Depuis que le camp de Mória a pris feu en septembre dernier, au moins 7.517 demandeurs et demandeuses d'asile ont dû se déplacer dans le camp provisoire de Kara Tepe-Mavrovouni, sur l'île de Lesbos. Construit à la hâte sur une ancienne base militaire, ce camp suscite de vives inquiétudes quant au risque d'exposition au plomb.
Sous la pression des organisations humanitaires présentes sur le site, le gouvernement avait dû mener en novembre dernier des analyses sur le sol du camp de Kara Tepe, dont il a rendu public un rapport le 27 janvier. Ce dernier confirme la présence de niveaux de plomb élevés dans certaines zones, en particulier au niveau d'un ancien champ de tir de 21.000 mètres carrés, sur lequel avaient d'abord été installés des campements, désormais retirés.
Des seuils largement dépassés
Selon Human Rights Watch (HRW), le gouvernement tend à «minimiser» les risques de contamination au plomb, et l'ONG demande à ce que des tests plus approfondis soient effectués en différents endroits.
Sur les douze échantillons de sol dont les résultats d'analyses ont été publiés, l'un a révélé la présence de 2.233 milligrammes de plomb par kilogramme. Or en Grèce, la limite normale pour les zones résidentielles se situe à 500 milligrammes par kilogramme.
D'après le gouvernement, cet échantillon a été prélevé dans une zone «administrative» dédiée aux humanitaires, et ne présenterait donc aucun risque significatif, dans la mesure où il ne concerne pas une zone résidentielle. Les autorités ont affirmé qu'une série de mesures serait prise pour atténuer les risques de contamination, notamment par l'ajout de nouveaux sols.
Les ONG demandent des mesures d'urgence
Ces déclarations sont insuffisantes pour Human Rights Watch, qui relève que plusieurs demandeurs et demandeuses d'asile sont amenées à faire la queue au niveau de l'ancien champ de tir afin d'accéder aux services des ONG. HRW soutient que les résident·es doivent être informé·es des risques sanitaires liés à l'exposition au plomb.
«Les mesures de test et de transparence sont incroyablement importantes et vont dans la bonne direction. Cela dit, nous sommes profondément préoccupés par le fait que le gouvernement sape cette transparence en déformant ce que les résultats montrent, et qu'il n'avertisse pas les résidents du camp et les travailleurs humanitaires des risques qu'ils continuent à courir dans le camp», a déclaré Belkis Wille, chercheuse au service Crises et conflits de Human Rights Watch.
Le camp de Kara Tepe compte par ailleurs plus de 2.550 enfants, dont plusieurs ont été aperçus en train de jouer sur l'ensemble du site. Alors que le seuil acceptable de plomb dans les terrains de jeu grecs est de 100 milligrammes par kilogramme, l'ONG demande à ce que des tests soient effectués d'urgence sur l'ensemble du camp.
Pour Belkis Wille, la Commission européenne, qui a apporté une aide financière importante au camp de Lesbos, devrait faire pression sur les autorités grecques pour qu'elles se saisissent véritablement du problème.