Médias / Société

«Love Is Blind» est-elle une télé-réalité diabolique?

Temps de lecture : 12 min

Certains voient dans cette série Netflix un exemple de «terrorisme émotionnel». Son créateur estime quant à lui avoir réussi quelque chose d'unique et d'humain.

Love Is Blind est-elle bien la création d'individus diaboliques? La réponse est oui –mais ces individus semblent convaincus d'agir pour le bien de l'humanité. | Capture d'écran Netflix via YouTube
Love Is Blind est-elle bien la création d'individus diaboliques? La réponse est oui –mais ces individus semblent convaincus d'agir pour le bien de l'humanité. | Capture d'écran Netflix via YouTube

Lancée il y a trois ans, la série de télé-réalité de Netflix Love Is Blind a été accusée de «terrorisme émotionnel» et son principe qualifié de «tordu» et «profondément pervers». On aurait donc tendance à imaginer que les producteurs passent leur temps libre à lire Machiavel et à imaginer des façons créatives de tuer leurs Sims. Il n'en est rien, m'a assuré son créateur, Chris Coelen. Au contraire, il s'est donné pour ambition de cerner la nature de l'amour, le vrai.

«J'ai l'impression d'avoir lu 90% des études sur les relations amoureuses qui ont été publiées», a déclaré Chris Coelen il y a quelques semaines en parlant de l'émission –qui consiste à former des couples sachant que les deux intéressés ne pourront se voir qu'après avoir noué des liens solides. «Je suis intéressé par les enjeux de ce type de décisions et par leurs impacts dans le monde réel, a-t-il ajouté. J'ai fait quelques bonnes émissions culinaires, mais choisir –ou ne pas choisir– de tomber amoureux, ou de s'engager avec quelqu'un pour la vie, c'est autre chose que réussir le meilleur gâteau.»

La quatrième saison de Love Is Blind s'est achevée le lundi 17 avril, avec la diffusion d'un épisode spécial, consacré aux retrouvailles entre candidats (qui aurait dû connaître une diffusion en direct, finalement annulée à cause d'un problème technique). Il s'agit du plus grand succès de Kinetic Content, une société de production dirigée par Chris Coelen et spécialisée dans la télé-réalité «high concept» (basée sur un concept). Depuis une dizaine d'années, il a convaincu des couples qui ne se sont jamais vus de se marier.

Married at First Sight, qui a été lancé en 2014 et qui en est actuellement à sa seizième saison, a été son premier grand succès. Dans cette émission, adaptée d'une version danoise (et qui a aussi une version française diffusée sur M6), les candidats célibataires se voient attribuer un(e) partenaire par un groupe d'experts. Et ils rencontrent celui-ci ou celle-ci pour la première fois devant l'autel, juste avant de se dire «oui».

Un carton mondial

Après la percée de Married at First Sight, la société de Chris Coelen a concocté de nombreuses variations sur des thèmes similaires –des émissions comme Kiss Bang Love, qui commençait par des baisers les yeux bandés, et Seven Year Switch, dans laquelle des couples mariés en crise se voyaient attribuer de nouveaux partenaires temporaires– avant de remporter le gros lot avec Love Is Blind.

La série a fait ses débuts sur Netflix début 2020, en pleine pandémie. Dans un moment qui semble encore irréel, alors que le pays (et le monde entier) s'isolait, les participants à l'émission étaient assis seuls dans leur «capsule» et établissaient un contact avec des partenaires potentiels sans pouvoir occuper la même pièce.

Ce fut un succès sensationnel, et d'autres saisons et adaptations dans le monde entier ont rapidement suivi. La série figure régulièrement dans le Top 10 de Netflix, et sa popularité n'a fait que croître au fil des ans: Chris Coelen m'a confié que la saison actuelle est en passe de battre tous les records. Depuis, Netflix a commandé à son équipe deux séries tout aussi perfides, L'Ultimatum: On se marie ou c'est fini et Perfect Match, qui ont elles aussi fait un carton. «Il n'est pas exagéré de dire que ces trois émissions sont les plus regardées dans leur catégorie, probablement les émissions non scénarisées les plus populaires au niveau mondial», déclare-t-il.

Mais qu'en est-il de l'accusation de «terrorisme émotionnel»? Alors que la quatrième saison de Love Is Blind vient de connaître sa palpitante conclusion, j'ai voulu savoir si la série était bien la création d'individus diaboliques. La réponse est oui –mais ces individus semblent convaincus d'agir pour le bien de l'humanité.

