Au cours des dernières décennies, des voix se sont élevées pour dénoncer les violences sexuelles et sexistes partout dans le monde. Malgré l'onde de choc provoquée par #MeToo et les mobilisations féministes à travers le monde, force est de constater que les États n'ont pas pris les mesures adéquates pour s'attaquer aux racines systémiques du problème, de même qu'ils sont encore trop nombreux à continuer d'ignorer les violences qui touchent les femmes (cis et trans), les personnes trans et non binaires. Ce n'est pas acceptable. Tant que les gouvernements n'auront pas agi de manière concrète, le système patriarcal violent continuera de prévaloir, infligeant au passage des souffrances injustifiables aux femmes (cis et trans) et à toutes les personnes trans et non binaires.
La France a décidé d'accueillir le Forum Génération Égalité le 30 juin et se présente comme une championne de l'égalité de genre. Dimanche, Emmanuel Macron s'est proclamé «profondément féministe». Or, à une semaine de l'ouverture du Forum, le président n'a jamais reçu les organisations féministes. Quatre ans après l'annonce de l'égalité femmes-hommes en tant que «grande cause du quinquennat», les féministes françaises attendent toujours que des efforts concrets soient faits pour lutter contre tous les types de violences basées sur le genre, à commencer par les féminicides. En effet, rien ne pourra changer tant que les discours ne seront pas accompagnés d'une augmentation significative des financements.
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La plupart des organisations féministes considèrent le manque de ressources financières comme leur principal contrainte. Un récent rapport de l'OCDE montre que les organisations de défense des droits des femmes ne reçoivent que 0,1% du total de l'aide publique au développement et 0,4% de l'ensemble de l'aide liée au genre. Les groupes travaillant sur des formes croisées de discriminations (LGBTQI+, femmes autochtones, jeunes féministes et travailleur·euse·s du sexe/personnes prostituées) sont encore moins financés.
En revanche, des fonds colossaux sont alloués à des programmes ultraconservateurs et fondamentalistes dont le but est de contrer les droits des femmes et des personnes LGBTQI+, en favorisant les situations de violence. Il faut savoir, par exemple, que le mouvement «anti-genre» a été financé à hauteur de plus de 3,7 milliards de dollars US entre 2013 et 2017. C'est trois fois plus que le financement des groupes LGBTQI+ ces mêmes années. Il est grand temps pour les gouvernements de revoir leurs priorités.
C'est la raison pour laquelle Nous, féministes de France, rejoint·e·s par d'autres organisations et réseaux de différents pays, attendons plus que des mots sur le «multilatéralisme renouvelé». L'annonce du président Macron d'accueillir le Forum Génération Égalité a créé de grandes attentes, non seulement de la part des Français·es, mais aussi des féministes du monde entier. Les gouvernements et leaders politiques ne doivent pas quitter Paris le 2 juillet sans engagements financiers forts.
Il n'existe pas de mots magiques qui permettraient de résoudre le problème des violences sexuelles et sexistes. Les bonnes intentions ne suffisent pas face à cette «pandémie de l'ombre». Si chaque gouvernement allouait au moins 0,1% de son PIB à la lutte contre les violences sexuelles et sexistes, les pays se positionneraient sur une voie plus réaliste pour y mettre fin et atteindre l'égalité des sexes.
Les 23 et 24 juin, Nous, féministes du monde entier, serons réuni·e·s une fois de plus pour interpeller les gouvernements. Depuis des siècles, nous luttons pour que la violence cesse. Les gouvernements ne peuvent plus nier notre droit à vivre dans un monde exempt de violences basées sur le genre. Il est maintenant temps d'investir pour un réel changement –d'arrêter de discourir et de financer de façon conséquente et importante. En d'autres termes: «Stop talking, start funding!»
Mercredi 23 et jeudi 24 juin se tient ce Tour du monde féministe, accessible ici en ligne.