Culture

Au revoir mari, bonjour bonheur!

Temps de lecture : 6 min

A Hollywood, les femmes divorcent pour le meilleur et pour le pire... et souvent pour le meilleur.

Julia Roberts et Javier Bardem dans Mange, Prie, Aime © 2010 Sony Pictures Releasing France
Julia Roberts et Javier Bardem dans Mange, Prie, Aime © 2010 Sony Pictures Releasing France

Divorcer est ce qui pouvait arriver de mieux à la femme que Julia Roberts interprète dans Mange, prie, aime : elle se console avec James Franco et Javier Bardem, se régale goulûment de pizzas et de glaces et, à en croire la bande-annonce , découvre enfin «la vérité au cœur de sa vie». Le film est une adaptation du roman éponyme (auquel on a reproché de minimiser la face obscure du divorce ). Mais pourquoi bouder son plaisir devant la réincarnation d'un personnage phare du cinéma des années 1970: la femme libérée une fois débarrassée de son mari.

Hollywood s'est intéressé au divorce avant même le cinéma parlant, relève le critique de cinéma David Thomson. Cecil B. DeMille, par exemple, a réalisé plusieurs films flirtant avec le sujet et mettant en scène Gloria Swanson. Toutefois, des films comme Après la pluie, le beau temps (1919) ou L'Échange (1920) ne laissent pas les femmes profiter jusqu'au bout de leur liberté retrouvée. Ainsi, dans L'Échange, Swanson joue le rôle de Beth Gordon, une intellectuelle que son mari délaisse pour une jeunette affriolante. Et plutôt que de prendre un nouveau départ, Gordon décide de jouer les coquettes pour reconquérir son mari.

Dans les années 1930 et 1940, la mode est au remariage, à l'image de la réalisation de Cukor Indiscrétions. Comme le notait l'an dernier Willa Paskin dans un article de Double X ces comédies romantiques «dissèquent l'institution pour mieux la reconstruire». Les films du genre s'ouvrent en général sur un divorce pour se conclure sur les retrouvailles du couple. Malgré des personnages féminins indépendants et audacieux, preuve nous est donnée qu'il n'y a de véritable bonheur que dans le mariage.

Il faut attendre les années 1970 pour que la vague des femmes émancipées ne déferle vraiment sur le grand écran, ce qui n'a rien de surprenant vu l'explosion du nombre de divorces (fichier au format PDF) à laquelle on assiste à l'époque, alors que «l'épanouissement personnel» occupe tous les esprits. La Femme libre , avec Jill Clayburgh dans la peau d'Erica, une femme de l'Upper East Side plaquée tout net par son mari, est exemplaire de ces films sur le divorce libérateur, où «le célibat de l'héroïne devient un tremplin pour vivre une expérience positive», selon les termes du New York Times . Même «l'artiste barbu et sensible», pré-requis indispensable des années 70, est de la partie.

Depuis cette période emblématique, ces femmes en quête de soi après un divorce ont fait l'objet de nombreux films, dans lesquels on retrouve souvent certains passages quasi-obligés: danse en tenue seyante selon les critères de l'époque (La Femme libre, D'une Vie à l'autre ), destruction des biens de l'ex honni (Où sont les hommes , Le Club des ex), consommation ludique de drogue (D'une Vie à l'autre, Pas si simple ) et voyage à l'étranger pour rencontrer de beaux mâles virils (Sans Complexe [How Stella Got her Groove back] , Sous le Soleil de Toscane et, naturellement, Mange, prie, aime). Illustration en images de ces femmes qui profitent de la vie sans mari.

La Femme libre

Dans ce film de 1978, Erica, interprétée par Jill Clayburgh, vient d'être larguée sans préavis par son mari. La femme abandonnée réagit d'abord en rendant tripes et boyaux. Puis elle se reprend. Elle balance les clubs de golf de son époux et fréquente une bande d'artistes (parmi lesquels l'inévitable barbu au cœur tendre). Dans cette scène où elle s'imagine en ballerine, elle danse en sous-vêtements dans son bel appartement new-yorkais.

Vidéo de An Unmarried Woman © 1978 20th Century Fox. Tous droits réservés.

Manhattan

Dans ce millésime 1979, Jill, jouée par une Meryl Streep lumineuse, a quitté son mari Isaac (Woody Allen) pour vivre avec une femme. Isaac, lui, a jeté son dévolu sur une jeune fille de 17 ans. Jill a entrepris d'écrire un livre sur son couple brisé appelé «Le Mariage, le divorce et moi». «Je fais ce que je veux,» rétorque-t-elle à un Isaac qui lui reproche de divulguer les secrets de leur relation. Et quand il plaide que c'est là «une expérience humiliante», elle répond, avec cette franchise très seventies: «Voilà qui décrit très bien notre rupture».

