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La petite tradition des vice-présidents candidats

Temps de lecture : 3 min

Quatre ans après avoir quitté la Maison-Blanche, Joe Biden espère la retrouver en occupant cette fois-ci le Bureau ovale.

Joe Biden. | Drew Angerer / Getty Images North America / AFP
Joe Biden. | Drew Angerer / Getty Images North America / AFP

Joe Biden va-t-il devenir le 46e président américain? Ou viendra-t-il compléter la longue liste des anciens vice-présidents ayant échoué dans leur tentative de s'emparer du Bureau ovale?

Sur les quarante-huit vice-présidents que les États-Unis ont connus, ils sont plusieurs à avoir tenté leur chance en solo plus tard. Mais seuls cinq d'entre eux ont ensuite été élus: John Adams, Thomas Jefferson, Martin Van Buren, Richard Nixon et George H. W. Bush.

C'est John Adams qui avait lancé cette petite tradition en 1796. Vice-président de George Washington pendant huit ans, Adams était ensuite devenu le deuxième président américain de l'histoire.

Quatre ans plus tard, Thomas Jefferson, son vice-président, lui avait succédé en se présentant contre lui. Les deux hommes étaient les représentants de deux partis différents, mais jusqu'en 1804 et l'adoption du XIIe amendement, le candidat arrivé en deuxième position au collège électoral était élu vice-président, et pas nécessairement le colistier du candidat vainqueur. Par une série de manœuvres politiques malheureuses venues de son propre camp, John Adams ne vit pas son colistier arriver en seconde position lors de l'élection de 1796, mais Thomas Jefferson.

Après quatre années tumultueuses, Jefferson prit donc sa revanche et devint le troisième vice-président consécutif à devenir président en 1800.

Il faut ensuite attendre 1836 pour retrouver trace d'un vice-président élu à la présidence avec Martin Van Buren qui avait succédé à Andrew Jackson, malgré la stratégie du parti adverse qui avait tenté d'envoyer plusieurs candidats pour le battre.

John Cabell Breckinridge avait mis fin à cette série de succès en 1860, devenant le premier vice-président candidat sur un ticket majeur à être battu. Il avait alors perdu contre un certain Abraham Lincoln.

La tradition s'est ensuite un peu perdue entre le milieu du XIXe siècle avec la tentative de Breckinridge et le milieu du XXe siècle quand Henry Wallace, vice-président de 1941 à 1945, a tenté de devenir président sous l'étiquette du parti progressiste lors de l'élection présidentielle de 1948. Dans une course à quatre, il n'avait recueilli qu'un pourcent des suffrages et aucun vote des grands électeurs.

Le sort d'un vice-président et la popularité de son président

Richard Nixon est, lui, un cas à part: il est le seul vice-président à avoir été élu président après avoir perdu. En 1960, le candidat républicain avait été battu par John Kennedy, alors qu'il sortait de huit ans de vice-présidence, aux côtés de Dwight Eisenhower. Huit ans plus tard, il est cependant devenu le premier vice-président à devenir président après avoir quitté la Maison-Blanche. Ironie de l'histoire, c'était à l'issue d'une élection gagnée contre le vice-président sortant Hubert Humphrey.

Parmi les raisons de ce revirement, Joel K. Goldstein, auteur de plusieurs livres sur la vice-présidence américaine, explique à TIME que «l'une des choses à avoir aidé Nixon était qu'avec le temps qui avait passé, Nixon pouvait se présenter comme une personne à part entière et pas que comme le numéro deux d'Eisenhower». Entre-temps, Nixon avait connu une petite traversée du désert après avoir perdu la course pour le poste de gouverneur de Californie.

Mais affronter Humphrey était aussi un avantage pour lui. «Si un vice-président sert sous un président impopulaire, il hérite de ses casseroles, continue Joel K. Goldstein. C'était un problème d'Hubert Humphrey en 1968 avec la guerre du Vietnam et c'était le même problème pour le Démocrate Walter Mondale en 1984, quand Ronald Reagan pouvait se présenter contre lui et le blâmer pour les taux d'intérêt et la crise des otages en Iran.»

Depuis Mondale, deux autres vice-présidents ont tenté leur chance. Après huit années passées comme vice-président de Ronald Reagan, George H. W. Bush lui avait succédé dans le Bureau ovale en 1989 après avoir facilement battu le Démocrate Michael Dukakis. À ce jour, il est le dernier vice-président à avoir été élu. À l'inverse de vice-présidents qui ont dû traîner comme un boulet le bilan de leur président, Bush avait pu se servir de la popularité de son ancien colistier comme d'un tremplin exceptionnel. «George Bush s'est présenté, pour l'essentiel, sous l'angle d'un troisième mandat pour Reagan», explique NPR.

Pour autant, le sort d'un vice-président à la présidentielle n'est pas lié à la popularité de son président. En 2000, le Démocrate Al Gore avait été battu de justesse dans le collège électoral par George W. Bush, malgré une victoire dans le vote populaire. Au même moment, Bill Clinton était crédité de près de 60% d'opinions favorables dans le pays.

En 2016, Joe Biden avait préféré ne pas se lancer dans la course, touché par la mort de son fils, Beau. Quatre ans plus tard, il se rapproche grandement de la victoire.

Retrouvez l'actualité de la campagne présidentielle américaine chaque mercredi soir dans Trump 2020, le podcast d'analyse et de décryptage de Slate.fr en collaboration avec l'Ifri et TTSO.

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