C'est Chris Coelen qui est à l'origine du concept initial de Love Is Blind, et il sera le premier à vous dire qu'il a visé juste. «C'est très très difficile de trouver une idée qui fonctionne vraiment. Vous pouvez réussir votre coup à 75 ou 85%, mais il vous manque toujours quelque chose. Love Is Blind, c'est avant tout une très bonne idée. Une idée qui fonctionne à tous les niveaux», commente-t-il.

«C'est très simple à décrire, poursuit-il. Mais l'élaboration des différents éléments demande beaucoup de temps. Comment va-t-on faire en sorte qu'ils ne se voient pas? Ils seront assis sur des chaises l'un en face de l'autre? Même lorsque nous en sommes arrivés à l'idée qu'ils seraient suffisamment proches pour sentir leur présence réciproque, nous nous sommes demandés s'ils pourraient voir vaguement une silhouette.»

Une stratégie de production qualifiée d'«humaine»

Chris Coelen a travaillé pour une autre société de production avant de créer Kinetic Content. Encore avant, il a travaillé dans les années 1990 et le début des années 2000 comme agent dans le secteur alors naissant de la télé-réalité (l'animateur de Love Is Blind et star de la télé-réalité Nick Lachey a compté parmi ses clients). Il voit toutefois d'un œil critique certaines de ses réalisations. «Une émission que nous avons réalisée pour la chaîne TLC, intitulée The Spouse House, n'a pas marché, concède-t-il. Ce n'était pas vraiment réussi, même si j'y croyais à l'époque. Mais cette émission m'a beaucoup appris sur ce qui motive les gens dans une relation.»

Tout cela a de fait abouti à une formule gagnante de la télé-réalité, une formule d'une simplicité trompeuse. «Il y a beaucoup de producteurs qui ont été formés à la télé-réalité et qui sont très bons, mais ils sont formés à produire, à faire advenir quelque chose, explique-t-il. Dans l'émission, nous avons veillé à freiner cette impulsion et à ne pas intervenir. Ne pas intervenir est toujours le meilleur choix.»

«[Love Is Blind] est comme avoir affaire à un bon psy. Un bon psy ne vous dit pas quoi faire. Il ne fait que vous présenter les options possibles.»
Montré Burton, producteur exécutif de Married at First Sight

Cette stratégie –qui consiste à placer les gens dans des situations où ils peuvent décider par eux-mêmes, plutôt que de laisser les producteurs intervenir– est qualifiée d'«humaine» par certains collègues producteurs. «Tout le monde ne produit pas dans cette optique, souligne Montré Burton, producteur exécutif de Married at First Sight. Ce que j'apprécie chez Chris [Coelen], c'est son approche humaine.»

Cette attitude contraste résolument avec les autres émissions du genre, notamment avec le poids lourd dans le monde de la télé-réalité qu'est The Bachelor. «Je suis un grand fan du Bachelor depuis longtemps, souligne Chris Coelen avec diplomatie. Ce qu'ils font, ils le font très bien. Mais The Bachelor est une émission de son temps. Elle a été lancée en 2002. Elle est très formatée, avec les éliminations, la rose.»

Selon Montré Burton, Love Is Blind, «c'est comme avoir affaire à un bon psy. Un bon psy ne vous dit pas quoi faire. Il ne fait que vous présenter les options possibles.»

Des moments cruels

Le format de la série est à peu près le suivant: pendant les dix premiers jours de l'expérience, un groupe d'hommes et de femmes ont de brefs échanges avec des personnes du sexe opposé dans des «capsules». Il s'agit de pièces sans fenêtre à l'esthétique hyper-soignée, dans lesquelles leurs voix sont transmises grâce à des haut-parleurs. Ils notent qui leur plaît et qui ne leur plaît pas, et les options se réduisent jusqu'à ce que certains couples en arrivent au point où ils seraient prêts à se fiancer –sans s'être jamais vus.

Les larmes coulent, les questions fusent et seuls les couples qui acceptent de se marier connaîtront le grand moment de vérité, la rencontre en chair et en os. Les couples passent ensuite des vacances ensemble puis cohabitent plusieurs semaines avant la cérémonie de mariage.

Les ressorts dramatiques de la série sont cruels. Dans la saison 3, un homme nommé Bartise pense avoir une conversation à cœur ouvert avec une femme nommée Raven. Or, celle-ci se révèle être en train de faire des exercices de sauts en étoile, pendant qu'il parle du divorce de ses parents (ce qui ne l'a pas empêchée de terminer la saison avec un score de popularité élevée). Vient ensuite le choc, lorsque les partenaires se rencontrent et que la réalité s'avère décevante.