Vidéo de Manhattan © 1979 United Artists. Tous droits réservés.

Où sont les hommes

Bernie (Angela Bassett) est dans tous ses états. Son mari vient de la quitter pour une femme blanche. Dans ce film, c'est le pouvoir rédempteur de l'amitié féminine qui va permettre à l'affligée de retrouver le moral, grâce à ses trois amies interprétées par Loretta Devine, Lela Rochon et une Whitney Houston qui n'avait pas encore renié les substances illicites. Mais c'est aussi la rage qui redonne des forces à la femme blessée, et lui fait incendier les vêtements et la BMW de son ex.

Vidéo de Waiting to Exhale © 1995 20th Century Fox. Tous droits réservés.

Le Club des ex

Comme dans Où sont les hommes, ce film de 1996 envisage la libération via l'amitié féminine et la vendetta. Les trois héroïnes, jouées par Goldie Hawn, Bette Midler et Diane Keaton, échafaudent toutes sortes de plans pour se venger de leurs infortunés maris. Dans cette scène dansée, elles sont entièrement vêtues, contrairement à Erica dans La Femme libre, mais comme pour cette dernière, la couleur blanche symbolise la renaissance en célibataire sublime.

Vidéo de The First Wives Club © 1996 Paramount Pictures. Tous droits réservés.

D'une Vie à l'autre

Là encore, une jeune divorcée s'oublie dans la danse, cette fois avec drogue en prime. Judith (Holly Hunter) avale une ecstasy avant d'entreprendre son portier, joué par Danny Devito, et de mettre le cap sur une boîte lesbienne avec sa meilleure amie, interprétée Queen Latifah. S'ensuit un intermède chorégraphié sur la chanson «If You Love Me» de Brownstone. Rien que de très normal pour une soirée sous ecsta.

Vidéo de Living Out Loud © 1998 New Line Cinema. Tous droits réservés.

Sans Complexe

Après Où sont les Hommes, Terry McMillan signe son deuxième film, Sans Complexe, avec Angela Bassett dans le rôle d'une jeune divorcée en pleine reconstruction. Sa meilleure amie (Whoopi Goldberg) convainc Stella (Bassett), femme d'affaires surmenée, de s'envoler vers la Jamaïque pour un séjour «triple R» – repos, relaxation et roucoulade. C'est là qu'elle rencontrera un fringant Jamaïcain (Taye Diggs) qui, bien sûr, saura comment la détendre. Nous ne ferons pas de commentaire sur le marcel résille que porte Taye Diggs dans l'extrait présenté ici.

Vidéo de How Stella Got Her Groove Back © 1998 20th Century Fox. Tous droits réservés.

Sous le Soleil de Toscane

La romancière Frances (Diane Lane) peine sur la fin d'un livre quand elle apprend de la manière la plus humiliante qui soit que son mari préfère les jeunes. Dégoûtée par sa vie à San Francisco, elle part en Toscane, où elle achète une maison qui a fort besoin d'être rénovée. Quand sa meilleure amie, Sandra Oh, lui fait remarquer que cela risque d'être très dur toute seule, Lane répond: «J'y arriverai. (…) Je demanderai aux descendants baraqués des dieux romains de faire le gros œuvre.» Des descendants des dieux romains qui viendront, il va de soi, pimenter l'intrigue...

Vidéo de Under the Tuscan Sun © 2003 Buena Vista Pictures. Tous droits réservés.

La Main au collier

Diane Lane, qui a régné sur le genre au début du siècle présent, prête ici son jeu à une réalisation un peu molassonne, La Main au collier. La femme qu'elle interprète, Sarah, déprimée par un mariage raté, s'inscrit à des sites de rencontre sur Internet sous les conseils de sa dynamique sœur, qui trouve sa nouvelle vie un peu trop morose. Ce retour à la vie sociale redonne la pêche à Sarah qui, dans cette scène, rencontre pour la première fois Jack (John Cusack), fabricant de canoës en fibre de verre légèrement empoté (ça fait envie!), dans un jardin canin.

Vidéo de Must Love Dogs © 2005 Warner Bros. Pictures. Tous droits réservés.

Pas si simple

Divorcés depuis des années, Jane (Meryl Streep) et Jake (Alec Baldwin) se retrouvent lors d'une séance de galipettes alors qu'ils sont à New York pour la remise de diplôme de leur fils. Jane tient un restaurant qui a décollé après sa séparation d'avec Jake. Son escapade avec son ex-époux est comme un déclic pour notre héroïne, qui se met à fréquenter un certain Adam (Steve Martin) et à s'accorder un petit joint de temps à temps. Dans cette scène elle plane complètement et adore ça. Et ça, c'est pas si compliqué.

Vidéo de It's Complicated © 2009 Universal Pictures. Tous droits réservés.

Jessica Grose

Traduit par Chloé Leleu

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