Fin décembre, une coalition de cinq partis formait le nouveau gouvernement de la République tchèque, en réponse à la défaite essuyée par le Premier ministre et milliardaire Andrej Babiš aux législatives d'octobre.
Mais la nouvelle coalition, dirigée par le démocrate Petr Fiala, ancien ministre de l'Éducation, de la Jeunesse et des Sports, pâtit déjà des révélations du média économique de centre-droite Hospodářské Noviny, selon lequel les nouveaux ministres auraient, globalement, un niveau d'anglais médiocre.
Ces révélations sur les faibles compétences linguistiques des nouveaux dirigeants politiques du pays n'ont pas manqué de susciter des inquiétudes quant à l'exercice de leurs responsabilités face aux politiciens étrangers, et surtout au niveau européen, l'anglais demeurant la langue de travail de l'Union européenne, et la Tchéquie devant assumer la présidence tournante de l'UE à partir de juillet.
Comment parler avec l'Europe?
C'est en cherchant à savoir si l'engagement de la coalition SPOLU («ensemble», en tchèque), qui affirmait «veiller à ce que chaque membre du gouvernement connaisse au moins une langue étrangère qu'il peut facilement parler», avait été respecté, que le média tchèque a découvert les lacunes de plusieurs ministres occupant des postes clef.
Sur dix-huit ministres, cinq ont admis ne posséder qu'un «niveau touristique», ou un petit niveau d'anglais, et ont déclaré s'en remettre à des traducteurs lors des réunions européennes. D'autres ministres ont assuré que leur anglais de travail était fiable, comme Jan Lipavský, le nouveau ministre des Affaires étrangères, dont le président tchèque Miloš Zeman avait tenté –en vain– de bloquer la nomination au motif qu'il n'était pas qualifié sur le plan académique.
Parmi celles et ceux qui ont reconnu n'avoir qu'un faible niveau d'anglais, se trouvent Jana Černochová, la ministre de la Défense, qui devra assister aux sommets de l'OTAN, ainsi que le ministre des Finances, Zbyněk Stanjura, qui devra présider le Conseil pour les affaires économiques et financières (ECOFIN) de l'Union européenne. Ils ont toutefois affirmé tous deux maîtriser les langues polonaise et russe.
En dépit de la sortie de la Grande-Bretagne de l'UE, la langue anglaise restera la langue de communication et de travail au sein de l'Union, aussi l'incapacité des ministres tchèques à communiquer avec leurs pairs dans cette langue risque d'isoler le nouveau gouvernement, de nuire à la politique européenne tchèque, et d'alimenter un certain euroscepticisme.
«Nous avons des gens qui veulent être députés ou occuper des fonctions publiques et qui ne prêtent pas suffisamment attention à leurs compétences linguistiques», relève Petr Kaniok, professeur associé spécialisé dans les affaires européennes à l'université Masaryk de Brno. «C'est surprenant car plus de trente ans se sont écoulés depuis la révolution de velours, et les personnes qui occupent des fonctions publiques ont environ la cinquantaine, elles ont donc eu suffisamment de temps pour préparer une formation linguistique», ajoute-t-il.