France

Réforme des retraites: la suivante est pour 2017

Temps de lecture : 4 min

Les solutions aux problèmes de financement ne sont pas les mêmes à court terme et à long terme.

Manifestation à Marseille le mardi 7 septembre contre la réforme des retraites J
Manifestation à Marseille le mardi 7 septembre contre la réforme des retraites Jean-Paul Pelissier / Reuters

La réforme des retraites vise à définir de nouvelles modalités de financement des régimes de retraite par répartition. En dehors de certains cas spécifiques, les principaux paramètres retenus par le gouvernement sont d’augmenter l’âge légal de la retraite de 60 à 62 ans et de repousser de 2 ans à 67 ans l’âge à partir duquel les salariés peuvent partir avec une retraite à taux plein.

L’efficacité de cette réforme pour les salariés est faible puisqu’elle suppose que de nouvelles réformes viendront répondre à la problématique de l’emploi des seniors, d’une part, et rajeunir l’âge d’entrée dans le monde du travail. Quelles sont donc les moyens qui permettraient de financer d’une manière pérenne les régimes de retraite par répartition?

D’une logique comptable à une logique économique

L’intérêt de la réforme actuelle pour les comptes publics est de court terme. Le rallongement de la durée du travail permettra de réduire pour les prochaines années les coûts de la Caisse Nationale pour l’Assurance Vieillesse (CNAV) puisque le nombre de partants à la retraite sera réduit. Mais cette charge n’est en réalité que reportée dans le temps. L’efficacité comptable est d’autant plus discutable que le rallongement de la durée de travail risque de s’accompagner d’une augmentation des dépenses maladies et augmentera mécaniquement un autre volet du déficit de la sécurité sociale, celui de l’assurance maladie. Les salariés seniors seront de plus en plus enclins à augmenter les congés maladie compte tenu de la pénibilité du travail. Maintenant, il est vrai que l’espérance de vie augmente dans tous les pays occidentaux, même si ce constat doit être contrasté puisqu’il n’est pas homogène pour toutes les catégories socioprofessionnelles.

Les fonds de retraite par capitalisation, compte tenu de leur structure juridique (dette des sociétés vis-à-vis de leurs employés) ne peuvent pas dégrader les conditions de départ en retraite, ils essaient par conséquent de financer l’accroissement de l’espérance de vie par la création de valeur et la performance des actifs. Pourquoi les régimes par répartition ne pourraient pas s’en inspirer?

Deux paramètres essentiels: le chômage et la natalité

L’équilibre du financement des régimes par répartition vient du rapport entre le nombre d’actifs (salariés qui cotisent) et les retraités qui reçoivent les prestations de retraite. L’augmentation de la natalité permet, avec un effet retard certes, d’augmenter le nombre d’actifs dans le futur et par conséquent permet de réduire le déficit du financement du régime. De la même manière la réduction du chômage permet d’augmenter les cotisations et par conséquent vient compenser les déficits de financement. Les problèmes de financement des régimes de retraite sont ainsi aggravés par deux facteurs supplémentaires : l’arrivée des baby boomers en retraite et la faible fertilité de ces mêmes baby boomers.

Des solutions différentes à court, moyen et long terme

Une réforme juste doit s’attarder sur la problématique dans sa totalité et à des échéances différentes pour qui les solutions ne sont pas les mêmes. A long terme, le financement de la retraite ne peut être pérennisé que par des incitations à l’accroissement de la natalité et la création de nouveaux débouchés pour les salariés durant une vie professionnelle plus longue.

L’accroissement de la natalité devra s’inspirer des problématiques des couples actuellement. L’augmentation du nombre de solutions d’accueil et de garde des enfants, l’incitation fiscale plus importante pour la natalité et la proposition de solutions pour l’équilibre des congés entre les mères et les pères sont des pistes qui devraient être explorées afin d’augmenter à une échéance de 30 à 40 ans le rapport actifs sur retraités. La réduction du chômage à long terme passe par une plus forte mobilisation pour la recherche et développement et par des programmes performants de formation continue. Mais ces solutions n’auront aucun effet immédiat sur le déficit de la CNAV.

A moyen terme, il est indispensable de soutenir le Fonds de Reserve des Retraites, qui doit servir à faire face aux problèmes liés à l’arrivée des baby boomers en retraite. Des dotations annuelles doivent être mises en œuvre, issue d’une augmentation de la CSG et la CRDS. Les gouvernements précédents n’ont pas eu le courage de regarder en face la difficulté que pose la combinaison d’une faible natalité et d’un taux de chômage élevé. La génération des baby boomers devra contribuer à cet effort autant que les jeunes générations.

A court terme, la réduction des prestations de retraite (mise en œuvre par la réforme actuelle) doit être répartie de façon équitable. Les retraites chapeaux dépassant un certain niveau devront être taxés. L’Etat peut aussi s’endetter pour obtenir tout de suite les fonds nécessaires pour faire face au déficit du système de retraite et affecter les bénéfices futurs tirés de l’accroissement de la natalité et la réduction du chômage au remboursement de cette dette. Les marchés de capitaux permettent de lever des financements avec des maturités allant jusqu’à 50 ans. L’Etat devrait explorer ces solutions pour reporter certains des risques liés au financement des régimes de retraites sur les investisseurs qui souhaitent prendre des risques et que l’Etat ne souhaite pas garder. Ces solutions financières sont en ligne avec les solutions adoptées par les régimes par capitalisation.

La réforme de 2003 et la réforme actuelle ne prennent pas la problématique de la retraite dans sa globalité. La France et l’Europe en général doivent se doter de solutions à long terme pour résoudre des problèmes de long terme. Des solutions qui ne cherchent qu’un bénéfice comptable immédiat ne sont pas une réponse adaptée au défi des retraites.

Driss Lamrani

Photo: Manifestation à Marseille le mardi 7 septembre contre la réforme des retraites Jean-Paul Pelissier / Reuters

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