Ne serait-il pas merveilleux de pouvoir complètement s'immerger dans un film, en sentant les différentes odeurs dont il y est question? Si nous utilisons notre ouïe et notre vue devant la télévision, notre odorat est laissé de côté. Il nous faut alors, par exemple, imaginer les odeurs qui s'échappent des cuisines des multiples émissions culinaires. Pourquoi n'est-il toujours pas possible de sentir ce qui se passe sur notre écran?
Le désir d'améliorer une expérience grâce à la diffusion d'odeurs n'est pas récent. Selon un poème de l'Antiquité, les Grecs appliquaient des huiles parfumées sur les ailes de colombes ensuite lancées parmi les invités pendant les festins, afin de diffuser une odeur agréable pour les convives. Plus récemment, en 1916, un propriétaire de cinéma avait parfumé d'une huile de rose la salle dans laquelle était diffusé le Rose Bowl, un match universitaire de football américain annuel et très prestigieux. Quelques années plus tard, en 1939, est créé Smell-0-Vision, un système présenté lors de l'Exposition universelle de New York. Ce projet, par la suite avorté, consistait à diffuser des odeurs dans les salles de cinéma, afin que le public puisse sentir ce qui se passe dans le film.
Le cinéaste Frederik Duerinck souhaite quant à lui prochainement commercialiser un collier capable de délivrer une odeur spécifique selon les demandes des clients. Il sera alors possible de programmer son accessoire pour qu'il diffuse certaines odeurs lors des moments-clés d'un film. Le projet est toutefois encore loin d'être prêt pour la vente.
Trois problèmes majeurs
Alors même que les innovations high-tech envahissent le monde du divertissement, trois problèmes principaux nous empêchent de sentir ce que nous voyons.
Le premier obstacle est biologique. En effet, il reste encore difficile de complètement comprendre comment fonctionne notre odorat. En 1991, deux scientifiques, Linda Buck et Richard Axel, récompensés en 2004 du prix Nobel de physiologie ou médecine, ont découvert que notre sens olfactif s'appuie sur environ 1.000 gènes différents, soit 3% de notre génome. Néanmoins, parvenir à comprendre la façon dont une odeur active nos récepteurs olfactifs est encore complexe.
Le deuxième problème est davantage culturel. Selon Olivia Jezler, chercheuse à l'Université du Sussex, «l'odorat est considéré comme le sens le moins important. Il est par conséquent moins étudié que les autres.» Cependant, la crise du Covid-19 ayant réaffirmé l'importance de la recherche sur l'odorat, l'experte espère voir de nouveaux travaux émerger dans les années à venir.
Enfin, une difficulté considérable pour celles et ceux qui voudraient réussir à transmettre des odeurs à travers les écrans est financière. Installer des diffuseurs d'odeurs dans des cinémas ou commercialiser des diffuseurs portatifs est extrêmement coûteux, la demande étant encore trop faible.