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Les fleurs artificielles sont-elles plus écologiques que les vraies?

Temps de lecture : 4 min

J'aime la planète, un peu, beaucoup, passionnément...

Une fleuriste prépare des roses pour la Saint-Valentin, à Tirana, en Albanie, le 14 février 2011. REUTERS/Arben Celi
Une fleuriste prépare des roses pour la Saint-Valentin, à Tirana, en Albanie, le 14 février 2011. REUTERS/Arben Celi

Pour la Saint-Valentin, j'aimerais acheter des fleurs à ma bien-aimée, mais il me semble que de nombreuses ressources soient gaspillées dans la culture et l'expédition d'un bouquet qui ne va durer que quelques jours. Vous avez déjà parlé des bouquets éco-certifiés, mais ne serait-il pas mieux de tout simplement acheter des fleurs en soie?

Cette question n'est pas des plus faciles. Nous ne disposons pas de données précises, ni sur les vraies fleurs, ni sur celles en soie, mais vu qu'un tout petit peu plus d'information est disponible sur les naturelles, commençons donc par là.

Les fleurs importées dominent le marché américain depuis 40 ans, quand des industriels et des scientifiques ont trouvé des moyens de faire survivre les fleurs à des vols intercontinentaux. En 1971, à peine 8% des roses, des œillets et des chrysanthèmes vendus aux États-Unis étaient importés (ces trois espèces comptent pour la majorité des importations de fleurs coupées). En 2003, ce chiffre a grimpé à 91%, et la plupart de ces fleurs provient de Colombie et d'Équateur.

Des fleurs importées pleines de pesticides

Ce passage des fleurs locales aux importées constitue un mélange de bons et de mauvais points pour l'environnement. Le mauvais d'abord: les cultivateurs sud-américains utilisent beaucoup d'engrais et de pesticides. Selon une étude de 2007 de l'International Labor Rights Fund [Fonds International des Droits du Travail] (aujourd'hui devenu l'International Labor Rights Forum [Forum International des Droits du Travail]), et l'U.S. Labor Education in the Americas Project [Projet pour l'éducation au travail en Amérique], 20% des produits chimiques vaporisés sur les fleurs colombiennes sont illégaux aux États-Unis ou en Europe. Ils ont contaminé les sols et sont à l'origine de sérieux problèmes de santé (PDF) chez de nombreux travailleurs. Il existe des programmes de certification pour des productions responsables, mais il est souvent difficile de savoir comment une simple botte de roses a été cultivée.

D'un autre côté, les fleurs cultivées dans des zones équatoriales et livrées sur votre marché vont probablement utiliser globalement moins d'énergie que leurs équivalents produits localement, même si elles ont passé cinq heures dans un avion. Février n'est pas la saison de choix pour la récolte florale, dans la majorité des États-Unis, et des conditions de récoltes efficientes surpassent en général la simple proximité du producteur et du consommateur.

Des écologistes anglais de l'Université de Cranfield ont comparé (PDF) l'impact environnemental –y compris de la production et du transport– de roses importées en Angleterre des Pays-Bas, avec celles venant du Kenya. Les fleurs hollandaises demandaient de l'énergie pour chauffer leurs serres, mais jouissaient d'un vol plus court, tandis que celles venant du Kenya profitaient de la chaleur naturelle, mais mettaient plus de temps à venir. Au final, les roses venant du Kenya émettaient 0,18 kg de CO² par fleur, tandis que les fleurs cultivées en Hollande produisaient 2,9 kg de CO² par fleur. Quand les groupes prirent en compte tous les gaz à effet de serre –y compris le méthane et le monoxyde d'azote en plus du CO²– et ajustèrent leurs données au fait que les émissions aériennes sont particulièrement préjudiciables parce qu'elles sont injectées dans l'atmosphère à haute altitude, les fleurs hollandaises avaient un impact sur le réchauffement climatique six fois supérieur aux roses kényanes.

L'impact environnemental de la soie

Malheureusement, personne n'a mené d'analyse comparable et complète, au niveau du cycle de vie des fleurs en soie. Mais malgré tout, il est possible de décrire certains des effets environnementaux des faux bourgeons en tissu.

Même si la fabrication de la soie demande un peu plus d'intervention humaine que la culture de roses, le textile ultra-satiné est encore largement un produit agricole. Les vers à soie, la source de toutes les soies véritables, se nourrissent des feuilles de mûrier blanc. (Des fleurs artificielles peuvent aussi être fabriquées à partir de viscose, à base de cellulose, ou de polyester, dérivé du pétrole. Mais laissons ces options meilleur marché à des jours moins romantiques.) Les producteurs de soie attendent que les vers forment des cocons, qu'ils collectent après avoir tué les insectes à la vapeur. La soie brute est mise sur des bobines, passée encore une fois à l'eau bouillante, teinte, puis tissée.

Les mûriers blancs sont sensibles aux infections virales, bactériennes et fongiques, et la majorité des producteurs utilisent donc des produits chimiques pour protéger leurs récoltes. (Les pesticides et les engrais ne sont cependant pas aussi violents que d'autres phytosanitaires agricoles, car les vers sont eux aussi sensibles aux produits chimiques.) Les producteurs utilisent des détergents, qui peuvent favoriser des efflorescences algales, pour séparer la soie brute de la gomme qui forme le cocon. En plus, les blanchissants et les teintures comprennent souvent des dioxines, des métaux lourds et des composés azo, dont certains sont toxiques.

Le gros de l'énergie requise par la production de la soie est dépensée dans les étapes du passage à la vapeur et à l'eau bouillante –et dans les usines où la soie est embobinée, tissée, et enroulée pour la faire ressembler à une fleur. Malheureusement, les recherches sur le sujet sont trop insuffisantes pour chiffrer précisément l'utilisation énergétique ou les émissions de carbone associées.

Soie sauvage et long voyage

Voici des millénaires que la production de soie existe, et le secteur a trouvé depuis de nouvelles façons de réduire son impact environnemental. Quelques producteurs ont réfléchi au moyen de collecter la soie sans tuer la larve. Vous pouvez aussi acheter de la soie sauvage, qui consomme moins d'énergie et a besoin de moins de produits chimiques. Mais comme la niche de production est encore réduite, il est cependant peu probable que l'une de ces techniques ait présidé à la fabrication des fleurs en soie que vous trouverez dans votre magasin de quartier.

La Chine produit plus de 70% de la soie mondiale, et l'Inde est à la seconde place, avec 11%, votre soie a donc de grandes chances d'avoir fait un long voyage pour arriver chez vous. Mais comme les fleurs en soie ont une durée de vie indéfinie, elles voyagent en général grâce au fret marin qui demande considérablement moins d'énergie que le fret aérien. L'expédition d'un bouquet de 500g émet en gros 0,12 kg de CO², et environ 20 fois plus si elle se fait par transport aérien.

Sans plus de recherches scientifiques sur le sujet, il est impossible de dire combien il faut de vraies roses pour équivaloir à l'impact environnemental d'un bouquet de fleurs en soie. Garder un vase rempli de fleurs en soie est probablement le choix le plus éco-responsable, sur le long terme. Mais pour combien de temps? Qui sait. Mais avez-vous réellement dans l'idée de sortir de votre placard le même bouquet poussiéreux de roses artificielles tous les ans, à la même date? Cela pourrait vous mener au divorce –une conséquence environnementale bien plus grave que la commande annuelle de vraies roses. On attend vos recommandations d'ersatz floraux éco-responsables dans les commentaires ci-dessous.

Brian Palmer

Traduit par Peggy Sastre

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