France

Ravi Jacob

Temps de lecture : 3 min

Les propos de Christian Jacob considérant que Dominique Strauss-Kahn ne peut pas incarner la France sont-ils le fruit d'une stratégie ou l'expression d'une stupidité abyssale?

Les aventures de Rabbi Jacob Gérard Oury
Les aventures de Rabbi Jacob Gérard Oury

Christian Jacob a dit de Dominique Strauss-Kahn sur Radio J, il n'incarne «pas l'image de la France, l'image de la France rurale, l'image de la France des terroirs et des territoires, celle qu'on aime bien, celle à laquelle je suis attaché».

Serait-ce le fruit d’une stratégie? Ou alors Christian Jacob n’est vraiment pas malin et Jean-François Copé (dont les chroniques sont publiées sur Slate), son mentor, pas beaucoup plus. C’est ce dernier qui a fait élire Jacob à la tête du groupe UMP de l’Assemblée.

Jacob a dégainé le premier

Respectons ces deux élus de la nation et considérons plutôt que c’est une stratégie. C’est donc Christian Jacob, patron des députés de la majorité, qui aura dégainé le premier. Il aura été la première personnalité de droite à utiliser l’argument fétide, l’argument de l’enraciné, du terrien, les pieds dans la glaise de France, les sabots dans cette «terre qui ne ment pas», pour fustiger DSK, le financier hors-sol, le Français de raccroc. Quel cadeau à la gauche!

La phrase caricaturale de l’ancien leader paysan tombe à point nommé pour le patron du FMI, et quasi certainement candidat pour 2012, qui voyait sa popularité s’effriter à gauche. Une déclaration qui semble aussi écrite au cordeau pour détacher un peu plus les modérés et les centristes de Nicolas Sarkozy.

Déjà cette partie de l’électorat de la droite se pince le nez depuis l’été sécuritaire du président et l’épisode de la stigmatisation des Roms. Elle avait espéré que Nicolas Sarkozy retrouve un peu de hauteur de vue, avec la fameuse opération de «présidentialisation» annoncée par l’Elysée en septembre. Nicolas Sarkozy allait enfin entrer dans la fonction à la faveur de sa présidence du G20. Et puis, patatras, voilà le naturel de Nicolas Sarkozy qui revient au triple galop avec l’affaire Laetitia et la mise en cause des juges. Les modérés sont sur le point d’être définitivement perdus pour 2012. Il fallait enfoncer le clou…

Suivez bien le raisonnement: Jean-François Copé veut être élu en 2017, il n’en fait pas mystère, c’est d’ailleurs l’une de ses qualités. Il ne cache pas son ambition et nous fait partager, de façon assez transparente, son calendrier idéal, quand tant d’autres ambitieux ont des agendas cachés, des stratégies à double fond.

L'intérêt de Copé

Il est à la portée de n’importe quel candidat à la délégation d’une classe de CM2 de comprendre que, pour que Jean-François Copé ait une chance d’être élu en 2017, il faut que Nicolas Sarkozy perde en 2012. On imagine mal que la gauche, majoritaire dans toutes les élections locales, perde une cinquième présidentielle de suite dans 6 ans, après 15 ans de gouvernement de droite. Après avoir voulu relancer le désastreux débat sur l’identité nationale, après avoir voulu s’opposer à une disposition de contrôle du patrimoine des députés, après avoir proposé une augmentation de la TVA, voilà donc le clan Copé qui suggère que Dominique Strauss-Kahn n’est pas vraiment un Français comme on les aime. Faut-il vouloir perdre!

Il ne manque qu’à proposer le rétablissement du service militaire ou de la vignette automobile. Bien sûr cette analyse est du second degré. Amis internautes, n’allez pas croire que je sombre dans la théorie du complot, mais avouez que cette déclaration de Christian Jacob est confondante!

Maintenant imaginons le pire: Christian Jacob pense vraiment ce qu’il a dit. Après tout, il existe encore, en France, une partie de la droite et sans doute aussi de la gauche qui estime que le président de la République doit être un homme forcément élu du centre de la France, d’une circonscription rurale, aimant par dessus tout la tête de veau et ayant un nom bien de chez nous finissant par «ac». Mais ce raisonnement aussi est bancal parce que Christian Jacob roule pour son ami Jean-François Copé, élu francilien, de son vrai nom Copelovici, un Français de «sang mêlé», qui ne doit pas beaucoup plus connaître le cul des vaches que Nicolas Sarkozy ou DSK.

Donc, résumons, soit Christian Jacob est complètement idiot, soit il est parfaitement cynique. Personnellement, j’ai une petite idée, je le vois plutôt en Ravi Jacob… mais à vous de choisir!

Thomas Legrand

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