Culture

Il n'y a pas d'affaire Woody Allen

Temps de lecture : 5 min

[BLOG You Will Never Hate Alone] Woody Allen n'est pas un pédophile, et quiconque prétend le contraire est soit un menteur, soit un affabulateur.

Woody Allen en conférence de presse le 9 juillet 2019 à San Sebastián, en Espagne, où a été tourné son prochain film. | Ander Gillenea / AFP
Woody Allen en conférence de presse le 9 juillet 2019 à San Sebastián, en Espagne, où a été tourné son prochain film. | Ander Gillenea / AFP

Le groupe Hachette a décidé de renoncer à publier les mémoires de Woody Allen. Cette décision lui appartient. Le puissant groupe de presse n'a de comptes à rendre à personne, si ce n'est à ses actionnaires.

On s'abstiendra donc de tout jugement moral sur cet abandon, qui concerne les seuls intérêts d'une entité privée. Autrement dit, Hachette fait ce que bon lui semble de son argent, et si rupture abusive de contrat il y a, il appartiendra au tribunal de se prononcer sur d'éventuels dommages et intérêts.

Non, la seule chose qui doit nous interpeller dans cette décision, ce sont les raisons qui l'expliquent, à savoir la manifestation de certains employés d'Hachette hostiles à la publication de ces mémoires, réaction consécutive à l'indignation de Ronan Farrow, auteur maison et par ailleurs fils de l'union entre Woody Allen et Mia Farrow –du moins au regard de l'état civil.

Dans toute cette affaire relative aux prétendus attouchements de Woody Allen sur sa fille adoptive Dylan, les faits tendent à montrer que ce dernier est résolument, obstinément, intensément innocent. Et j'affirme que quiconque se sera vraiment penché sur les tenants et aboutissants de toute cette machination –car c'en est une–, qui aura pris le temps d'étudier l'affaire sous tous ses aspects, s'il est d'une réelle probité, ne pourra que partager cet avis.

Non seulement parce que deux institutions bien distinctes, celle de l'hôpital de Yale et celle des services sociaux de New York, après des procédures longues et fouillées, ont conclu à l'absence de toute agression sexuelle, mais aussi parce que tout dans la chronologie des événements, au regard de la psychologie des uns et des autres, quand on examine de près les contours de ladite affaire, attestent de l'impensable culpabilité du cinéaste dont personne, absolument personne, n'a jamais eu à se plaindre de son comportement, fût-ce dans sa vie intime ou professionnelle.

Je ne vais pas ici retracer la kyrielle d'indices qui me permettent d'être aussi résolu dans mon affirmation, je l'ai déjà fait dans ces colonnes ici, et si vous n'êtes toujours pas convaincu, vous pouvez toujours lire les explications détaillées de Robert B.Weide ou les éclaircissements de Justin Levine.

Je ne prétends nullement que Dylan Farrow ment quand elle nous dit avoir été abusée par son père adoptif. Elle ne dit là que sa vérité, laquelle repose sur le récit de Mia Farrow, dont le but était de nuire à la carrière de son ancien compagnon.

Prétendre le contraire reviendrait à affirmer que les deux enquêtes diligentées après la supposée agression mentiraient dans leurs conclusions, qui toutes deux réaffirment la totale innocence de Woody Allen. Prétendre le contraire signifierait que le témoignage de Moses Farrow (lisez-le!), l'un des fils adoptifs du couple, est lui aussi entaché de nullité.

Prétendre le contraire serait consacrer la victoire de l'émotion sur la rationalité de l'institution judiciaire. Prétendre le contraire attesterait d'une réelle malhonnêteté intellectuelle qui prendrait le risque de jeter aux ornières la réputation d'un homme afin d'apparaître dans le camp de ceux qui protègent les victimes d'agressions pédophiles –combat ô combien nécessaire, mais qui ne peut s'exonérer d'être conduit à partir de faits bien réels.

Woody Allen n'est pas un pédophile.

Il ne l'a pas été vis-à-vis de sa fille adoptive Dylan, pas plus qu'envers Soon-Yi Previn. Là aussi, on aimerait une bonne fois pour toutes mettre les points sur les i et les barres sur les t. Soon-Yi n'est pas la fille adoptive de Woody Allen: elle est la fille adoptive de Mia Farrow et d'André Previn.