«D'une certaine manière, je nous considère plutôt comme des documentaristes.»
Chris Coelen, créateur et producteur exécutif de Love Is Blind

Cette saison, par exemple, Irina a dit à son nouveau fiancé Zack qu'il ressemblait à une caricature [«a creepy cartoon character»], croyant sincèrement faire preuve de tact, à mon avis. Soit dit en passant, elle a tort, tous les internautes s'accordent à dire qu'il ressemble à un des Property Brothers (une émission canadienne, appelée en France «Total Rénovation: Frères en affaires», qui met en scène deux frères spécialistes de l'immobilier).

Les intrigues sont souvent centrées sur les rivalités amoureuses. Et il est particulièrement cruel de voir des participants se retrouver fiancés en même temps que d'autres pour lesquels ils ont encore des sentiments. Mais le plus grand carnage a souvent lieu lors du mariage à proprement parler, durant lequel il n'est pas du tout inhabituel que l'un des deux se fasse plaquer devant l'autel, sous les yeux de ses amis et de sa famille réunis.

Un casting qui dit recruter des gens «qui cherchent vraiment l'amour»

Une saison d'une émission comme Love Is Blind représente quelque 30.000 heures de tournage, qui aboutissent à douze épisodes d'une heure. Lorsque les participants arrivent sur le plateau, les producteurs ont théoriquement effectué tout le travail préparatoire. Comme le dit Chris Coelen, dans une comparaison qui fait légèrement tiquer: «D'une certaine façon, je nous considère plutôt comme des documentaristes. Nous sommes des producteurs parce que que nous créons le dispositif, mais nous nous contentons ensuite de montrer ce qui se passe.»

C'est en partie parce que, comme j'ai pu l'apprendre, l'émission ne plaisante pas avec le casting. «Je dirais que Love Is Blind est une série qui traitent des relations, commente Donna Driscoll, directrice de casting pour Kinetic Content. Married at First Sight traite aussi des relations. Ce ne sont pas des émissions de dating. Pour une émission de dating, j'ai l'impression qu'on recherche plutôt des influenceurs ou des mannequins Instagram ou juste des gens sexy. Pour une série qui traite des relations, on a également affaire à des personnes très séduisantes –c'est toujours un atout– mais on essaie de trouver des individus qui cherchent vraiment l'amour.»

«Le casting est devenu plus difficile, parce qu'il suffit d'apparaître dans une saison pour devenir célèbre.»
Donna Driscoll, directrice de casting pour la société de production Kinetic Content

Les participants sont soumis à plusieurs séries d'entretiens au cours desquels les producteurs essaient de cerner leurs intentions. «Nous leur posons beaucoup de questions très précises sur leurs relations passées, sur ce qu'ils recherchent chez un(e) partenaire, sur ce que le mariage signifie pour eux, explique Donna Driscoll. Pourquoi maintenant, pourquoi ce processus?»

«Lors du méticuleux casting de Love Is Blind, nous devons nous assurer que soient écartées les personnes qui ne s'engagent pas de manière totale dans le processus, poursuit-elle, apparemment sans ironie. C'est une énorme responsabilité que je prends très au sérieux. Et c'est devenu plus difficile, parce qu'il suffit d'apparaître dans une saison pour devenir célèbre.»

Parfois, l'équipe a juste un bon feeling à propos de quelqu'un. «C'est notre travail chez Kinetic Content et dans l'équipe du casting, de nous battre pour les personnes qui nous tiennent à cœur», me confie Donna Driscoll. C'était le cas avec Cameron Hamilton, lors de la saison 1. «C'est un scientifique. Ce n'est pas le participant type d'une série de télé-réalité non scénarisée. Il s'est lancé dans cette expérience –qui est une expérience sociale– en tant que scientifique, ce que j'ai trouvé fascinant. Et son désir de trouver une partenaire durable était si profond qu'on ne pouvait pas passer à côté.» Cameron Hamilton a rencontré et épousé la candidate Lauren Speed. Ils sont toujours ensemble et forment l'un des couples les plus populaires qui ait émergé de la pop culture depuis des années.

Tout le monde n'est pas Cameron ou Lauren, loin de là. Mais les responsables de Kinetic Content jurent haut et fort qu'ils font leur casting en toute bonne foi. «Nous n'avons pas besoin de chercher le spectaculaire, affirme Montré Burton. Nous n'avons pas besoin de chercher des personnalités conflictuelles. Parce que les conflits se produisent dans la vie de tous les jours. Les conflits éclatent lorsque vous êtes à la poste, au supermarché, lorsque vous parlez à votre mère ou à votre conjoint(e). Et nous sommes simplement là pour le montrer.»

