France

Comment François Bayrou prépare son retour à droite

Temps de lecture : 2 min

Finies les tentatives de rapprochement avec la gauche, finies les piques contre Sarkozy. Le patron du Modem se rapproche désormais du chef de l'Etat.

Ils se critiquaient, se détestaient, s'étripaient. C'était il y a quelques mois, une éternité en politique. Après avoir expliqué aux Français combien Nicolas Sarkozy incarnait si mal les intérêts et les valeurs du pays, après s'en être pris à lui méthodiquement et sans retenir ses coups depuis la campagne de 2007, François Bayrou a coupé ses griffes.

Le 22 avril dernier, il a passé une heure et demi dans le bureau élyséen de son ennemi juré et en est ressorti le sourire aux lèvres et le discours changé. Illustration dimanche dernier sur les ondes de RTL. Le patron du Modem en appelle au rassemblement et surtout, distribue ses bons points au gouvernement. Il salue d'abord la décision de Nicolas Sarkozy relative à l'inscription de l'interdiction des déficits dans la constitution, une mesure qu'il avait lui-même promis d'appliquer s'il était élu en 2007. Il s'est ensuite prononcé en faveur de la loi d'interdiction du voile intégral en France. Enfin, il a expliqué qu'il pourrait voter la réforme des retraites actuellement en cours de préparation par le gouvernement.

Quel changement de ton en quelques mois ! Un véritable virage pour celui qui, l'été dernier, envoyait sa numéro 2 Marielle de Sarnez s'afficher avec le communiste Robert Hue, le socialiste Vincent Peillon et l'écolo Daniel Cohn-Bendit pour une nouvelle union de la gauche et du centre. On en est bien loin aujourd'hui. Non seulement François Bayrou a arrêté de taper sur Nicolas Sarkozy mais il se retourne désormais contre Martine Aubry qui a osé évoquer l'escroc Bernard Madoff en parlant du chef de l'Etat.

Le retour de François Bayrou dans le giron de la droite a été apprécié par les proches de l'Elysée: «il ne nous insulte plus, c'est déjà une formidable victoire», note l'un d'eux.

Le leader centriste reviendrait donc à ses premières amours, comme au bon vieux temps où il côtoyait Nicolas Sarkozy au sein du gouvernement d'Edouard Balladur. Ce glissement progressif résulte de deux analyses croisées de la situation. Celle de François Bayrou et celle de Nicolas Sarkozy. Tout d'abord, Bayrou a été contraint de faire un constat sans appel: le Parti socialiste ne veut visiblement pas de lui, en tout cas, celui de Martine Aubry qui privilégie la gauche du PS à une alliance avec des centristes qui ne pèsent actuellement plus grand chose. Car entre temps, la dure réalité des élections régionales est passée par là et les 4% obtenus par les listes Bayrou ne rendent pas celui-ci très attractif sur le marché politique. Le chef d'un Modem déserté par ses élus le sait bien.

S'il veut survivre, il n'a d'autre choix que de se rapprocher de l'UMP. D'où son changement d'attitude des derniers jours. Mais le hasard ne fait pas trop mal les choses pour lui: il décide de s'adoucir au moment où Nicolas Sarkozy s'est convaincu que Bayrou était finalement le seul à pouvoir satisfaire un électorat centriste. Décidé à obtenir le plus haut score possible au premier tour de la prochaine présidentielle, le Président de la République veut éviter les petites candidatures centristes du type Borloo ou Hervé Morin.

Il se dit que finalement, François Bayrou, qui, quoi qu'il arrive se représentera, est le mieux à même pour capter les voix centristes dont il aura besoin pour un second tour. Le rapprochement qui s'opère actuellement est donc une somme d'intérêts bien compris entre les deux hommes.

Si le jeu est sans dangers pour Nicolas Sarkozy, il l'est, en revanche, pour François Bayrou qui risque, une fois de plus, de passer pour une girouette.

Ariane Istrati

Photo: Bayrou et Sarnez aux funérailles de Philippe Séguin en janvier 2010. Charles Platiau/REUTERS

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