Économie

Le ciel européen victime du principe de précaution

Temps de lecture : 2 min

La décision générale d'interdiction de voler était-elle plus motivée par la crainte que par la science?

Les dommages économiques sont estimés supérieurs à ceux des attentats du 11 septembre 2001. Quatre jours d'interdiction totale du transport aérien en Europe ont désorganisé la vie et la circulation de plusieurs millions de personnes, coûté déjà plus d'un milliard d'euros et fait peser un doute sur cette décision plus justifiée par le principe de précaution que par des analyses techniques précises.

On n'imagine pas, en effet, une situation de même nature, aux Etats-Unis, en Asie ou ailleurs. Le Président russe a d'ailleurs su passer entre les cendres pour faire le voyage de Cracovie. Les compagnies aériennes ont été autorisées à faire voler leurs avions à vide pour regagner, sans dommages, leurs parkings et si le volcan islandais Eyjafjallajokull continue son activité, il y a fort à parier qu'on trouvera le moyen de reprendre les vols commerciaux, tant le sens de la mesure semble étranger à cette décision.

Il faudra alors rendre des comptes et démontrer la dangerosité, contestée par les pilotes, de voler dans ces circonstances exceptionnelles, pourtant déjà connues ailleurs et justifier le bien-fondé d'une décision générale d'interdiction, plus motivée par la crainte que par la science. Le vrai coupable serait-il ce fameux principe de précaution, ce symbole de la peur qui terrifie les décideurs et transfère toute la responsabilité sur une puissance publique qui n'en peut mais?

Si, dans l'avenir, nous devons faire face à des phénomènes naturels de plus en plus imprévisibles, nous aurons surtout à lutter contre l'amplification dramatique que constitue le principe de précaution. Beaucoup de décisions seront prises qui accroîtront cette caractéristique bien européenne de l'aversion au risque, qu'a si bien identifiée Zaki Laidi dans une étude Ceri-Garnet-CNRS de février 2010.

Si l'Europe veut affronter le XXIe siècle avec succès, elle doit réapprendre à mieux gérer le risque, sérieusement et en commun, voire à l'aimer et à en diffuser la culture, de l'entrepreneur individuel au ministre, du pilote au contrôleur aérien, c'est-à-dire à donner l'envie de prendre des responsabilités individuelles. Et, pour cela, éviter toute décision qui pourrait apparaître comme trop rapide, insuffisamment justifiée, voire arbitraire.

Jean-Dominique Giuliani

LIRE EGALEMENT SUR LE MEME SUJETQu'est-ce qu'un nuage de cendres?Eyjafjallajokull n'est pas TchernobylQuand le principe de précaution devient un risque et La société française refuse le risque.

Photo: L'aéroport Schoenefeld de Berlin Thomas Peter / Reuters

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