Boire & manger

L'Astrance, la nouvelle institution culinaire de Pascal Barbot et Christophe Rohat

Temps de lecture : 5 min

Après deux ans de travaux, le tandem a investi les locaux de l'ancien restaurant Jamin, jadis tenu par Joël Robuchon.

Christophe Rohat et Pascal Barbot. | Pauline Gouablin
Christophe Rohat et Pascal Barbot. | Pauline Gouablin

Pendant deux décennies, Pascal Barbot et Christophe Rohat ont élevé leur petit restaurant de la rue Beethoven au plus haut, en atteignant la reconnaissance suprême: les trois étoiles.

Mais le sentiment d'avoir fait le tour s'empare des deux associés; un besoin de changement, une envie d'un lieu plus grand, de quitter cette petite cuisine (17 mètres carrés) plus vraiment appropriée à ce qu'est devenue leur institution gastronomique parisienne saluée par les meilleurs gourmets.

En 2019, ils ferment leur restaurant, le vendent en novembre 2020 au chef japonais Terumitsu Saito (L'Ortensia) pour le relancer deux ans plus tard, un kilomètre plus loin, rue de Longchamp (75016). Deux longues années au cours desquelles les travaux se sont éternisés, indique le communiqué de presse de l'agence 14 septembre. C'est finalement en cette fin d'année 2022 que L'Astrance rouvre enfin ses portes.

Aux origines de L'Astrance

L'Auvergne a le goût de la simplicité et l'astrance en est la définition même.

Fleur sauvage prenant racine au cœur de la chaîne des Puys, on la trouve sur les chemins escarpés d'Ambert à Issoire, de Vichy à Saint-Nectaire. Si la région est familière à Pascal Barbot, Christophe Rohat, lui, découvre pour la première fois les fleurs de l'astrantia lors d'un séjour en Auvergne.

Sur le point d'ouvrir leur première adresse rue Beethoven près des quais de la Seine, le nom de la fleur qui symbolisera leur association tombe alors sous le sens.

Une rencontre

Née il y a vingt-cinq ans, l'estime professionnelle puis l'amitié du duo s'est construite au «passe» et au gré des services.

Début 2000, alors que l'envie d'être chez eux les démange, ils composent avec leurs moyens et s'installent rue Beethoven, faisant par défaut le choix de la réinvention. C'est dans une cuisine exiguë, une dizaine de tables en salle, et accompagnés d'une équipe a minima qu'ils repensent les codes culinaires de l'époque: le menu à l'aveugle, sans carte, s'impose à eux.

Une alliance

Il est donc de ces alliances que le temps n'altère pas. De la rencontre de ces deux amoureux de la table naît un voyage tissé au fil des assiettes. Du produit, souvent sauvage, toujours soigneusement choisi, naît une proposition spontanée.

Si la gastronomie française imprègne Pascal Barbot, c'est avec toute la liberté qui lui est propre qu'il réinvente sa cuisine élégante, bercé de ses voyages et souvenirs.

Pascal Barbot en cuisine. | Anne-Emmanuelle Thion

En salle, Christophe Rohat, armé de son instinct et de son savoir-faire, se tourne vers les convives saisissant les attentes formulées de chacun. Que voulez-vous savourer?

«Tous les produits sont égaux, ils méritent la même attention», indique Pascal Barbot: canard de Challans, riz japonais koshihikari ou coco de Paimpol… chaque élément est porteur d'une identité qui lui est propre.

Le produit

L'observation. Voilà le maître mot de Pascal Barbot d'une sensibilité exacerbée. De la sélection de la matière première à l'assiette, il convient de «regarder le produit et de lui donner un traitement intelligent». De ne pas «exécuter comme une machine» mais de «penser avant d'agir». Ainsi, c'est avec cette perception unique que l'envie de faire «bon» se réalise au mieux.

Les producteurs de L'Astrance

Le chef s'avoue admiratif de ses fournisseurs, maraîchers, vignerons, éleveurs qui l'accompagnent depuis deux décennies. C'est donc avec cette équipe de 110 artisans faiseurs de produits d'exception qu'il poursuit sa quête de qualité.

Voici quelques portraits uniques de producteurs soigneusement choisis:

L'échalote grise, la renaissance de la reine de la cuisine de Jean-Marie Caillot, les maquereaux issus de la pêche locale de Vendée du Mareyage Hennequin, le riz d'exception Koshihikari par la maison Kioko, les agrumes, fruits de la Maison Bachès, Perrine et Étienne Schaller, le miel authentique des Cadres Noirs Percherons, extrait à froid par Patrick Cholet…

Le lieu

En déménageant de la rue Beethoven à la rue de Longchamp, entre les quatre murs de l'ancien restaurant Jamin de Joël Robuchon, L'Astrance a voulu rendre hommage à la fleur qui lui a donné son nom et imaginer un lieu dans lequel une place de choix serait donnée à la nature, au végétal, à la lumière…

La salle du restaurant L'Astrance. | Anne-Emmanuelle Thion

«L'objectif, avant tout, était de faire que ce nouveau lieu valorise les envies de Pascal et Christophe pour imaginer un endroit qui leur ressemble, porte leur projet dans la plus grande des cohérences», indique Cédric Martineaud, directeur de création au sein du studio 14 Septembre.

