Économie

La Bourse croit voir le bout du tunnel

Temps de lecture : 3 min

Ce ne serait pas la première fois que le marché prend ses désirs pour la réalité.

Un trader regarde le tableau des indices boursiers sur le parquet du New York Stock Exchange REUTERS/Shannon Stapleton
Un trader regarde le tableau des indices boursiers sur le parquet du New York Stock Exchange REUTERS/Shannon Stapleton

Cinquième séance de hausse à la Bourse de Paris, lundi 16 mars le CAC 40 a gagné 3,18%.On dit que la Bourse est un indicateur avancé de l'économie et qu'elle donne le ton six mois à l'avance. Le rebond auquel on assiste depuis une semaine sur les indices boursiers est-il alors annonciateur d'un tournant de la crise pour septembre-octobre ? Alors que les plus optimistes parmi les économistes ou les gouvernements ne tablent désormais que sur une reprise en 2010 au mieux, les investisseurs semblent, brutalement, devenus printaniers. Eux qui ont commencé l'année dans des perspectives les plus sombres, Wall Street a reculé de 60% par rapport à son pic d'octobre 2007, basculent d'un coup vers la position «achat», pariant que le plus bas a été atteint.

Bien fol qui s'y fierait. La vérité est que personne ne sait plus rien du fonctionnement des marchés. Il est aussi probable qu'un plancher ait été atteint que l'inverse. Voici un an pile-poil, certains nourrissaient des espoirs de rebond, aujourd'hui ils s'en mordent les doigts.

Et pourtant si... Le calcul des investisseurs est que toutes les nouvelles mauvaises et bonnes ont été intégrées dans les cours. La profondeur de la récession mais aussi la volonté des gouvernements de ne plus laisser tomber de banques de type Lehman Brothers en faillite, comme vient de le répéter Ben Bernanke, le patron de la Réserve fédérale américaine (FED); la mondialisation de la crise qui atteint la Chine comme le Brésil, mais aussi la volonté des gouvernements de relancer dans tous les pays sauf exception ; les profits des entreprises qui vont être réduits cette année, sans doute jusqu'à 35% en moyenne, mais ces entreprises qui s'y sont préparées. L'idée de base de ce scénario est que toutes les catastrophes sont maintenant anticipées. Rien ne peut plus arriver de pire. Du moins rien d'humain.

Dès lors, si le plancher est atteint, l'heure est venue de racheter. Et d'ailleurs, n'observe-t-on pas quelques bonnes nouvelles comme les retours aux profits des grandes banques américaines Citigroup, Bank of America ou JPMorgan ? Le fait que General Motors n'ait plus besoin d'un crédit relais de 2 milliards de dollars ? Ou bien encore les ventes de logements anciens en Californie qui ont cru de 50% en janvier ?

Les encouragements, en sus, viennent de haut. Jean-Claude Trichet, la semaine passée, estimait que les marchés n'avaient pas pris conscience des conséquences positives des plans de relance. Ben Bernanke qui annonce que la crise prendrait fin en 2009 et qui parle de reprise en 2010. Barak Obama lui-même s'est lancé : «les ratios de profit et bénéfices commencent être au niveau où racheter des actions devient potentiellement une bonne affaire», a dit le président américain. En mélangeant profit et prix (le ratio prix/bénéfices, PER, et non profits/bénéfices), il a soulevé des sarcasmes et des répliques qui concluent qu'il ferait mieux de s'occuper de ses affaires que de donner des conseils de bourse.

Mais des gens plus spécialisés que Barak Obama vont dans le même sens. Avec le même argument : même si la crise se prolonge au-delà de septembre-octobre, les cours sont descendus à de tels niveaux qu'il faut racheter quitte a être patient deux ou trois ans avant d'espérer un gain. Le décrié PER est à 13 aux Etats-Unis soit 20% en dessous de son niveau moyen depuis 130 ans.

Les pessimistes continuent néanmoins de tenir la corde. Les quelques rares bonnes nouvelles ne font pas le printemps. Les bilans des banques, en particulier, sont loin d'être assainis. Le marché immobilier, à l'origine de la crise, n'a pas fini de reculer. Les consommateurs américains reconstituent leur épargne au lieu de consommer et cela va durer. Quant à ce PER déjà cité, il était descendu en dessous de 6 au début des années 80.

Les économistes, dans leur grande majorité, sont plutôt en train de réviser leurs pronostics à la baisse et, plus grave, ils pensent maintenant que la sortie de crise sera longue et cahoteuse. La reprise en 2010 ne serait pas en forme de U mais de L, avec une série de faux rebonds et de vraies rechutes. Christine Lagarde a évoqué le terme de «tôle ondulée».

Acheter ? Peut être est-ce quand même en effet le moment pour les rares à qui la crise n'a pas fait renoncer définitivement au goût du risque. Etes-vous de ceux là ? Etes-vous un peu âpre au gain ? Un peu avide, cupide ? C'est le moment. L'économie a besoin de vous !

Eric Le Boucher

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