C'est ce qu'illustre brillamment la saison 4, dans laquelle le comportement des participants a débordé des limites du format, et l'émission a suivi le rythme. Lorsque Zack et Irina –la femme qui l'a traité de caricature– ont rompu leurs fiançailles (pour des raisons évidentes), Zack a renoué avec Bliss, une femme avec qui il avait échangé dans les capsules, mais à laquelle il avait préféré Irina. Zack et Bliss ont manqué la partie «vacances et emménagement ensemble», mais les producteurs ont tout de même suivi leur histoire.

Quand on y réfléchit, beaucoup de choses qui ont rendu la saison intéressante semblent résulter des décisions des participants plutôt que de l'intervention des producteurs. On a pu repérer aussi lors de cette saison quelques méchants mémorables, dont Irina. Ce qui pose la question suivante: sommes-nous vraiment censés croire que tous les candidats arrivent dans un état de totale vulnérabilité et prêts à se marier?

Mais à vrai dire, ce type de personnes –qui peuvent se montrer blessantes sans être foncièrement méchantes– existe dans le monde réel du dating, et même si elle a dit que son fiancé ressemblait à une caricature, on ne peut pas dire qu'Irina soit une caricature de la méchante. Il n'y a d'ailleurs pas que des méchants: à la fin de la saison, Tiffany et Brett Brown semblent quasiment fournir la preuve qu'il est possible de trouver un partenaire dans Love Is Blind.

«Si les candidats sont authentiques, l'expérience sera captivante»

On ne peut cependant pas prétendre que le succès soit la règle, en ce qui concerne les couples formés. Parmi ceux qui se constitués au cours des premières saisons de Love Is Blind, seuls quatre tiennent encore. Finalelent, l'émission Married at First Sight a donné lieu à plus de divorces que de mariages «solides».

Kinetic Content préfère se concentrer sur les couples qui durent. «Certains couples nous ont surpris, avoue Montré Burton. Nous avions confiance en eux, mais ils ont dépassé nos attentes. Je pense par exemple à Woody et Amani de la saison 11 [de Married at First Sight, ndlr], à La Nouvelle-Orléans. Je serais prêt à parier qu'ils seront encore ensemble à 90 ans et qu'ils seront toujours aussi beaux, étonnants, uniques et formidables.» (L'émission filme les couples pendant environ huit semaines, mais il y a des réunions et parfois des épisodes ultérieurs qui permettent de savoir où ils en sont.)

«Mon expérience dans les capsules m'a montré que nous nous ressemblions énormément [avec Brennon, son futur mari, ndlr], mais ce n'était pas évident pour les membres de la production.»
Alexa (Alfia) Lemieux, qui s'est mariée à l'issue de la saison 3 de Love Is Blind

Par ailleurs, voici comment Chris Coelen voit les choses: «Je ne mesure pas la réussite de l'émission au nombre de couples qui sont encore ensemble. Ce serait ridicule et idiot.» Il estime que s'il a bien fait son boulot, les résultats seront intéressants quoiqu'il en soit. «C'est un peu cynique, mais ce qu'ils font ensuite ne m'intéresse pas.»

«S'ils sont authentiques, l'expérience sera captivante pour le public, ajoute-t-il. Et s'ils sont authentiques, ce sera une expérience passionnante pour eux aussi en tant qu'êtres humains.» Chris Coelen et moi savons tous les deux, qu'en amour comme à la guerre et dans la télé-réalité, tous les coups sont permis. Et quand ça marche, il faut s'incliner.

Alexa (Alfia) Lemieux a rencontré son mari, Brennon Lemieux, lors de la troisième saison de Love Is Blind. «Il n'y a pas d'autre situation dans la vie où on parlerait à quelqu'un de cette manière, retire-t-elle de cette expérience. Pendant tout ce temps où vous bavardez, vous êtes allongé dans des positions bizarres sur un canapé, vous parlez de toutes sortes de choses. Dans cette pièce, vous avez le sentiment que personne d'autre ne vous juge. Tout ce que vous dites s'adresse à votre interlocuteur. Cela peut durer des heures et des heures –je restais parfois cinq ou six heures– et vous ne voyez pas le temps passer. Vous partagez absolument tout.»

«L'un des producteurs a dit en plaisantant que personne ne nous voyait ensemble, Brennon et moi, poursuit-elle. Et ça ne m'étonne pas du tout. Nos parcours sont tellement différents. Mon expérience dans les capsules m'a montré que nous nous ressemblions énormément, mais ce n'était pas du tout évident pour les membres de l'équipe.» À moins qu'ils n'aient justement tout prévu…

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