéthique, les députés ont adopté (en première lecture, le 15 février et contre l'avis du gouvernement) la possibilité de procéder au transfert d'un embryon après le décès du «père»; du moins dans un cadre chronologiquement normé: six mois au minimum après le décès de l’homme et, au maximum dix-huit mois après. Pourquoi un tel carcan?

Jean-Yves Nau

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