Comme tous les ans, la très sérieuse revue médicale BMJ publie un numéro spécial Noël dont le maître-mot est «l'originalité»: «Nous ne voulons rien publier qui ressemble à ce que nous avons déjà publié, précise son comité éditorial. Si les sujets légers et satiriques sont les bienvenus, nous ne publions pas de parodies, de canulars ou d'études fabriquées de toute pièce.»
C'est dans ce contexte qu'une équipe de neuroscientifiques, dirigée par Inga Usher de l'hôpital national de neurochirurgie et de neurologie de Londres, a décidé de mettre la langue anglaise à l'épreuve des faits. Le but, vérifier si les expressions «It's not rocket science» et «It's not brain surgery» –soit, littéralement «ce n'est pas de l'ingénierie aérospatiale» et «ce n'est pas de la neurochirurgie», que le français, prouvant une nouvelle fois son romantisme, traduit en «ce n'est pas sorcier»– avait une quelconque réalité empirique.
Six aspects cognitifs
Pour ce faire, ils ont tout simplement soumis une palanquée de neurochirurgiens et d'ingénieurs de l'aérospatiale (72 pour les uns et 329 pour les autres) à des tests d'intelligence et ont comparé leurs résultats à ceux de 18.257 anglais comme vous et moi (pour peu, bien sûr, que vous ne fassiez pas profession de découpe de cervelles ou de construction de fusées).
Tous les participants allaient devoir passer, en ligne, un test dûment validé mesurant six aspects cognitifs (ou domaines) distincts, dont la planification, le raisonnement, la mémoire de travail, l'attention ou encore le traitement des émotions. Pour obtenir les conclusions les plus objectives possibles, des facteurs connus pour biaiser de tels résultats –le genre, le fait d'être gaucher ou droitier, le nombre d'années d'expérience dans son domaine de spécialité– ont été pris en compte dans l'analyse finale.
D'où il ressort que, non, les neurochirurgiens et les ingénieurs de l'aérospatiale ne sont pas significativement plus intelligents –en moyenne– que le commun des mortels. En revanche, chaque discipline a son champ d'excellence, les ingénieurs étant des cadors pour tout ce qui touche à la rotation mentale, là où les neurochirurgiens savent résoudre des problèmes sémantiques comme pas deux, tout en étant un peu plus lents sur le plan de la mémoire.