Culture

La série «What If…?» de Marvel laisse un peu sur sa faim

Temps de lecture : 4 min

On est vaguement déçu qu'un si gros potentiel ne soit pas mieux exploité.

Les fans regrettent que les épisodes ne fassent encore que trop peu de pas en direction de la représentation féminine. | Capture d'écran via YouTube 
Les fans regrettent que les épisodes ne fassent encore que trop peu de pas en direction de la représentation féminine. | Capture d'écran via YouTube 

La nouvelle série animée de Marvel What If…? se base sur un alléchant postulat: «Et si» les grands événements de l'univers cinématographique Marvel (MCU, pour les initiés) s'étaient passés différemment?

Et si, par exemple, Steve Rogers n'était jamais devenu Captain America? Et si T'Challa, au lieu de devenir la Panthère noire, était devenu Star-Lord à la place de Peter Quill? Sur le papier, c'est un sympathique moyen d'explorer les univers multiples esquissés par Loki et même Spider-Man: New Generation. Cependant, en pratique, la série est un verre à moitié plein –ou peut-être à moitié vide.

Mixité mitigée

Les deux épisodes résument parfaitement les deux revers de cette médaille. Le premier: «Et si... Captain Carter était devenu le premier Avenger?» propose un univers où c'est Peggy Carter, l'amoureuse de Steve Rogers, qui reçoit le sérum de super-soldat à sa place. Les péripéties qui s'ensuivent sont chouettes –voir Peggy régler leur compte à tout un tas de nazis mettra la larme à l'œil de quiconque regrette l'Agent Carter– mais sonnent aussi curieusement creux. Un des fléaux qui affligent l'univers Marvel est son manque de super-héros féminins (seuls Captain Marvel et La Veuve noire sont centrés sur des femmes) et regarder Peggy prendre la place de Captain America ne fait que souligner à quel point elles sont rares à se retrouver au premier plan. La nature temporaire du statut de capitaine de Peggy ne rend cette prise de conscience que plus aigre-douce.

Les fans ont également souligné que bien que What If…? fasse un minuscule pas en direction de la représentation d'une super-héroïne dans une réalité hypothétique, mettre une Blanche à la place de Steve Rogers a un côté étrangement régressif dans la mesure où dans la chronologie originelle, Captain America est désormais un homme noir.

Ce qui ne signifie pas que Cap devrait être l'un ou l'autre –mais plutôt que l'univers Marvel aurait tiré profit d'une plus grande inclusivité dès le départ, plutôt que d'obliger les héros non perçus à la base comme des hommes blancs à essayer de se glisser en douce une ou deux fois sur le devant de la scène.

Une Panthère noire plus cool

«Et si...T'Challa était devenu Star-Lord?» relève mieux le défi de son postulat de départ, car son hypothèse de base, plus excentrique, lui donne davantage l'apparence d'une BD parmi d'autres que d'un épisode jetable. Le second épisode adopte le genre de rythme qu'il convient de prendre quand on peut se permettre de faire ce qu'on veut avec ces personnages tant aimés, sans avoir aucune conséquence à assumer. Par exemple, cet épisode transforme Thanos en une sorte de gentil grincheux, qui se laisse convaincre par T'Challa d'abandonner son projet d'Infinity War.

C'est aussi une exploration plus intéressante du personnage de T'Challa. Comme le souligne Charles Pulliam-Moore du site io9, dans les BD et, dans une certaine mesure, dans le MCU, l'opposition entre la responsabilité du personnage de T'Challa induite par son statut de chef du royaume du Wakanda et son envie d'explorer le reste du monde engendre chez lui un conflit intérieur. Ici, cela se manifeste d'une manière différente dans la mesure où T'Challa ne fait que commencer à prendre en compte son passé et son héritage.

Le second épisode est aussi une exploration plus intéressante du personnage de T'Challa.

Il est permis à ce T'Challa d'être un peu plus détendu et désinvolte, et cet épisode sert également d'adieu doux-amer au personnage. À moins que Marvel ne décide d'entreprendre ce que Disney a fait avec Carrie Fisher et Peter Cushing dans L'ascension de Skywalker et Rogue One, c'est la dernière fois que nous verrons Chadwick Boseman incarner la Panthère noire (enfin, que nous l'entendrons).

L'épisode semble aussi comporter de plus vastes ramifications au moins pour cette version du MCU, puisque nous voyons le méchant Ego, autrefois contrecarré par la version Chris Pratt de Star-Lord, se confronter à son fils tout ce qu'il y a de plus normal et sans le moindre pouvoir. En outre, le fait que T'Challa retourne au royaume de Wakanda une fois adulte, accompagné des Ravageurs, signifie que non seulement le pays secret s'ouvre à la Terre mais également à tout le reste de la galaxie.

Avenir incertain

On peut se demander à présent si la série va continuer d'essayer de raconter des histoires intéressantes ou si elle va capituler devant les mêmes exigences que celles des autres séries Disney de Marvel, et prendre une direction moins excitante afin de mieux s'adapter au cadre plus large du MCU. Un rapide coup d'œil à ce qu'il y a en stock laisse entendre que les deux possibilités sont envisageables –les bandes annonces montrent des chemins qui convergent (Captain Carter, par exemple, rencontre le Docteur Strange), mais il y a également des choses très bizarres, comme des versions zombies de Captain America et d'Iron Man, et aussi une tête qui parle dans un bocal.

Et puis, évidemment, il y a la question de savoir si What If…?, malgré sa nature spéculative, fera un jour partie intégrale du MCU officiel. Le concept d'univers multiples est désormais intégré au scénario principal; il y a tout ce que présuppose le titre du futur Doctor Strange in the Multiverse of Madness, et le prochain Spider-Man devrait introduire au moins un personnages des frasques d'Andrew Garfield et Tobey Maguire.

Il y a donc une chance que nous voyions une partie de ces univers alternatifs s'y déployer. Mais la question est: vont-elles réellement apporter quelque chose au MCU, ou bien cette question toujours si puissante: «Et si?», serait-elle finalement une interrogation vide de sens?

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