Qu'est-ce que l'amour? Une émotion? Un sentiment? Intouchable, intangible, volatile... À travers une scénographie poétique et artistique, l'exposition «De l'amour» au Palais de la découverte apporte des réponses scientifiques précises sur cet attachement irraisonné qui nous étreint tous un jour ou l'autre. Vous allez l'aimer!
Au moment de l’explosion du mouvement #metoo, en plein scandale Weinstein, des femmes du monde entier ont commencé à partager les agressions sexuelles et viols qu’elles avaient subi. De l’ombre à la lumière, plusieurs schémas toxiques ont commencé à se dégager, la question du consentement est devenue centrale, ce qui inclut la difficulté à dire non.
Un témoignage publié par le magazine Elle en mars 2019 évoque cette problématique. La mannequin Loulou Robert y racontait son viol par un photographe: «Je me sens mal, comme si j'étais extérieure à moi. Je ne le comprends que maintenant. À l'époque, je croyais qu'il n'y avait pas d'issue, que c'était bien pour moi tout ça, que je n'allais pas faire chier, que tout le monde comptait sur moi. Je ne voulais pas décevoir, être méchante. Et, après tout, c'était peut-être ça, être une femme. Il me regardait avec excitation, c'était peut-être ça, susciter des choses, être aimée. Bref, je mélangeais tout».
Des carences dès l'enfance
La réalité c’est que la majorité d’entre nous n’a pas été élevée dans l’apprentissage et le respect des règles du consentement. Dès l’enfance, les adultes quémandent aux enfants des câlins et des bisous, même quand ces derniers expriment ouvertement leur désaccord. On leur apprend qu’accepter fait plaisir, voire que cela évite le conflit. Un peu plus tard, on impose aux enfants des bisous sous couvert de politesse («va faire une bise à tata Monique»). Cela n'a rien d'un détail, car pour les adultes d’aujourd’hui, apprendre le consentement, exprimer le sien et respecter celui des autres, nécessite une déconstruction de tous les apprentissages de l’enfance.
La notion même de consentement est une idée relativement nouvelle. Jusqu’à peu, les femmes mariées se devaient d’offrir leur disponibilité sexuelle à leur conjoint. Longtemps, la justice a elle-même entretenu ce flou avec la notion de «devoir conjugal». Encore récemment, en mai 2011, le juge de la cour d’appel d’Aix en Provence a justifié un divorce pour faute grave en invoquant l’article 242 du Code civil, stipulant que les devoirs entre époux, assistance et fidélité allaient jusqu’à la disponibilité sexuelle: «les rapports sexuels entre époux sont notamment l'expression de l'affection qu'ils se portent mutuellement tandis qu'ils s'inscrivent dans la continuité des devoirs découlant du mariage» (Cour d'Appel d'Aix-en-Provence, 3 mai 2011).
Avec l’idée de devoir conjugal, on invisibilise de fait le viol conjugal. Celui-ci n’a été reconnu qu’en 1990 par la justice française alors que les spécialistes, comme la sociologue Maryse Jaspard, expliquent que «la moitié des viols sont commis dans le cadre d'un couple». Dire non voudrait donc encore dire qu’on n'aime pas ou plus. Si on aime, ou si on n’est pas sûre, alors on se doit de dire oui.
Plusieurs éléments sont ainsi brassés dans ce qu’on appelle «la zone grise du consentement», ces moment où on ne dit pas oui… ni non. D’abord les apprentissages de l’enfance, ensuite le chantage affectif, puis la pression sociale, et enfin le dogme de la loi du plus fort, renforcée par les longues années d’impunité pour Harvey Weinstein, Jeffrey Epstein ou encore R. Kelly.
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Prises de conscience tardives
Le plus dur, quand on travaille son propre rapport au consentement, par exemple dans le but d'éduquer ses enfants sur ce point, c’est de réaliser combien notre consentement n’a pas été respecté et combien on n'a pas été écouté. Des années après ressurgissent alors des traumatismes anciens ou récents, des moments que l’on avait minimisés ou effacés de sa mémoire (comme c’est le cas pour Arabella, le personnage écrit et interprété par Michael Coel dans la série I may destroy you). Ces prises de conscience sont douloureuses et nécessitent une confrontation violente avec la réalité. Et les victimes doivent ensuite entamer, souvent seules, un long chemin de reconstruction par la thérapie ou la voie de la justice, des épreuves longues et couteuses en temps, en énergie et en argent.
Aujourd’hui, le respect du consentement est défendu par les mouvements féministes et porté par les nombreux témoignages de victimes désirant se faire entendre, dans les tribunaux comme sur les réseaux sociaux. Au quotidien, de nouvelles générations de parents refusent le non-respect du consentement de leur enfant et des associations comme Consentis militent pour une plus grande visibilité de ces problématiques.
L’association Consentis a choisi comme terrain d’activisme les lieux de fêtes. Objectif indiqué dans la note d'intention du site: «faire en sorte que ce consentement sexuel soit respecté, mais c’est aussi de clarifier et de débroussailler les zones de flous pour déterminer ce qui différencie les interactions classiques des violences inacceptables. Notre mission : instaurer le savoir-être en boîtes de nuit pour plus de respect et plus de liberté!». La culture s’approprie également ces histoires de traumatismes et propose un changement de prisme de lecture, du male au female gaze, pour qu’un jour, dans un futur proche on espère, il soit plus facile de dire non et que ce non soit entendu.