Pendant des années, l'avortement a été interdit en Irlande du Nord dans presque toutes les circonstances, et ce, même en cas de viol ou d'inceste. Les femmes souhaitant avoir recours à une interruption volontaire de grossesse (IVG) risquaient par ailleurs la prison à vie si elles avortaient de manière illégale. C'était en tout cas la peine encourue jusqu'en octobre 2019 : mois où l'IVG a finalement été dépénalisée dans le pays.
Pourtant, selon un récent sondage réalisé entre le 12 et le 17 octobre 2022 par Opinium pour Amnesty International UK, la moitié de la population nord-irlandaise ignore que l'IVG est légale dans le pays depuis maintenant trois ans. Pire encore, seulement 10% des femmes savent où se rendre si elles souhaitent avoir recours à un avortement, rapporte le quotidien britannique The Independent.
Pour Amnesty International, la raison derrière cette ignorance est simple. Au lendemain de la dépénalisation de l'IVG, le gouvernement n'aurait «pas mis en place de services d'avortement commissionnés.» L'ONG précise par ailleurs que l'accès à ces services est inégal au sein même du territoire. Certaines femmes doivent alors quitter le pays si elles souhaitent avorter. Selon les chiffres de l'organisation, entre 2020 et 2021, 161 personnes se sont ainsi rendues en Angleterre pour avoir accès à une IVG.
Des résultats choquants, mais pas surprenants
Des organismes médicaux, des associations de défense des droits humains ainsi que des personnalités ont donc récemment décidé de rédiger une lettre ouverte à l'attention du secrétaire d'État d'Irlande du Nord pour demander une mise en place immédiate d'un plus grand nombre de services d'avortement.
«Nous vous demandons instamment de les mettre en place [...] nous ne pouvons pas continuer à attendre», indiquent les signataires. «Le manque persistant de services d'avortement est inacceptable et cause des dommages chaque jour. Les femmes et les jeunes filles qui ont besoin de ces soins vitaux et urgents souffrent sans le soutien local que notre nouvelle loi pro-choix avait promis il y a trois ans.»
Les signataires notent également que si «nous assistons à des reculs très préoccupants des droits reproductifs dans d'autres pays comme les États-Unis», il est important de ne pas «oublier que des personnes au Royaume-Uni se voient également refuser leurs droits.»
Pour Grainne Teggart, directrice adjointe d'Amnesty International UK pour l'Irlande du Nord «les résultats du sondage sont choquants mais pas complètement surprenants.» «Cela fait trois ans que le gouvernement traîne les pieds pour mettre en place des services d'avortement. Il n'est pas étonnant que les gens soient laissés dans la confusion et ne connaissent pas leurs droits», conclut-elle.