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L'Hôtel Barrière Le Majestic Cannes, un grand hôtel en mouvement

Temps de lecture : 11 min

L'établissement de Dominique Desseigne est une œuvre permanente, un chantier pour l'histoire.

L'Hôtel Barrière Le Majestic Cannes. | Pascal Pronnier
L'Hôtel Barrière Le Majestic Cannes. | Pascal Pronnier

À Cannes, Dominique Desseigne, le président du groupe Barrière, a pris des initiatives décisives pour le devenir du palace créé en 1925 par Henri Ruhl, également acquéreur du Carlton.

En 1926, déjà 250 chambres avec salles de bains et escalier de marbre –c'est François André qui le développera avec son neveu Lucien Barrière, excellent gestionnaire. Il forgera la destinée du groupe éponyme, secondé par son épouse Martha puis par leur fille Diane tragiquement disparue en 2001. Son mari Dominique Desseigne, ancien notaire, père de leurs deux enfants Alexandre et Joy, dirige le groupe en plein essor: un charmant hôtel Barrière vient d'ouvrir à Saint-Barth, le Carl Gustaf.

À L'Hôtel Barrière Le Majestic Cannes, une chambre avec vue. | Fabrice Rambert

Un grand hôtel, c'est une œuvre permanente, un chantier pour l'histoire: la façade Belle Époque et Années folles au Majestic racontent son passé. Le monument cannois des années 1920-1930 a connu de nombreuses extensions: quarante chambres de plus en 1999, une piscine aux mosaïques de Murano et un jardin terrasse le long de la Croisette.

En 2006, Dominique Desseigne, en charge de la vie du groupe hôtelier et casinotier, décide le rachat à Banque de France de l'aile droite du Majestic vite transformée en quatre-vingts chambres et suites (remarquable ajout). Le palace forme ainsi un site fermé, superbe bâtiment blanc aux trois parties ouvertes sur la mer, la piscine, le jardin, le restaurant, les bars en bordure de la Croisette.

Excellent connaisseur des lieux de vie, Dominique Desseigne a inventé la nouvelle allure, la beauté vraie du Majestic cher à Jean Dutourd, à Jean Todt et à Sophie Marceau.

La synergie n'est pas un vain mot

En plus de ce projet architectural bien pensé, rénové, le Majestic des années 1980-1990 a bénéficié de la création du nouveau Palais des Festivals (1982) bordé du fameux tapis rouge souhaité par l'ancien maire Georges-Charles Ladevèze. Le Palais est situé presque en face du grand hôtel Barrière, lequel va devenir l'épicentre de la manifestation cannoise de mai, le quartier général des festivalièr·es, là où il faut voir et être vu·e.

Ainsi le Majestic peut-il rivaliser avec le Carlton et le Martinez et profiter de ce site privilégié au début de la Croisette, se forger une forte notoriété liée à la couverture presse, radio, télévision du festival cinématographique: 8.000 personnes occupent le grand hôtel pendant le festival, soit 30% de la recette annuelle. On imagine les déboires des contrôleurs de gestion à l'annonce de l'annulation du festival en mai 2020: une perte pour la ville de 200 millions d'euros, a-t-on dit.

Oui, le Majestic a beaucoup progressé en valeur, en image de marque grâce à la fête annuelle du septième art: une centaine d'émissions de télévision, 200 de radio, 80 emplacements publicitaires. Et nombre de stars logées dans les grandes suites du Majestic au septième étage, l'une dotée d'une piscine.

Boostée par la manifestation cannoise –30.000 personnes sur la Croisette–, le grand hôtel Barrière devient la destination new look, à la mode pour toutes les classes sociales aisées, celles qui fréquentent aussi les hôtels du groupe à Deauville, Dinard, La Baule: magnifique restauration de l'Hermitage baulois et du Royal à la thalasso exemplaire sur l'océan.

Bref, la synergie dans le groupe de casinos et d'hôtels n'est pas un vain mot, il y a une notable fidélité de la belle clientèle à ces destinations de classe maintenues en bon état, le PDG Desseigne y veille en personne. Il passe tout l'été au Majestic.

Le Michelin a bien vu la puissance et la valeur du groupe. À Cannes, le Majestic est classé à la première place des grands hôtels de la cité du cinéma devant le Martinez et le Carlton avant les formidables travaux à venir.

