Monde

Le Kirghizistan, un Etat en ruines

Temps de lecture : 2 min

Deuxième étape du voyage au coeur du Kirghizistan: Djalalabad.

A Djalalabad / Mathieu Baudier
A Djalalabad / Mathieu Baudier

««« Le début du reportage « Après avoir passé les cols, la route contourne la retenue du barrage de Toktogul, qui donne au Kirghizstan le contrôle des eaux du Naryn, avant qu'il ne devienne le Syr-Daria, traversant l'Ouzbékistan et le Kazakhstan jusqu'à la Mer d'Aral.

Retrouvez le reportage-photos en grand format de Mathieu Baudier

Puis on débouche soudain sur les champs de coton écrasés de chaleur de la vallée du Ferghana et dès qu'on s'éloigne du système d'irrigation, les collines deviennent arides. Au sud du Kirghizstan, on se sent toujours coincé entre deux frontières: celle de l'aridité et celle de l'Ouzbékistan. Cette dernière est fermée officiellement et il arrive régulièrement que des paysans à la recherche d'une bête soient blessés ou tués après avoir osé s'en aventurer trop près. A l'époque soviétique, la région était intégrée et la route vers Och coupait directement par l'Ouzbékistan. Il faut désormais rajouter une heure au trajet.

Les maisons détruites, systématiquement

L'entrée dans la ville de Djalalabad est choquante. Sur plus d'un kilomètre avant d'atteindre le centre, toutes les maisons sont détruites. Systématiquement. Vitres brisées, murs noircis par les flammes, on a le sentiment qu'une grêle de feu s'est abattue sur ces quartiers. Devant les habitations s'amoncellent des tas de briques et autres matériaux fournis par la communauté internationale. On s'affaire déjà à reconstruire. Signe d'espoir et de retour à la normalité? Pas forcément, car ces gens profitent peut-être juste de l'aide internationale pour reconstruire leurs maisons avant de les vendre et de quitter le pays. La stratégie des organisations humanitaires a été de reconstruire une partie de la maison sur son emplacement original, afin de permettre aux familles de passer l'hiver et de ne pas cautionner leur expulsion de ces quartiers. Début décembre, cet objectif était rempli.

Dans le centre, rien ne transparaît de la désolation qu'on vient de traverser. On croise même des hommes portant le chapeau traditionnel ouzbek, sorte de petit cube noir aux broderies blanches. Mais l'hôtel-restaurant Navruz, à la cuisine ouzbèke réputée, où l'on espérait faire étape, a été détruit lui aussi. Dans un autre restaurant, on se fait apostropher violemment par un des clients, d'une façon révélatrice des tensions entre population kirghize et communauté internationale:

«Vous autres occidentaux, on ne veut pas de vous ici! Et votre démocratie, c'est de la pourriture!»

Les élections parlementaires du 10 octobre 2010 ont produit des résultats paradoxaux. Elles sont une étape majeure dans la transition démocratique, avec une grande diversité de partis politiques, des débats relayés par une presse vivante et un déroulement globalement correct. «J'ai observé beaucoup d'élections en Asie centrale depuis des années, mais c'est la première dont je ne pouvais pas prédire le résultat», déclare dans un communiqué le responsable de l'observation de ces élections par l'OSCE. Cependant la surprise vient de la victoire du parti nationaliste Ata-Jurt, basé dans le sud et proche du président déchu, ainsi que des résultats décevants des partis soutenant le gouvernement intérimaire.

Cinq partis rentrent au parlement: Ata-Jurt donc (opposition), le parti social-démocrate (SDPK, pro-gouvernement intérimaire), Ar-Namys de l'ancien Premier ministre pro-russe Felix Kulov, Respublika du richissime homme d'affaire Umurbek Babanov (opposition modérée) et Ata-Meken (pro-gouvernement). La proximité de leurs scores rend plusieurs coalitions possibles et les thèmes débattus sont le retour à un pouvoir présidentiel fort, le partenariat stratégique avec la Russie et la collaboration avec les occidentaux, notamment l'avenir de la base aérienne de Manas. La présidente Roza Otunbayeva charge d'abord le SDPK, dont elle est proche, de former une coalition. Cette première tentative SDPK / Respublika / Ata-Meken échoue de peu le 2 décembre dernier. C'est désormais Respublika qui dirigent les négociations, ouvrant la possibilité d'une coalition Respublika / Ata-Jurt / Ar-Namys, pro-russe et opposée au gouvernement actuel. Mais en cas d'échec répété, de nouvelles élections devront être organisées. Au-delà de progrès manifestes, ces élections révèlent donc un Kirghizstan divisé, dont le système politique clanique et corrompu portent les germes d'une instabilité renouvelée. »»» Lire la suite: Etape 3: Och: pogroms ou nettoyage ethnique?

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