Le New York Times parle à la fois de malédiction et de bénédiction pour la planète. Alors que la pandémie de Covid-19 nous empêche de voyager depuis presque un an, le quotidien américain fait le bilan de cette année 2020 quasiment sans tourisme et des effets de ce phénomène sur l'environnement.
Sans surprise, avec la fermeture des frontières, les vols annulés et les bateaux de croisière restant à quai, la qualité de l'air s'est largement améliorée. Aux États-Unis, notamment, les émissions de gaz à effet de serre ont diminué de plus de 10% l'année dernière, selon un rapport publié en janvier par le groupe Rhodium, une société de recherche et de conseil. Une telle diminution n'avait pas été observée depuis 1990. Au niveau mondial, les émissions de dioxyde de carbone ont baissé de 7%, soit 2,6 milliards de tonnes.
Avec la pandémie, les animaux sauvages ont pu réinvestir des lieux désertés par les populations et les touristes. En Thaïlande par exemple, les tortues luth ont pondu, pour la première fois depuis des années, leurs œufs sur la plage de Phuket, habituellement envahie par la foule. La réduction drastique des croisières a également rendu la vie sous-marine bien plus agréable, permettant aux baleines à bosse d'Alaska d'entendre les appels de leurs semblables.
Le tourisme joue un rôle protecteur
Pourtant, dans d'autres régions du monde, la disparition des voyageurs a provoqué l'effet inverse: les braconniers ont pu agir en toute impunité. En temps normal, la présence de touristes est un puissant facteur de dissuasion, notamment en Afrique subsaharienne. «Il n'y a pas que les garde-chasses [qui jouent un rôle]», explique Jim Sano, vice-président du Fonds mondial pour la nature chargé des voyages, du tourisme et de la conservation. «Les voyageurs qui se promènent avec les guides sont omniprésents dans ces zones de chasse. Si les guides voient des braconniers avec des armes automatiques, ils le signalent.»
Les experts ont constaté une augmentation de la pêche illégale et de l'exploitation forestière illégale dans plusieurs pays, une hausse du braconnage des léopards et des tigres en Inde ainsi que des rhinocéros au Botswana, et une recrudescence de la contrebande de faucons au Pakistan. En outre, les budgets alloués à la conservation de la faune et de la flore ont été largement réduits, surtout dans les pays en développement où ils dépendent de l'économie du tourisme.
«Nous avons vu de nombreuses atteintes financières à la protection de la nature», affirme Joe Walston, vice-président exécutif de la conservation mondiale à la Wildlife Conservation Society. «Mais même là où cela ne s'est pas produit, dans de nombreux endroits, les [spécialistes] n'ont pas pu aller sur le terrain pour faire leur travail à cause de Covid.»
Si le virus du Covid-19 circule toujours, certains défenseurs de l'environnement pensent déjà à la sortie de la pandémie. «Mon espoir n'est pas que nous arrêtions de voyager dans certains de ces endroits merveilleux, car ils continueront à nous inspirer pour conserver la nature au niveau mondial, souligne Joe Walston. L'important est de reconstruire un type de tourisme qui soutient la nature.»