C'est bien pourquoi cet été 2020, en dépit de la crise sanitaire, le Majestic a réalisé une belle saison estivale, au-delà de 80% de taux d'occupation en août grâce à la clientèle française. Jamais la vaste plage du Majestic n'a été autant envahie l'après-midi par une foule de gens dont les plus chanceux parvenaient à s'allonger sur la centaine de matelas installés sur la grande passerelle du ponton: le farniente en pleine mer.

L'arrière-saison, septembre et octobre, si agréable après le rush des aoûtien·nes, promet une bonne fréquentation. Pierre-Louis Renou, directeur général du Majestic, offre dès le 1er septembre un sur-classement en chambre vue sur mer, le petit déjeuner, un transat sur la plage et un accès au Spa Diane Barrière au premier étage du Majestic.

10 boulevard de la Croisette 06407 Cannes. Tél.: 04 92 98 77 00. En septembre, chambres à partir de 379 euros la nuit et petit déjeuner au lieu de 737 euros. Hors saison, chambres à partir de 199 euros avec vue sur mer. Spa à l'étage de l'hôtel. Lunch au Fouquet's à 35 euros, menu de neuf assiettes au choix à 68 euros.

Restaurants au Majestic et à la plage

Bon connaisseur de la restauration étoilée, Dominique Desseigne accorde sa confiance à des chefs de renom: Pierre Gagnaire, le grand trois étoiles de la rue Balzac à Paris (75008) prodigue ses conseils et ses recettes au Fouquet's parisien et à la succursale de Cannes. Plats sudistes: le thon rouge et caviar d'aubergines (29 euros), le bar cuit au plat (48 euros), le citron givré (14 euros). Service en terrasse.

Paradiso Nicole & Pierre

C'est le second restaurant de l'hôtel autour de la piscine. Au dîner: petits farcis à la tomate de Nicole Rubi, excellents spaghetti à l'arrabiata (24 euros), les gamberetti fritti (28 euros), le vitello tonnato (25 euros), le tiramisu (16 euros) et la sélection de délicieux sorbets (5 euros la boule). Carte de 70 à 90 euros.

Au Paradiso Nicole & Pierre, le tiramisu. | Jean-Michel Sordello

BFire by Mauro Colagreco

C'est le concept de restaurant sur le sable (B pour Barrière, Fire pour la cuisine au feu de bois) à la plage dont les plats bien tournés ont été mis au point par Mauro Colagreco, chef trois étoiles du Mirazur à Menton: salade de pastèque (19 euros), burrata di Puglia (21, 38, 69 euros), ceviche de daurade aux fruits (24 euros), maccheroni à la truffe (38 euros), tagliatelle aux palourdes (32 euros), thon de Méditerranée à l'huile de basilic (38 euros), sélection de sushis délicieux du chef japonais Shintaro Suzuki (6 euros pièce), maki à la truffe (12 euros), glaces d'anthologie, vanille, café, caramel (5 euros la boule).

Au BFire by Mauro Colagreco, côte de bœuf et pagre grillés. | Pascal Pronnier

Rosé La Gordonne (12 euros le verre). Cette carte bien composée pourrait figurer dans le Michelin.

Au BFire by Mauro Colagreco, melon grillé au feu de bois, yaourt aux graines de sésame, jambon de bœuf et thym citron. | Alban Couturier

Mademoiselle Gray

C'est le restaurant de plage du Gray d'Albion, bains de mer et bonne chère servie sur le sable. Pour commencer, au choix plusieurs sélections de mezzés libanais dont le taboulé, le caviar d'aubergine, le houmous parfait au sésame et huile (10, 29, 48 ou 74 euros) et une carte du marché: carpaccio de poulpe à la roquette (25 euros), burrata crémeuse aux pignons et courgettes (23 euros), pan bagnat de légumes, œuf bio, thon et anchois (19 euros), dorade, Saint-Pierre de Méditerranée sauce vierge (12 euros les 100 grammes) et piccata de veau aux fruits secs (29 euros), glaces et sorbets du maître glacier Géronimi (4, 8 ou 12 euros).

Au restaurant Mademoiselle Gray, la brochette de poulet. | Jean-Michel Sordello

Ouvert tous les jours de 12h à 23h et le soir dans la nuit douce. 120 places sur la Croisette presque en face de l'hôtel élégant.

Au restaurant Mademoiselle Gray, le dos de cabillaud. | Jean-Michel Sordello

Sélectionné par le Michelin 2020, l'autre grand hôtel Barrière entre la Croisette et la rue d'Antibes. Confort et haut niveau de qualité. Chambres à partir de 268 euros, petit déjeuner et deux transats à la plage Mademoiselle Gray sur la Croisette, à cent mètres du Majestic.