En quelques chiffes: 380 mètres carrés dont 70 accordés à la cuisine qui reste visible, trois niveaux dont une salle principale au rez-de-chaussée, une autre privative à l'étage et une cave au sous-sol, les trois reliées par un ascenseur.

La cave

La cave de l'Astrance est réputée depuis de nombreuses années pour sa sélection de grands vins. Au 32, rue de Longchamp, elle a enfin la place qu'elle mérite, logée dans un bel écrin à l'image des plus de 15.000 bouteilles qu'elle renferme.

Au restaurant L'Astrance, la cave à vins. | Anne-Emmanuelle Thion

Le salon Joël

Au premier étage se cache un petit salon privatisable qui rend hommage à l'ancien propriétaire des lieux, Joël Robuchon. Voici une grande tablée de six à quatorze places qu'il est possible de réserver et ainsi faire le choix d'une expérience unique sous un autre angle.

À la carte

Avant-goûts

Un velouté de cynorrhodons (fruit de l'églantier), crème fraîche et miel de carotte; le croque Astrance, truffe noire et Saint-Nectaire (20 euros); une soupe au pain très grillé (10 euros).

Au restaurant L'Astrance, un amuse-bouche. | Anne-Emmanuelle Thion

Pour débuter

Quelques coquillages et crustacés crus et cuisinés, herbettes maritimes (85 euros); l'avocat de Corse, caviar Osciètre, mozzarella et tuile de pois chiche (135 euros); le millefeuille aux champignons de Paris, foie gras mariné au verjus et pâte de citron rôti (60 euros); les ravioles végétales, la dorée de Commercy, cédrat, petit épeautre et purée de cresson (65 euros); le riz koshihikari fraîchement poli, coulis d'oursin (65 euros).

Au restaurant L'Astrance, le consommé/croque-monsieur. | Anne-Emmanuelle Thion

Vapeurs de ce jour

Le filet de rouget, huile d'olive fruitée vert (85 euros); la grosse tranche de légumes, jus d'oignons rôti et miso de seigle (65 euros); les Saint-Jacques, moelle, huître tiède et beurre de kombu (70 euros).

Du côté de la braise

Le cochon de lait, graines de lentilles, chorizo (95 euros); la tourte de colvert, jus de viande perlé, mesclun et huile vierge de noix (125 euros); le maquereau mariné au miso doux, moutarde, citron Meyer et radis d'hiver (70 euros).

Au restaurant L'Astrance, l'agneau. | Anne-Emmanuelle Thion

Nos maraîchers

Les spaghettis «Rose de France», huile de poireau (20/45 euros); la betterave rouge, toast au camembert, un jus vert au cresson (45 euros); l'artichaut, salade de pamplemousse Hirado et un condiment noix-truffe (45/85 euros); le bouquet de mâche, champignons de Paris et huile de noisette sauvage (15 euros); les racines d'automne, consommé clair, pâte de nèfle (50 euros).

Petites préparations

Le riz koshihikari fraîchement poli, beurre blanc et sauce soja (15 euros); la semoule de maïs crémeuse, truffe blanche et jus de légume réduit (45/85 euros); la pâte aux œufs Taglierini et tuber melanosporum (95/175 euros); graines de lentilles cuisinées, chorizo (20 euros).

Pour finir en douceur

La neige de bleu d'Auvergne, sorbet persil et kiwi jaune (20 euros); l'assiette de fromages affinés, Goldrush et Granny Smith (45 euros); sur un sablé, crème d'amande, quartiers de Comice et sorbet poire (35 euros); une tartelette tiède chocolatée, glace au sarrasin et mélasse de caroube (40 euros); la pulpe de citron givré, sorbet yaourt, mandarine Satsuma et lime de Tahiti (45 euros).

Menu au déjeuner à 125 euros, 175 euros avec le vin surprise. Menu Astrance à 285 euros, 395 euros avec le vin surprise.

Oui, une table admirable qui mérite une ou plusieurs visites.

32, rue de Longchamp 75016 Paris. Tél.: 01 40 50 84 40. Carte de 125 à 300 euros. Fermé samedi et dimanche. Réservation conseillée.

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