Si vous êtes le genre de personne qui regarde le concours Eurovision de la chanson en pariant avec vos proches sur le classement final, sachez que d'autres font de même, mais de manière professionnelle –en jouant souvent très gros. C'est le cas de Daniel Gould, interrogé par la BBC, et qui a eu particulièrement peur en 2018, puisqu'il a failli y perdre sa maison.
Depuis dix ans, Daniel Gould est parieur professionnel spécialisé dans le concours Eurovision. C'est en 2004 qu'il a eu l'idée de s'intéresser de près à cette grand messe annuelle et d'affûter sa connaissance de ses principes, de ses enjeux, de sa dimension géopolitique aussi. Et après quelques années de repérage, le Britannique s'est lancé.
Il s'est alors mis à placer de grosses sommes sur des paris peu risqués, du type «tel pays ne se qualifiera pas pour la finale». Peu risqués mais néanmoins angoissants: parier 100.000 euros sur une cote de 1,03, c'est finir avec un bénéfice de 3.000 euros en cas de victoire –mais tout perdre en cas de mauvaise inspiration. D'ailleurs Daniel Gould ne parvenait pas à regarder directement les résultats à la télévision. Trop stressé. «J'observais le mur en mordant mon poing.»
Ayant fini par quitter son job de prof d'histoire, Daniel Gould est réellement devenu un professionnel en la matière. Chaque année, il hypothéquait son domicile afin de disposer des sommes nécessaires. Avec beaucoup de succès. Ses gains annuels sont estimés à 50.000 livres en moyenne, soit environ 57.000 euros. De quoi profiter de la vie et voyager à travers le monde, son principal objectif.
Problème de type chypriote
Mais les probabilités ne sont que des probabilités, et les analyses les plus fines n'empêchent pas les erreurs de jugements ou les événements inattendus. C'est ainsi qu'en 2018, persuadé que la chanson chypriote «Fuego» d'Eleni Foureira n'avait aucune chance, il paria pendant des mois sur le fait qu'elle ne passerait pas les phases de qualification du concours. Dans le même temps, il plaça tous ses espoirs –ou plutôt toute son expertise– sur le morceau «Toy», chanté par Netta pour Israël.
Mais à l'occasion des demi-finales de cette année-là, Gould prit conscience un peu tard que le public aimait follement la chanson de Chypre, et qu'il n'avait pas vu cela arriver. Ayant parié une somme à six chiffres sur le fait que Chypre ne gagnerait pas le concours, il réalisa qu'il était sur le point de perdre très gros. D'autant que miser sur Chypre ne permettrait pas de compenser le pari précédent: entre-temps, la popularité croissante du morceau chypriote avait considérablement fait évoluer les cotes.
Le soir de la finale fut une torture pour Daniel Gould. La rumeur d'une possible victoire chypriote montait peu à peu. Et ce ne fut qu'au bout d'une soirée interminable que la victoire de Netta, reléguant Eleni Foureira au deuxième rang, lui permit de retrouver ses esprits et de réaliser qu'il était désormais loin de la banqueroute. Jusqu'à la prochaine fois.