Le restaurant Mademoiselle Gray. | Jean-Michel Sordello

Le Martinez, pur joyau azuréen du groupe Hyatt

En cuisine, le meilleur chef de Cannes, Christian Sinicropi, deux étoiles Michelin.

Ce grand hôtel à la façade Art déco (1929) de 420 chambres et suites a obtenu en août une belle fréquentation de 80%, en juillet de 50% et La Palme d'Or a conservé la deuxième étoile méritée. Tout va bien donc pour cet immense vaisseau amarré au cœur de la Croisette, en face de sa vaste plage privée –200 matelas et un ponton très couru.

L'Hôtel Martinez. | Jean-François Romero

Le groupe Hyatt a de quoi être satisfait de l'été, d'autant que le directeur général Yann Gillet, cannois d'origine, doit mener à bien le programme de rénovation herculéen commencé en 2017 quand le mastodonte Hyatt a pris la gérance de l'ancien palace des Taittinger, propriétaires dans l'immédiate après-guerre après Emmanuel Martinez, le fondateur.

Partout où le groupe Hyatt (trois hôtels à Paris) intervient comme gestionnaire acquéreur, on fait des travaux: c'est le cas de l'Hôtel du Palais à Biarritz en instance de réouverture au printemps 2021.

En 2017 et 2018, ce fut la métamorphose du Martinez menée par le grand architecte Pierre-Yves Rochon (Ateliers Robuchon, Prince de Galles à Paris) qui a repensé tous les intérieurs. La piscine à l'entrée du grand hôtel a été remplacée par un restaurant-jardin où l'on dîne en plein air le long de la Croisette (le Jardin du Martinez).

Le Jardin du Martinez. | Jean-François Romero

Ce bistrot sudiste supervisé par le chef Sinicropi et son second Matthieu propose sur l'ardoise une pizza azuréenne (22 euros), un cru de thon rouge mimosa (24 euros), une épaule d'agneau confite (42 euros), le loup ou daurade en filet cuit à la pierre de lave (36 euros) et le délicieux tiramisu aux notes de truffe blanche (22 euros).

Au Jardin du Martinez, les rouelles d'aubergines grillées. | Jérôme Kelagopian

On sert seulement le soir aux sons des standards de jazz, de rythmes latinos et brésiliens programmés par le DJ du Martinez. C'est l'ambiance estivale du palace cher à Gérard Depardieu, fervent goûteur des plats du jour de La Palme d'Or.

Il faut dire que le Martinez a fière allure et que les éléments d'architecture moderne ont conféré au grand hôtel une élégance contemporaine, des couleurs pastel, de l'espace et une luminosité épatante.

Repenser un grand hôtel daté à notre époque est une gageure. Le Martinez n'est pas froid ni impersonnel en dépit des volumes importants (le lobby de marbre) car Pierre-Yves Rochon a aménagé les espaces avec un remarquable doigté, un sens des tonalités et une sorte d'agrément bienfaisant pour les résident·es: on se sent bien au Martinez.

Le hall d'entrée de L'Hôtel Martinez. | Jean-François Romero

Au septième étage, voici la plus grande suite d'Europe construite sur 1.670 mètres carrés, la vue à 360 degrés s'étend sur la baie de Cannes: un exploit entre rupture et continuité. Dans le choix des matériaux, les références Art déco sont là et la suite peut être divisée en deux suites distinctes, la suite de l'Actrice et celle du Réalisateur (hommage au Festival de Cannes).

Une suite Prestige Mer à L'Hôtel Martinez. | Jean-François Romero

Il faut bien voir que la célébrité du Martinez a été boostée dans les années 2000 par Canal+ et l'émission de variétés magistralement conduite par Antoine de Caunes et Philippe Gildas, qui faisaient venir sur le plateau dressé sur la plage de l'hôtel des stars, des réalisateurs et réalisatrices, des personnalités du festival, certaines arrivant en bateau par la mer.

Cette quotidienne impertinente, gaie, innovante qui était très suivie par les fidèles de la chaîne payante dirigée par Pierre Lescure a fait découvrir le Martinez, ses coulisses, sa magie et l'attractivité de l'hôtel festif. Nombre de festivalièr·es ont alors adopté le grand hôtel qui s'est inscrit dans les adresses phares de Cannes pendant et après le rendez-vous du septième art.

