Des réseaux plus vraiment sociaux?
En 2021, on connait l’impact des réseaux sociaux sur la jeunesse. Le plus puissant d’entre eux serait sans doute la course au like. La mention j’aime s’appuie sur un mécanisme psychologique dangereux: la boucle de rétroaction. Pour résumer, plus on est liké, plus on cherchera à être liké, et ainsi de suite.
Sur Twitter, il n’y a plus de doute, la popularité d’un utilisateur fait sa légitimité. D’ailleurs, même Jack Dorseay, le CEO de Twitter, dans une conférence en 2019, au Canada, avouait regretter d’avoir mis autant en avant le like et le nombre d’abonnés. Pire, il estime que s’il devait «tout recommencer», il ferait disparaître la mention j’aime.
Sur Instagram, plus le like est important en nombre, plus il peut permettre à l’utilisateur d’acquérir un titre, voire un métier: influenceur. Là aussi, dans l’équipe dirigeante, on a l’impression de s’être fourvoyé. En 2019, Instagram avait tenté de faire disparaître le compteur de j’aime dans quelques pays. «Nous voulons qu'Instagram soit un lieu où les gens sont à l'aise avec le fait de s'exprimer. Cela implique de les aider à se focaliser sur les photos et les vidéos qu'ils partagent, pas sur le nombre de j'aime qu'ils ont», expliquait alors Tara Hopkins, directrice des politiques publiques sur Instagram.
L’être et le paraître
Cette course effrénée à une légitimation virtuelle a un second effet vicieux: puisque nous devons être aimés, likés, et surtout jugés, pouvons-nous être nous-mêmes sur les réseaux sociaux? Une étude, relayée par la revue Sociétés en 2016, insiste sur le fait que l’utilisation des réseaux sociaux ne sert qu’à renvoyer une «image positive» de soi-même, à ne montrer que les «bons côtés».
C’est la raison pour laquelle, depuis plusieurs années, de nombreux internautes ont souvent deux comptes personnels. Sur Instagram, un compte «officiel», et un “Finsta”, un compte privé, seulement suivi par les amis proches. Même technique sur Twitter, où le compte public est parfois accompagné d’un compte privé. Pour réussir à être le plus authentique, il faudrait donc se cacher.
Yubo pour «changer les codes»
Une start-up a décidé, en se lançant en 2015, de ne plus faire de ces effets pervers une fatalité, et de se fonder sur d’autres principes que le jugement et la course aux likes. Et elle séduit: Yubo, une plateforme sociale adressée aux 15-30 ans, veut «changer les codes» et compte déjà 40 millions d'utilisateurs à travers le monde, selon Le Point. Effet cocorico : l’entreprise est française!
Le slogan de Yubo résume tout: «Friends, not followers». Plutôt que la mention j’aime et la création de communautés pour la validation de l’estime de soi ou des autres, Yubo propose à ses utilisateurs «des échanges en temps réel en vidéo, audio ou à travers un chat». Et de revenir ainsi à l’utilité première de la plateforme sociale: créer du lien, faire des rencontres.
Alors qu’Instagram, Facebook et Twitter ont chacun leur mur, lieu de publication de contenus que l’utilisateur lambda consomme de manière passive, Yubo place l’échange au centre de la relation entre deux utilisateurs. Et l’authenticité est élevée en valeur cardinale.
L’échange authentique au cœur de la relation
«On crée des amitiés sincères, car on peut parler de tout: de nos journées, des cours, de nos problèmes», explique Federico, un Monégasque de 17 ans fan de cette plateforme. «C’est l’application parfaite pour créer des liens avec des gens, et faire des rencontres incroyables. On se parle tous les jours, les discussions sont fluides, on a un réel lien de confiance entre nous.»
Paul-Antoine fait partie du même groupe d’amis sur Yubo que Federico. Pour lui, Yubo balaie les effets pervers des mastodontes Facebook, Instagram, et Twitter. «Malheureusement, la course à la popularité gâche ce plaisir de partager de manière authentique», souligne-t-il, en faisant référence aux applications les plus populaires. «Tout le monde veut devenir influenceur, les abonnés et likes sont au centre de l’attention. Les gens sont devenus faux et se donnent une image qui ne leur ressemble pas.»
Avec Yubo, la génération Z semble avoir trouvé le lieu idéal pour sa quête d’authenticité.
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