Woody Allen et Mia Farrow, au temps de leur liaison, ne vivaient pas ensemble. Chacun avait leur appartement et Woody Allen n'a, selon le témoignage de Moses Farrow, jamais passé une seule nuit dans l'appartement de sa fiancée de l'époque.

Woody Allen et Soon-Yi ont commencé à avoir des relations intimes quand cette dernière avait passé depuis longtemps l'âge de la majorité.

Vous pouvez trouver cette relation tordue –dans une certaine mesure elle l'est–, mais d'aucune manière, sous aucun angle, elle n'a le moindre caractère pédophile. Pas le moindre. Vous avez le droit de la considérer comme rebutante, étrange, dégoûtante, perverse, dégueulasse, déroutante, anormale, abjecte, insolite, hors-normes, mais en aucun cas vous ne pouvez la qualifier de pédophile –ou alors, c'est que vous entretenez avec la vérité des relations fort étranges.

Certains affirment qu'à l'époque, un procès aurait pu avoir lieu, mais que le juge en a décidé autrement pour épargner Dylan. Cette interprétation est une hérésie judiciaire, une farce grotesque, une plaisanterie immonde qui tendrait à dire aux violeurs d'enfants de ne pas se gêner puisque, afin de préserver la santé mentale de la victime, l'institution judiciaire fermera les yeux sur le crime commis. Il n'y a pas eu de procès pour la simple et bonne raison qu'il ne pouvait déboucher que sur l'innocence de Woody Allen.

Woody Allen est la victime d'une chasse aux sorcières entreprise par des esprits exaltés qui veulent voir en Ronan Farrow l'apôtre absolu de la vérité –ce qui, après tout, peut se concevoir.

Grâce à son remarquable travail, Ronan Farrow est parvenu à rendre leur honneur aux victimes d'Harvey Weinstein, qui à cette heure dort fort heureusement en prison. Que grâce lui en soit rendue. Mais cette réussite incontestable ne l'autorise en rien à user de son aura pour confondre à tort son père.

En tant que journaliste, quand bien même serait-il encore sous l'influence pernicieuse de sa mère, il devrait disposer du discernement nécessaire pour mettre de côté ses affects et laisser la vérité éclater.

Quant à Dylan, c'est une toute autre affaire. Sa personnalité s'est tellement construite autour de la croyance en cette agression, sa mère l'a tellement intoxiquée, qu'un retour en arrière est non seulement impossible, mais même pas souhaitable.

Lorsqu'on a été abusé de la sorte, quand on s'est identifié avec véhémence à une cause pareille –la défense des victimes d'actes pédophiles–, aller à rebours de ses croyances exige une telle force mentale que ce combat risquerait de plonger la personnalité dans un chaos si funeste que mieux vaut y renoncer.

Nous vivons une bien étrange période où, sur la base d'informations non étayées voire tout bonnement fausses ou extravagantes, on parvient à réduire au silence un individu.

Où la vérité cède aux accès de fièvre de l'opinion publique, dont on sait combien et comment elle peut être facilement manipulée.

Où peu à peu, la dictature de l'émotion remplace les règles mêmes de l'État de droit.

Où l'on piétine la justice pour mieux imposer ce que l'on pense être la vérité, sans réaliser à quel point on dessert la cause qu'on prétend servir.

Où par l'entremise d'un seul tweet, vous pouvez réduire à néant la vie d'une personne.

Où la force d'une image ou d'un passage à la télé a plus de valeur que 1.000 livres écrits sur le même sujet.

Où, jour après jour, on assiste à des mises à mort qui ont des parfums de lynchage.

Ne nous y trompons pas.

Il y a encore deux siècles, Woody Allen aurait fini sur un bûcher sous les vivats de la foule en délire. Aujourd'hui, on se contente de le détruire médiatiquement et de le réduire au silence.

Certains y verront un progrès; d'autres, dont je suis, pleureront sur l'humanité qui n'apprend jamais rien de rien et perpétue à travers les âges son goût pour les carnages et les lynchages de toutes sortes.

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