Vue de L'Hôtel Martinez du ponton. | Arnaud Childeric

À côté du Carlton et du Majestic, valeurs sûres, le Martinez est devenu the place to live pour de courts séjours et des vacances –ce fut le cas pour l'été 2020.

À cela s'est ajoutée la green attitude de l'hôtel: des actions concrètes comme la recherche des produits du terroir, fruits et légumes, et la pêche locale sublimées à travers une cuisine pensée tendant vers zéro déchet.

De plus, le groupe Hyatt à l'échelle mondiale entend propager envers son personnel (200 employé·es au Martinez) une culture humaniste, un respect de l'autre et de la clientèle que l'on voit rarement dans l'univers de l'hôtellerie cinq étoiles.

Le Martinez est solidaire de l'Association Sourire & Partage. Pour chaque plat vendu, un euro est reversé aux enfants gravement malades et à leurs familles. En cela, le groupe Hyatt est exemplaire dans sa catégorie luxe cinq étoiles.

La haute cuisine de La Palme d'Or en terrasse sur la mer

Des trois prestigieux hôtels de Cannes, la grande table du Martinez a toujours été étoilée depuis un quart de siècle.

Le chef Christian Sinicropi. | Jérôme Kelagopian

Aux fourneaux, de valeureux maîtres cuisiniers se sont succédés: Christian Willer, premier double étoilé de Cannes en 1980, puis Jean-Yves Leuranguer parti au Fouquet's de Paris et aujourd'hui, voici le Cannois de Mandelieu Christian Sinicropi formé par Jean-Marie Gautier à Biarritz, ex-second des deux anciens chefs en titre.

C'est un admirable cuisinier à la démarche originelle qui met en valeur les produits aux saveurs et parfums prononcés. Dans son laboratoire culinaire aux nombreuses fioles et jus, Sinicropi élabore une partition personnalisée, cohérente et vraie. La Palme d'Or affiche complet à tous les dîners, deux étoiles depuis treize ans –un bail!

La salle du restaurant La Palme d'Or. | Jérôme Kelagopian

Les beaux plats de saison

  • Le gamberoni, chair crue, sucrée, rehaussée de corail et de végétal
  • La truite de Valcluse juste rosée, tourbée à l'eau azuréenne
  • La langoustine croustillante dans une mouvance maritime
  • Les œufs de poisson mimosa ronds et corsés des produits régionaux
  • L'agneau ou un horizon sensoriel axé sur la bergerie et le pâturage
  • La poitrine de pigeonneau rôtie sur l'os, sauce boisée, fumée et acidulée
  • Le végétal, la mémoire du goût autour du petit farci de courgette et d'aubergine
  • Le radis doux et présent à la fois, un relief de pigments, saveurs axées sur la racine

Au restaurant La Palme d'Or, Mouvement le Végétal, le radis avec la collaboration de l'artiste Gris One. | Jérôme Kelagopian

Desserts

  • La framboise en tartare, poivrons rouges, granité framboise et un soupçon de caviar
  • La framboise en soufflé chaud, cœur coulant, sorbet framboise et citron vert
  • L'abricot sur l'inspiration d'une île flottante
  • L'abricot en fraîcheur et ses infusions frappées
  • La racine en chocolat

Au restaurant La Palme d'Or, la racine en chocolat. | Jérôme Kelagopian

Ce récital d'une épatante créativité bien dominée est réparti en deux menus: six plats à 185 euros ou neuf plats à 240 euros. Le Michelin a très bien compris et valorisé le style recherché voire sophistiqué de cet artiste de la gourmandise azuréenne toujours en quête de saveurs originales et de goûts envoûtants.

Au restaurant La Palme d'Or, Mouvement le végétal, la courgette avec la collaboration de l'artiste Gris One. | Jérôme Kelagopian

Cannes n'a pas de grands cuisiniers chercheurs, Sinicropi dans sa palette surprenante fait naître de belles émotions et une sensualité stupéfiante de maîtrise et de goûts. La troisième étoile est bien là, le Michelin devrait honorer ce créateur cannois humble et savant, la clientèle l'attend et Cannes doit avoir un trois étoiles en 2021.

73 boulevard de la Croisette 06400 Cannes. Tél.: 04 93 90 12 34. Au Jardin, l'ardoise de 40 à 60 euros. À la Plage, carte méditerranéenne: salade niçoise (23 euros), loup de ligne, purée (40 euros), gourmandise succulente au chocolat (12 euros). Service sur le ponton. À La Palme d'Or, grand dîner sur réservation (jeudi, vendredi et samedi). Chambres à partir de 220 euros. Parking.

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